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Société
Chronique |

Nos ados avalés par les écrans

Il est utopique de penser que l'on peut, en tant que parents, contrôler ce que nos enfants regardent.

Savez-vous ce que vos enfants regardent en ligne? À qui parlent-ils? Sur quelle plate-forme? À quels jeux vidéo jouent-ils? Sur quels réseaux sociaux sont-ils présents ? Connaissez-vous leur temps d’écran ?

C’est le Far West. C’est encore et toujours le Far West. Les adolescents ont accès à toutes sortes de contenus, en tout temps, au bout de leurs doigts.

On aura beau resserrer les paramètres de sécurité, mettre des balises, instaurer des règles à la maison, il est utopique de penser que l'on peut, en tant que parents, contrôler ce que nos enfants regardent.

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La vaste majorité d’entre eux ont un téléphone cellulaire dès leur entrée au secondaire. Sous le prétexte qu’on veut être en mesure de les joindre et de savoir où ils se trouvent (et dans certains cas, les géolocaliser), les parents fournissent tôt un appareil et des données pour se connecter.

 

Si le téléphone cellulaire et l’accès à internet nous ont ouvert les portes sur le monde, les réseaux sociaux nous enferment dans notre bulle, une bulle qui prend la forme d’une chambre d’écho, hermétique, vide, une spirale dans laquelle les jeunes (comme les moins jeunes) s’enlisent.

Nos enfants ne se parlent plus : ils fuient la gêne de faire le premier pas, d’oser, d’aller à la rencontre de l’autre et de s’ouvrir en se réfugiant dans leur écran.

Ils se font avaler. Et nous constatons maintenant les dégâts de cet isolement, de cette solitude, de cet égarement des jeunes.

Série Adolescence

Des adolescents qui sortent moins, se fréquentent moins, ont des relations amoureuses et sexuelles plus tardivement, plus rarement.

Des jeunes qui ne développement pas leur muscle social, en « présentiel », dans le moment présent, comme si le risque de se frotter à l’autre, d’échanger, et peut-être de discuter et de confronter était trop grand, comme s’il ne valait pas la peine.

Des jeunes qui ne lisent plus, enlisés dans une paresse intellectuelle débilitante. Ils consomment, ils scrollent, ils chattent, ils absorbent. Mais que nourrissent-ils à part un appétit pour la dopamine ressentie par le nombre de vus et de likes (et les géants technologiques derrière, bien sûr) ? Prennent-ils du recul ?

Des jeunes qui épousent des concepts, des théories, des mouvements vus et appris sur les réseaux sociaux, comme dans l’excellente et troublante série britannique Adolescence qui cartonne sur Netflix depuis deux semaines. L’éducation ne se fait plus qu’à l’école et à la maison — elle se fait en grande partie sur les médias sociaux, loin de tout contrôle, échanges, critiques, questionnements.

Aveuglement

De là mes questions de départ : savez-vous ce que vos enfants regardent en ligne ? Qui suivent-ils ? Et pourquoi ?

Je crains qu’on ne soit en train d’échapper quelque chose, quelque chose de grave, en ce moment. On erre en croyant que les adolescents vont s’autoréguler, qu’ils sont nés avec ces outils et donc, qu’ils les maîtrisent.

Je crains que dans dix, quinze ans, on jette un regard extrêmement critique sur notre époque, comme on juge maintenant l’époque où on fumait dans les voitures, avec des enfants à bord. Inimaginable aujourd’hui, n’est-ce pas ?

Le parallèle n’est pas si boiteux. Sans règle, sans politique, sans code de conduite clair, nous naviguons à tâtons. C’est comme s’il n’y avait pas de consensus dans notre société, même si scientifiquement, les ravages des écrans sont démontrés.

Perte d’estime de soi, problèmes d’identité et de perception corporelle, symptômes dépressifs, désengagement, démotivation scolaire, isolement, retards cognitifs, sédentarité et troubles du sommeil… La liste des impacts négatifs sur la santé mentale et physique des jeunes est sans fin.

Et la commission?

Au Québec, le rapport de la Commission spéciale sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes devrait être déposé d’ici un mois. Sera-t-il assorti de recommandations cohérentes, réalistes, applicables?

Le rapport sera-t-il tabletté, encore une fois? On peut se poser la question lorsque l’on voit ce qui est advenu du travail colossal fait par Régine Laurent dans le cadre de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse…

À VOIR AUSSI | Un début de constat pour la Commission spéciale sur l'impact des écrans sur les jeunes

L’enjeu n’était-il pas crucial? Qu’avons-nous réglé depuis?

Dans le cas des écrans, je me demande vraiment à quel moment nous ouvrirons la discussion. Que faudra-t-il pour vraiment amorcer une réflexion sociétale sur cet enjeu?

Que faudra-t-il pour intervenir?

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