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«S'il vous plaît, M. le premier ministre, fermez le bureau du Québec en Israël.»
La députée solidaire Ruba Ghazal s'est levée en Chambre mercredi vêtue d'un keffieh, ce foulard symbole de la cause palestinienne, pour réclamer la fermeture du bureau du Québec à Tel-Aviv.
En avril, le keffieh a été interdit par le président de l'Assemblée législative de l'Ontario, Ted Arnott, qui, par pure coïncidence, se trouvait dans les tribunes du Salon bleu, mercredi.
«La Cour pénale internationale veut mettre des mandats d'arrêt contre le premier ministre (israélien Benjamin) Nétanyahou pour crimes de guerre. Au même moment, le gouvernement du Québec ouvre un bureau en Israël», a souligné la députée.
«Qu'est-ce que nos petits-enfants vont retenir du triste épisode de l'ouverture d'un bureau du Québec en Israël? (...) S'il vous plaît, M. le premier ministre, fermez le bureau du Québec en Israël.»
«Le gouvernement du Québec est de tout cœur avec les peuples qui peuvent souffrir», a-t-il dit, en rappelant que le gouvernement avait entre autres demandé un cessez-le-feu immédiat.
«Mais de lier ce qui se passe en ce moment avec les relations internationales du Québec, puis l'ouverture d'un bureau pour représenter le Québec, je pense que c’est un amalgame qui est douteux», a-t-il prévenu.
Se levant à son tour, le député solidaire Guillaume Cliche-Rivard a souligné qu'Israël a rappelé mercredi ses ambassadeurs en Espagne, en Norvège et en Irlande après que les trois pays eurent décidé de reconnaître l'État de la Palestine.
«Quel message on projette quand, à l'opposé, on y envoie les nôtres et on ouvre un nouveau bureau du Québec?» a-t-il demandé. Il reproche au Québec de «s'associer» à «des gens qui seront recherchés par la Cour pénale internationale».
«Omar el-Béchir, Saïf al-Islam Kadhafi, Abdel Rahim Mohammad Hussein, toutes ces personnes sont recherchées par la Cour pénale internationale pour crimes de guerre ou crimes contre l'humanité. »
«Jamais on ne s'en approcherait. Et pourtant c'est ce que la Coalition avenir Québec semble faire avec Benyamin Nétanyahou et son ministre de la Défense, qui seront vraisemblablement (...) visés par des mandats d'arrêt.»
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À nouveau, le ministre Roberge a suggéré d’«éviter les amalgames». Il a déclaré que le Québec souhaitait «que toutes les parties respectent le droit international puis épargnent les civils».
«Le Québec avait prévu depuis des années (...) de poursuivre son expansion avec des bureaux du Québec qui représentent les intérêts, les valeurs du Québec», a-t-il aussi rappelé.
En mars, le cabinet de la ministre Biron avait déclaré que l'ouverture d'un bureau à Tel-Aviv était «mûrement réfléchie», soulignant que ce bureau allait servir pour brasser des affaires partout dans la région.
Cette question s'est vite transportée à Ottawa, mercredi. Le chef du Nouveau Parti démocratique, Jagmeet Singh, a déclaré que, selon lui, le moment était mal choisi pour déployer une antenne à Tel-Aviv.
«C'est leur décision, mais personnellement, je pense que dans le contexte d'une guerre, particulièrement dans un contexte de violation des droits de la personne, (...) ce n'est pas une bonne décision», a-t-il affirmé.
À l'inverse, le député libéral fédéral Anthony Housefather a dit trouver «complètement acceptable» l'initiative du Québec. «C'était quelque chose de prévu et je crois qu'on bénéficie, au Canada, d'avoir des échanges avec Israël.»
Elle-même d'origine palestinienne, Mme Ghazal a plus tard défendu le port du keffieh dans les assemblées législatives. Elle a qualifié d'«ironique» la présence de M. Arnott à l'Assemblée nationale.
«Écoutez, le keffieh est permis même à la Knesset, c'est-à-dire au gouvernement en Israël, de la même façon qu'il est permis aussi à Ottawa. Ici aussi, il l'est», a-t-elle déclaré lors d'une mêlée de presse.
«Ce monsieur-là (Ted Arnott) devrait s'inspirer de ce que les Parlements à travers le monde font, où c'est perçu comme un symbole du patrimoine culturel. C'est comme si j'arrivais avec ma ceinture fléchée.»
Mme Ghazal a toutefois reconnu que le keffieh s'est transformé au fil des ans en symbole de lutte pour la liberté du peuple palestinien; ce symbole a tout à fait sa place en politique, selon elle.
«Ça prend quand même des décisions politiques pour dire à Israël que c'est inacceptable ce qui est en train de se passer», a-t-elle affirmé.
En matinée, son parti avait exhorté le Québec à reconnaître l'État palestinien. «Québec n'a pas besoin d'attendre après le Canada pour faire ça», avait lancé en point de presse la co-porte-parole de Québec solidaire par intérim, Christine Labrie.