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Politique
Chronique |

Débat des chefs: le boys club en spectacle

J’ignore encore si je serai capable de regarder à la télévision six hommes discuter entre eux du sort des femmes.

Pendant que les masculinistes radicalisent vos enfants en leur rentrant dans la tête que les femmes et les féministes contrôlent le monde, notre pays se lance dans une course entre hommes pour l’une des élections les plus importantes de notre vie.

Cinq partis.

Cinq hommes.

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Parmi les enjeux de cette élection: l’avortement.

Sur la place publique, il passe presque sous le radar dans un bruit médiatique où tout semble passer avant le droit des femmes à l’autonomie de leur propre corps.

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Ce serait une erreur de considérer nos institutions démocratiques comme à l’abri d’un recul des droits des femmes. Le chef conservateur a beau dire le contraire, mais à l’intérieur, ses députés anti-avortement sont en augmentation, sous une pression de plus en plus forte de groupes externes qui ont droit de vie ou de mort sur le parti. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est l’ancien député Alain Rayes dans le très pertinent documentaire de Léa Clermont-Dion, La peur au ventre.

Cinq hommes. Un dont le parti mène une campagne de l’intérieur contre l’autonomie des femmes. Un autre dont tout le monde semble avoir oublié les allégations passées d’inconduite sexuelle. Un autre encore, dont l’une des premières actions au pouvoir a été de supprimer le poste de ministre des Femmes et de l’Égalité des genres.

Cinq hommes donc, dans une lutte qui aura des incidences sur notre vie. Pour en décider, les débats des chefs qui auront lieu la semaine prochaine seront menés… par des hommes. Ce serait plus simple d’assumer votre haine.

J’en perds mes mots tellement c’est ahurissant cette décision de nos décideurs publics d’envoyer au cœur de l’arène un homme de plus, pourquoi pas, mener un débat avec en toile de fond, une guerre avec le corps des femmes comme champ de bataille.

J’ignore encore si je serai capable de regarder à la télévision six hommes discuter entre eux du sort des femmes. Je les vois déjà d’ici, chacun leur tour jouer les bons pères de famille, protecteurs et biens intentionnés.

Les débats ne se sont pas encore produits qu’ils nous portent déjà préjudice. C’est qu’ils aident à normaliser l’idée que le monde dans lequel on vit se doit d’être décidé par les hommes, pour notre bien-être à nous.

Prenez un instant pour essayer de vous imaginer l’inverse. Une bataille à cinq femmes pour trouver le prochain chef d’État, dans un débat modéré par une femme. Vous n’y arrivez pas? C’est pourtant ce que les masculinistes semblent voir d’où ils sont.

En voyant l’image de ces cinq hommes et de ces modérateurs masculins des débats des chefs qui me mettent déjà hors de moi, je ne peux m’empêcher de penser à cette montée du masculinisme dont on parle parallèlement et de ces hommes convaincus que le monde est contrôlé par les femmes.

Parfois, j’aimerais voir le monde de leurs yeux.

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