Passer au contenu principal
À voir:

Début du contenu principal.

Politique

Le projet de loi agrandissant un dépotoir de déchets dangereux adopté sous bâillon

Les trois partis d'opposition ont rejeté la pièce législative.

Reportage vidéo :
/ Noovo Info
Patrice Bergeron
Texte :
Patrice Bergeron / La Presse canadienne

Le dépotoir de déchets dangereux de Stablex, à Blainville, pourra bientôt être agrandi pour une quarantaine d'années de stockage supplémentaires, à moins que la Cour supérieure bloque tout. 

Le gouvernement Legault a fait adopter de force, vendredi matin, en accélérant les procédures, le projet de loi 93, qui autorise l'expropriation d'un terrain appartenant à la Ville, malgré la contestation des partis d'opposition, de municipalités et de groupes environnementaux. 

L'entreprise américaine et le gouvernement plaidaient l'urgence, en arguant que le dépotoir atteindrait sa pleine capacité d'ici à deux ans, qu'il faut deux ans pour préparer un autre terrain, et que 600 clients, industries et municipalités, en dépendent.

«On appelle ça du chantage», a déploré le député péquiste Joël Arseneau.  

 

Mais la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) et la Ville de Blainville ont déjà fait savoir vendredi qu'elles demandaient à la Cour supérieure de suspendre la loi, le temps de valider sa légalité. 

Les travaux d'agrandissement sur le terrain contesté devraient commencer sous peu, puisque le déboisement doit être effectué avant le 15 avril, date d'entrée en vigueur de nouvelles règles fédérales sur les oiseaux migrateurs. 

«On n'a plus de temps à perdre», a plaidé la ministre des Ressources naturelles, Maïté Blanchette Vézina, qui pilotait le projet de loi.

«On va devoir donner le feu vert rapidement à l'entreprise pour débuter ses travaux dans le but d'éviter une potentielle crise des matières dangereuses. Évidemment, les mesures que nous prenons par le biais du projet de loi ne font pas l'unanimité. La démarche que nous avons lancée a engendré son lot de réflexions et de discussions.»

À VOIR AUSSI | Campagne électorale: François Legault dévoile ses demandes pour les chefs fédéraux

Les députés, qui ont siégé toute la nuit, ont finalement adopté le projet de loi 93 à 61 voix contre 31. 

Les trois partis d'opposition ont rejeté la pièce législative - qui donne d'ailleurs des pouvoirs extraordinaires au gouvernement, et qui n'autorise «aucun pourvoi en contrôle judiciaire prévu au Code procédure civile» sauf sur une question de compétence.

«C'est un projet de loi taillé sur mesure pour une entreprise américaine» et qui «obéit à ses diktats», a condamné M. Arseneau.  

«François Legault manque de jugeotte: si (les matières contaminantes) coulent dans 10 ou 15 ans, il ne sera plus en politique», a dénoncé le chef de l'opposition, Marc Tanguay.

La cheffe parlementaire de Québec solidaire (QS), Ruba Ghazal, a d'ailleurs remis en question le procédé industriel de Stablex, mais aussi la qualité des échantillons de contaminants prélevés.

M. Tanguay a prévenu les médias de surveiller dès maintenant le terrain exproprié, parce qu'«il y a un bulldozer qui va commencer» les travaux bientôt, car le projet de loi «donnait toutes les autorisations» à Stablex. 

La Ville de Blainville proposait un autre terrain adjacent, une option écartée autant par le gouvernement que par l'entreprise, qui le considèrent trop près, à 300 mètres, d'un quartier résidentiel.

En outre, le projet d'agrandissement coûterait 150 millions $ à Stablex sur le terrain qu'elle veut, plutôt que 250 millions $ sur celui proposé par la Ville: l'entreprise y a entreposé des tonnes d'argile et il coûterait donc 100 millions $ de plus pour convoyer cette matière ailleurs.

Le terrain obtenu compte neuf hectares de milieux humides et 58 hectares de boisés.

Un règlement de contrôle intérimaire (RCI) est en vigueur sur les deux terrains, ce sont donc des territoires en partie protégés par la Communauté métropolitaine de Montréal, en raison des milieux humides qui s’y trouvent.

Le centre de traitement de déchets industriels de Stablex comprend actuellement une usine de traitement et cinq cellules d'enfouissement. 

Le terrain choisi permettrait à l'entreprise de construire une sixième cellule d'enfouissement et de poursuivre ses activités pour une quarantaine d’années, plutôt que 24 ans sur l'autre terrain plus petit.

Les déchets traités proviennent, par exemple, de l’industrie minière ou encore de l’industrie pharmaceutique. En 2024, 17 % de ces déchets étaient importés des États-Unis. 

Reportage vidéo :
/ Noovo Info
Patrice Bergeron
Texte :
Patrice Bergeron / La Presse canadienne