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«Entrer au Canada ici est illégal. Vous serez arrêté et pourriez être renvoyé aux États-Unis», peut-on lire sur la pancarte.
Une dizaine de demandeurs d'asile ont rencontré samedi un obstacle imprévu lorsqu'ils ont constaté que le chemin Roxham n'était plus la porte d'entrée aussi simple qu'ils souhaitaient au Canada
L'accord annoncé vendredi entre Ottawa et Washington qui fera des 8900 kilomètres de leur frontière commune un passage officiel et qui conduira au refoulement des demandeurs d'asile qui la traversent notamment au chemin Roxham, au Québec, est entré en vigueur samedi.
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La nouvelle a surpris ces candidats au statut de réfugié descendus d'un autobus en provenance de Plattsburgh. Plusieurs l'ont apprise de représentants des médias qui les attendaient.
«Wow!», s'est exclamé un Colombien avec un regard incrédule. Il n'a pas donné son identité, mais il a dit en espagnol qu'il voyageait avec sa femme et son jeune fils. Quelques minutes plus tard, il s'approché de la journaliste de La Presse Canadienne pour lui demander si le chemin Roxham était vraiment fermé.
Jusqu'à vendredi, des files de taxis se stationnaient à l'arrêt d'autobus, prêts à transporter des clients vers le lieu de passage. Samedi, il n'en est venu qu'un seul.
Le chauffeur, qui a refusé de dire son nom, a transporté deux familles colombiennes vers la frontière. Il s'est contenté de hausser les épaules lorsqu'on lui a demandé s'il savait que ces passagers pouvaient être arrêtés une fois à destination.
La journée avait débuté bien calmement au passage frontalier du chemin Roxham, au Québec. Seuls quelques journalistes attendaient l'arrivée possible de nouveaux arrivants voulant traverser la frontière canado-américaine afin de demander un statut de réfugié.
Une nouvelle pancarte a été installée pour prévenir les nouveaux arrivants qu'il est dorénavant illégal de franchir la frontière à cet endroit.
«Entrer au Canada ici est illégal. Vous serez arrêté et pourriez être renvoyé aux États-Unis. Les demandeurs d'asile doivent faire leur demande dans le premier pays sûr où ils arrivent», peut-on lire.
Un élu de l'assemblée législative de l'État de New York a exprimé son inquiétude sur les conséquences de la nouvelle entente sur les citoyens américains.
«Ça devient un problème local, car on a un grand flot de gens venant ici, dit Billy Jones. Si on leur nie l'accès [au Canada], où iront-ils? Que feront-ils? D'un point de vue humanitaire, on ne veut pas que ces gens restent coincés à la frontière. Ils ne sont pas souvent préparés aux conditions que nous avons ici.»
La nouvelle entente sur les demandeurs d'asile entre le Canada et les États-Unis ne dissuadera pas les migrants de tenter d'entrer au Canada à l'extérieur des points d'entrée officiels, soutiennent toutefois des groupes de défense de l'immigration au Québec.
Restreindre l'accès à la frontière et empêcher les migrants d'accéder à un chemin sûr vers le pays ne fera qu'encourager certains individus, a déclaré Abdulla Daoud, directeur général du Centre de réfugiés basé à Montréal, vendredi.
«Ce type de prise de décision (?) dans le passé a mené à la création de nombreux réseaux de passeurs, a souligné M. Daoud en entrevue à La Presse Canadienne. Le Canada n'a jamais vraiment eu à composer avec cela, mais maintenant, je pense que nous allons voir les chiffres augmenter parce que ces individus mal intentionnés ne vont pas disparaître.»
L'accord a été décrit dans des documents américains comme un «ajout» au traité de 2004 connu sous le nom d'Entente sur les tiers pays sûrs. Ce traité empêche les gens au Canada ou aux États-Unis de traverser la frontière et de présenter une demande de statut de réfugié dans l'un ou l'autre pays, mais jusqu'à maintenant, il ne couvrait que les points d'entrée officiels.
Eva Gracia-Turgeon, directrice générale de Foyer du Monde, un organisme qui héberge temporairement des demandeurs d'asile et des migrants à Montréal, a déclaré qu'il est possible que des réfugiés potentiels qui sont déterminés à entrer au Canada finissent par mourir en empruntant des routes dangereuses pour entrer au pays.
«Il est très possible que les gens essaient de traverser en utilisant des endroits plus cachés et se retrouver coincés dans les bois pendant des jours et même y perdre la vie», a déclaré Mme Gracia-Turgeon en entrevue.
«Nous parlons également ici de familles, de femmes enceintes et de jeunes enfants qui vont traverser la frontière. Il y aura donc potentiellement plus de drame à la frontière», se désole Mme Gracia-Turgeon.
Au moins un demandeur d'asile était prêt à franchir illégalement la frontière. Un homme s'identifiant comme Herman est arrivé vendredi à New York en provenance du Congo où il a laissé sa femme et ses quatre enfants. L'individu espère rejoindre des proches vivant actuellement à Ottawa. Parlant en français, il a dit ne pas avoir d'autres choix que d'aller de l'avant avec son plan.
«Elle me manque, a-t-il lancé en parlant de sa famille. Les conditions de vie sont terribles là-bas.»