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Politique
Chronique |

La résurrection de Jean Charest

En politique, tout est question de «timing».

Pâques s’en vient. Après le départ de la vie politique de Jean Charest en 2012, une forte animosité envers l’homme s’est cristallisée durant de nombreuses années. L’expression «les années Charest» a pris une connotation toute péjorative. Or, la guerre commerciale avec les États-Unis, en plus de permettre au Parti libéral du Canada de rebondir, a offert à Jean Charest l’opportunité de se réhabiliter et de vivre une véritable résurrection. 

En 2012, Jean Charest quitte la vie politique québécoise au son des manifestations étudiantes, des casseroles et des audiences de la Commission Charbonneau et du spectre de ses conclusions. Tout ceci avec des taux d’insatisfaction qui avoisinaient les 70%.

 

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Plus d’une décennie plus tard, en 2022, M. Charest se lance dans la course à la direction du Parti conservateur du Canada. Une espèce de retour aux sources, lui qui avait été le chef du PCC de 1993 à 1998. Il termine la course loin derrière Pierre Poilievre, avec 16,07% des voix. Retour non pas à la case départ, mais à la pratique du droit dans le secteur privé.

En 2024, dans une envolée, François Legault s’était dit insulté d’être comparé à Jean Charest par le chef du PQ : «Y a-t-il quelque chose de plus insultant que de se faire comparer à Jean Charest?». Bien que plusieurs aient dénoncé le manque de classe du premier ministre, force était de constater que l’aura de M. Charest demeurait encore bien sombre, douze ans après son départ de l’édifice Honoré-Mercier, où se trouve le bureau des premiers ministres.

Le tremblement de terre Trump

Janvier 2025, Donald Trump retourne à la Maison-Blanche et secoue son pays avec une série de décrets. Dès les premiers jours, il s’engage dans une charge protectionniste et annexionniste d’une ampleur inégalée.

Le 25 janvier, Jean Charest est nommé par Justin Trudeau sur le Conseil du premier ministre sur les relations canado-américaines. On le voit depuis régulièrement dans les médias, apporter son éclairage sur les relations entre les deux pays, l’enjeu central qui retient toute l’attention depuis le début de l’année.

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À l’aise dans ce nouveau rôle, je n’entends plus rien de négatif concernant Jean Charest. Au contraire, devant les difficultés actuelles de Pierre Poilievre, plusieurs se demandent si le destin électoral du Parti conservateur aurait été le même (ou pas) avec un Jean Charest à sa tête.

Le PCC de Poilievre a connu une chute importante de popularité dans les intentions de vote des Canadiens, et le chef conservateur n’arrive pas à se positionner comme l’homme de confiance des électeurs face à Donald Trump vindicatif, lui préférant le libéral Mark Carney.

Quel revirement! Alors qu’avant les Fêtes, rien ne semblait permettre au PLC de se relever de l’usure du pouvoir, le Parti libéral mène cette campagne par plusieurs points dans les sondages.

On peut évidemment, se demander qu’aurait donné un duel Carney-Charest dans ce contexte de crise commerciale? Nous ne le saurons sans doute jamais puisque M. Charest joue désormais un rôle de soutien à Mark Carney.

Blue Liberals, Red Tories

Donc Charest est le bras droit du premier ministre Mark Carney (et non pas du candidat libéral) dans cette crise. Et le mélange des allégeances a de quoi confondre: conservateur fédéral au début de sa carrière, puis libéral provincial et premier ministre du Québec puis de nouveau conservateur fédéral, pour être finalement embauché par des libéraux fédéraux.

Il n’est pas le seul dans cette zone grise. Christy Clark, ex-première ministre libérale de la Colombie-Britannique, a appuyé Jean Charest lors de la course à la direction. Puis, elle a voulu se lancer dans la course à la direction du Parti libéral, au début 2025.

Doug Ford lui, s’entend comme larron en foire avec le gouvernement libéral fédéral, mais semble à couteaux tirés avec Poilievre. Sa ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney, a quant à elle officiellement appuyé Pierre Poilievre pour l’élection fédérale.

Ces deux franges de conservateurs plus libéraux (Red Tories) ou de libéraux plus conservateurs (Blue Liberals) se retrouvent ballottées, pas encore certaines du club auquel elle veut adhérer.

En cas de défaite conservatrice, est-ce que Pierre Poilievre pourra rester à la tête du parti conservateur? Et est-ce que Jean Charest pourrait tenter de nouveau sa chance? Il n’en aura peut-être pas envie, surtout s’il est toujours occupé par la crise commerciale.

Et n’oublions jamais qu’en politique, tout est question de timing. Mark Carney, Jean Charest et Pierre Poilievre en savent quelque chose.

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