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Justice

Le père de la fillette martyre de Granby souhaite de nouveau obtenir une semi-liberté

Devant les arguments présentés, les commissaires de la CLCC désirent prendre le temps nécessaire pour examiner sa demande.

/ Noovo Info

Le père de la fillette martyre de Granby a de nouveau plaidé pour obtenir une semi-liberté à la Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC), mercredi. Devant les arguments présentés, les commissaires de la CLCC désirent prendre le temps nécessaire pour examiner sa demande.

Son audience s'est tenue environ deux ans après qu’il a été condamné à quatre ans de pénitencier. Il s’agissait de la deuxième fois qu’il faisait une telle demande. Au printemps dernier, la CLCC lui a refusé sa semi-liberté.

L'homme a porté la décision en appel, ce qui lui avait également été refusé pour une seconde fois en septembre dernier. L’homme de 34 ans avait plaidé coupable en décembre 2021 à une accusation de séquestration.

Voyez le compte-rendu de Dominique Côté au bulletin Noovo Info Estrie dans la vidéo liée à ce texte.

Un homme «changé»?

L’agente du Service correctionnel du Canada (SCC) représentant l’homme ne souhaite pas qu’il obtienne une liberté totale. «Nous croyons qu’il n’a plus rien à retirer en institution, autre que l’aspect punitif. Il serait plus bénéfique qu’il intègre une maison de transition», a-t-elle indiqué lors de l'audience. L'agente a affirmé que le délinquant est toujours en suivi psychologique depuis sa détention et qu’il suit de manière assidue son programme de réhabilitation.

À titre d’exemple, l’agente a souligné qu’il reconnaît avoir des lacunes dans ses aptitudes parentales, qu’il a une faible estime et confiance en soi, et qu’il a une certaine immaturité au plan affectif. Selon elle, il reconnaît avoir mis en péril la sécurité de son enfant en la laissant seule avec sa conjointe de l’époque, et que ses capacités parentales étaient lacunaires à cette période.

«Depuis la tragédie, il n’a pas passé un jour sans qu’il souhaite pouvoir retourner en arrière. Il s’en voudra toute son existence, et avec raison», a dit l'agente du SCC au dossier du père de la fillette martyre de Granby. Il aurait un désir sincère de réhabilitation et une réelle empathie pour les victimes de cette affaire, selon elle.

Le père de la fillette souhaiterait reprendre sa vie en main. En audience, il a expliqué aux commissaires qu’il reconnaît ses erreurs, et que son temps en pénitencier lui a permis de constater qu’il avait de sérieux problèmes à l’époque, ce qui a ultimement mené au décès de sa fille.

Or, pendant son audience, l’homme a souvent remis en question sa propre responsabilité dans la tragédie, ce à quoi la CLCC a répondu que le drame «s’est étalé sur des mois.»

Le délinquant a tenté de justifier ses agissements en parlant d’une accumulation de plusieurs facteurs. «J’avais demandé de l’aide à tous les niveaux. Oui, j’ai eu des lacunes au niveau parental, mais de là à dire que j’ai mal agi pendant des mois… je ne sais pas. Le jour où elle est décédée, je l’ai séquestrée.»

L’un des commissaires n’a pas mâché des mots, en écoutant cette affirmation.

«Monsieur, c’est votre capacité à reconnaître vos omissions, vos manquements, qui ont mené au drame. Vous avez délégué cette responsabilité à une autre personne, qui elle avait ses propres difficultés.»
- Un commissaire de la CLCC

Mais ces défauts, il ne les a plus, a-t-il attesté. «J’ai changé. J’ai travaillé sur moi.» Son avocate est du même avis, en faisant référence au refus de sa demande au printemps dernier. «Il aurait pu se décourager d’une telle décision. Le travail qu’il fait sur lui, il ne le fait pas pour les autres, il le fait pour lui et pour cheminer véritablement. On constate qu’il est toujours dans un processus de réflexion et de cheminement.»

Le père de la fillette de Granby a soutenu que son parcours depuis les faits n’a pas été facile à vivre. Il aurait effectivement reçu des menaces de mort et subi de la violence dans le pénitencier. Mais pour lui, rien ne sera pire que les remords qui l’habitent. «Je sais que ma fille ne sera plus là, et je trouve ça beaucoup plus difficile que n’importe quelle chose que j’ai pu subir durant mon incarcération.»

«Il lui reste encore beaucoup de travail à faire» 

Rappelons que l’enfant de 7 ans est décédée en avril 2019 de suffocation après avoir et enduite de ruban adhésif. Son identité est protégée par un interdit de publication.

S'il devait être libéré, l'homme serait soumis à plusieurs conditions, comme une interdiction de communication avec plusieurs des victimes impliquées dans le dossier ainsi que les membres de sa famille immédiate. Il n’aurait également pas le droit d’être en présence d’enfants de moins de 16 ans, et il lui serait interdit de se trouver dans certaines régions déterminées par la CLCC.

«Il est toujours préférable de gérer le risque de façon graduel en permettant quelqu'un de passer par un milieu transitoire avant de se retrouver chez lui. Je m'attends davantage à ce que la Commission aille dans cette direction que le laisser en prison et qu'au deux tiers de sa sentence, il va se retrouver chez lui avec des conditions, mais sans qu'il y ait un retour graduel», a fait savoir l'avocate en droit carcéral, Me Sylvie Bordelais, en entrevue avec Noovo Info.

Si sa demande est refusée, en vertu de la loi, il serait à six mois de profiter d’une liberté d’office, qui permet aux délinquants d’être libérés aux deux tiers de leur peine.

«Au provincial, pour quelqu'un qui serait libéré au deux tiers de sa sentence, sa sentence est à ce moment-là terminée. [...] Mais, ce n'est pas le cas au fédéral. À ce niveau, la sentence se purge jusqu'au trois tiers donc, il y a des conditions qui sont en vigueur jusqu'au trois tiers de la sentence», a précisé Me Bordelais en entrevue avec Noovo Info.

Voyez le compte-rendu de Dominique Côté au bulletin Noovo Info Estrie:

En mai 2024, la CLCC n’aurait donc plus de «levier» autre que d’imposer des conditions spéciales à la sortie de l’homme. L’agente du SCC présente à l’audience a soutenu qu’une liberté d’office ne serait pas bénéfique pour le délinquant et la société, et qu’une maison de transition serait beaucoup mieux adaptée pour ses besoins.

La grand-mère paternelle de la fillette, soit la mère du détenu, a demandé à nouveau aux commissaires de refuser cette demande.

Selon elle, «il lui reste encore beaucoup de travail à faire.» Les comportements de son fils ne changeront jamais, a-t-elle lu devant la Commission. «Rien n’est jamais de sa faute, c’est toujours de la faute des autres. C’est immoral de faire ça à une enfant. Il a été un monstre. C’est la honte de penser que notre fils a pu agir aussi vilement avec sa fille. On ne sait pas comment il agira en sortant… Il est imprévisible», a-t-elle relaté.

La dame a d’ailleurs mentionné que la sécurité et la santé mentale d’elle-même et de la mère de la fillette seraient en péril si son fils était libéré. «Déjà, sa peine a été réduite, le minimum serait qu’il fasse son temps.»