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«Même si c’est la fin du campement, ce n’est pas du tout la fin du mouvement.»
C'est à l'Université McGill que le premier campement de protestation contre la guerre dans la bande de Gaza avait été installé au pays. Son démantèlement, cette semaine, soulève des questions sur ce que feront désormais les militants du mouvement propalestinien au Canada pour faire entendre leurs revendications.
Les manifestants de McGill promettent de continuer à faire pression sur l’université pour qu’elle mette fin à ses investissements liés à l’armée israélienne et coupe les liens avec les institutions israéliennes.
«Nous obligerons McGill à se désinvestir. Nous obligerons toutes les institutions complices à se désinvestir», a promis Eric Rogers, qui a allégué avoir été «expulsé de force», mercredi, du terrain du campus du centre-ville de McGill, sur lequel des dizaines de tentes étaient installées depuis fin avril.
«Même si c’est la fin du campement, ce n’est pas du tout la fin du mouvement», a-t-il annoncé.
Le retrait du campement de McGill fait suite à une vague de fermetures d'autres lieux de protestation sur les campus à travers le pays, laissant des questions sur la manière dont les militants vont désormais faire entendre leur voix.
«Je soupçonne que ce pourrait être la fin des campements pour l’instant, mais il y aura d’autres moyens d’essayer de demander des comptes aux institutions», estime Ted Rutland, professeur à l’Université Concordia, qui a soutenu le campement de McGill. «Il ne fait aucun doute que l’esprit, ici, est très engagé, et pour cause. C’est la cause de notre vie.»
Jeudi, des groupes propalestiniens des universités McGill et Concordia ont annoncé une manifestation en soirée au square Phillips, près du campus de McGill. «Les démantèlements ne nous arrêteront pas !» pouvait-on lire sur une affiche annonçant l’événement.
M. Rutland s’attend à une action plus directe à l’avenir. «Qu’il s’agisse de bloquer les autoroutes, les ports, les voies ferrées… Je pense que tout le monde comprend que c’est le genre d’action dont nous avons besoin en ce moment.»
Mardi soir, quelques heures avant le démantèlement du campement, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, a été évacuée d’une réunion du conseil après qu’elle eut été perturbée par des manifestants propalestiniens.
McGill est l’une des nombreuses universités où les manifestations ont été interrompues ces derniers jours. La semaine dernière, un juge de l’Ontario a accordé une injonction contre un campement vieux de deux mois à l’Université de Toronto. Selon Michael Geist, professeur de droit à l’Université d’Ottawa, cette décision a fourni «une feuille de route pour d’autres établissements» cherchant à déloger leurs propres protestataires sur les campus.
Ces derniers jours, les organisateurs de plusieurs campements en Ontario ont choisi de se retirer, notamment à l’Université de Waterloo, à l’Université Western et à l’Université d’Ottawa. Les campements dans les universités de Guelph et de Windsor devraient être fermés dans les prochains jours.
L’Université Memorial de Terre-Neuve a fait référence à l’injonction visant à évacuer un camp de protestation propalestinien la semaine dernière sur son campus de St. John’s.
Les manifestants de l’Université de la Colombie-Britannique à Vancouver ont mis fin à leur campement cette fin de semaine, affirmant qu’ils partaient volontairement.
Il reste encore quelques manifestations sur les campus, notamment à l’Université de Victoria, en Colombie-Britannique, et à l’Université Dalhousie à Halifax. «L’idée selon laquelle on peut simplement occuper un espace sur un campus universitaire pendant des mois, je pense que c’est clairement révolu», avance M.Geist.
Aujourd’hui, dit-il, les gens attendent «avec impatience de voir ce qui se passera en septembre», lorsque les étudiants retourneront dans les universités du pays. S’ils tentent de réoccuper les campus, a-t-il prévenu, «je ne pense pas qu’il y ait de doute que (les universités) prendraient des mesures pour tenter d’y mettre un terme assez rapidement».
Richard Robertson, directeur de la recherche et du plaidoyer chez B'nai Brith Canada espère que l’ère des campements est révolue. «Il est frustrant qu’il ait fallu autant de temps… pour que les universités de tout le pays prennent réellement des mesures contre les campements», a-t-il plaidé.
«J’espère que les institutions ont tiré une leçon en permettant à ces (manifestations) de s’établir, et qu’elles seront plus proactives pour les empêcher d’avancer», a-t-il ajouté.
Le démantèlement de la manifestation sur le campus de l'Université McGill ne découlait pas directement de l’injonction de l’Université de Toronto. Deux juges de la Cour supérieure du Québec avaient déjà rejeté des demandes d’injonction contre le campement, et l’université en cherchait une autre.
Entre-temps, McGill a embauché une entreprise pour enquêter sur le camp et a constaté que la plupart des personnes qui y dormaient n’étaient pas hébergées. Il y avait également des risques pour la santé et la sécurité sur le site, notamment la consommation de drogues. L’université a alors décidé qu’il était «urgent» de démanteler le camp.
Pourtant, M. Rutland croit que le campement de McGill servait à quelque chose, même si les demandes des étudiants n’étaient pas satisfaites. «Je pense que cela a implanté l’exigence du désinvestissement dans l’esprit du public, a-t-il relevé. Et je pense que cela a provoqué un débat sur la manière dont nous, sans le savoir, finissons par soutenir des choses qui sont contraires à nos valeurs.»
McGill a déclaré qu’elle envisagerait de se désinvestir des fabricants d’armes.
En neuf mois de bombardements et d’offensives à Gaza, Israël a tué plus de 38 200 personnes et en a blessé plus de 88 000, selon le ministère de la Santé du territoire, qui ne fait pas de distinction entre combattants et civils dans son décompte.
Lors d’un raid du 7 octobre, des militants du Hamas ont tué 1200 personnes dans le sud d’Israël, pour la plupart des civils, selon les autorités israéliennes. Les militants ont pris en otage environ 250 personnes. Environ 120 personnes sont toujours en captivité, et environ un tiers serait mort.