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«Je n’ai pas 18 ou 24 mois à perdre.»
Le gouvernement Legault a avoué mercredi que le ministère de l’Environnement a laissé tomber un critère qui aurait assujetti le projet de Northvolt à une évaluation du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE).
Benoit Charette, ministre de l’Environnement, a expliqué cette décision en disant dans un entretien avec La Presse qu’un BAPE aurait tué le projet associé à la filière batterie québécoise dans l’œuf en raison des délais qui l’accompagnent.
Voyez le reportage de Simon Bourassa sur ce sujet dans la vidéo.
«Si moi j’avais dit [aux dirigeants de] Northvolt à l’époque qu’un BAPE, ça nous amène dans 18 mois avant de pouvoir leur donner une idée de ce qui serait possible, on n’aurait pas eu de projet au Québec», aurait déclaré M. Charette. «C’est aussi simple que ça.»
Pourtant, plus des deux tiers des Québécois seraient en faveur que le projet d'usine de cellules de batteries en Montérégie soit soumis à une évaluation du BAPE.
M. Charette juge que le Québec n’a pas ce luxe. «Je n’ai pas 18 ou 24 mois à perdre», aurait dit le ministre, tout en indiquant aux citoyens que des évaluations environnementales suivront quand même leur cours. «Je suis à six ans de devoir livrer des objectifs extrêmement ambitieux. On est dans cette course nous-mêmes.»
Les justifications du ministère de l’Environnement ne plaisent pas à l’opposition. «Je suis indignée et les Québécois ont raison de l'être aussi», a commenté Virginie Dufour, porte-parole libérale en matière d’Environnement, dans un communiqué diffusé mercredi. «On savait le gouvernement de la CAQ insensible aux enjeux environnementaux et à la crise climatique, mais à ce point, c'est surréaliste.»
Mme Dufour réclame une rencontre d’urgence à ce sujet. «Par son manque de transparence, la CAQ démontre qu'elle est la pire alliée de Northvolt et de ce projet bénéfique pour notre économie.»
À VOIR ÉGALEMENT | Des citoyens dénoncent un manque de transparence chez Northvolt
La réaction de Québec solidaire (QS) est également très négative et son responsable en matière d'Environnement va encore plus loin. Pour Haroun Bouazzi, la CAQ a «sciemment tassé le BAPE pour prioriser les intérêts d’une multinationale étrangère malgré les milliards d’argent public investis».
M. Bouazzi estime qu'il s'agit «d'un saccage en règle de l'acceptabilité sociale de la filière batterie.»
Selon le péquiste Joël Arseneau, le ministre «admet avoir induit les Québécois en erreur depuis des semaines sur le changement des règles. Il admet que Northvolt a obtenu tous les passe-droits souhaités».
«Le ministre prouve par ses déclarations qu'il renie ses responsabilités de protéger l'environnement, assurer la conservation et la mise en valeur de la biodiversité et jouer un rôle clé dans la transition climatique, dans une perspective durable, pour jouer les cheerleaders du développement manufacturier», a-t-il indiqué dans une déclaration écrite transmise à La Presse canadienne.
Selon le péquiste Joël Arseneau, le ministre «admet avoir induit les Québécois en erreur depuis des semaines sur le changement des règles. Il admet que Northvolt a obtenu tous les passe-droits souhaités».
«Le ministre prouve par ses déclarations qu’il renie ses responsabilités de protéger l’environnement, assurer la conservation et la mise en valeur de la biodiversité et jouer un rôle clé dans la transition climatique, dans une perspective durable, pour jouer les cheerleaders du développement manufacturier», a-t-il indiqué dans une déclaration écrite transmise à La Presse Canadienne.
Le ministre Charette s’est défendu sur X mercredi matin. «Je continuerai de le répéter, le Québec possède l’un des cadres d’évaluation environnementale des plus rigoureux en Amérique du Nord. L'absence d'un BAPE à la première phase du projet Northvolt n'exclut absolument pas le respect des normes par l'entreprise», a-t-il écrit.
Des environnementalistes et des citoyens ont par ailleurs montré leur colère à la suite de cette déclaration de M. Charette. Ils ont l'impression de s'être fait avoir par le gouvernement Legault.
À voir dans la vidéo ci-dessous:
Dans une déclaration écrite, Northvolt indique que «depuis le début des discussions avec les gouvernements du Québec et du Canada, nous avons été transparents et clairs à propos de l’échéancier serré du projet et les conditions de succès liées à notre implantation au Québec».
«Nous évoluons dans un contexte où la capacité à livrer des projets dans les temps est une condition essentielle de réussite et où la compétition mondiale est féroce, alors que la Chine et les États-Unis subventionnent massivement des projets comme le nôtre», ajoute le porte-parole de l’entreprise, Laurent Therrien.
Il n'y a donc pas à dire, l'impact du projet de Northvolt sur un terrain à McMasterville et à Saint-Basile-Le-Grand où la future usine sera située suscite de nombreux débats, notamment en raison des répercussions sur les milieux humides.
Un règlement a été modifié en février 2023 par Québec permettant au projet de Northvolt d’échapper à l’examen du BAPE, selon des informations d’abord relayées par Radio-Canada.
Sa capacité de production serait de 56 000 tonnes métriques, alors que le Règlement relatif à l’évaluation et l’examen des impacts sur l’environnement de certains projets a été modifié, de sorte qu'une évaluation du BAPE n'est pas nécessaire pour les usines de batteries qui produisent 60 000 tonnes métriques ou moins.
«Nous n’avons pas fait de démarche pour modifier des seuils déjà présents dans la réglementation. L’article concernant la matière active de cathode, qui établit désormais le seuil d’assujettissement à 60 000 tonnes, a fait l’objet d’une préconsultation dès décembre 2022, à laquelle Northvolt n’a pas participé», a indiqué Laurent Therrien, porte-parole de Northvolt.
La phase trois du projet de Northvolt – une usine de recyclage de batteries – sera, quant à elle, soumise à un examen du BAPE.