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Le commissaire aux langues officielles a reçu un total de 1788 plaintes, dont la majorité portait sur les communications avec le public et la prestation des services, selon le rapport annuel diffusé mardi.
Le commissaire aux langues officielles a reçu un total de 1788 plaintes, dont la majorité portait sur les communications avec le public et la prestation des services, selon le rapport annuel diffusé mardi. C'est le transporteur Air Canada qui traine au sommet des plaintes pour la période 2022-2023.
Parmi les 810 plaintes en matière de communications avec le public et la prestation des services, le Commissariat aux langues officielles a reçu 497 plaintes de voyageurs.
Air Canada a reçu le plus grand nombre de plaintes de toutes les institutions fédérales. On parle de 276 plaintes reçues, un sommet historique en 10 ans, selon le rapport.
«C'est frustrant, a lâché mardi M. Théberge lors d'une conférence de presse à Ottawa. J'oserais croire que depuis 1988 qu'Air Canada a été privatisé qu'ils seraient mieux en mesure de répondre à leurs obligations.»
En réaction, Air Canada affirme prendre connaissance du rapport et demeure ouverte pour améliorer ses pratiques.
«Nous relevons ce défi depuis plus de 50 ans, dans une industrie aux règles complexes, tout en servant nos clients en plus de 20 langues dans 51 pays en plus du Canada. Bien que nous prenons très au sérieux chaque plainte il est important de noter que pour l'année visée par le rapport, Air Canada a transporté 40 millions de passagers qui ont en moyenne 4-5 interactions avec nous», a soutenu la compagnie aérienne dans un courriel à Noovo Info.
Voyez le récapitulatif de Louis-Philippe Bourdeau au bulletin Noovo Le Fil 17 dans la vidéo qui accompagne ce texte.
Aussi, il y a eu un total de 714 plaintes portant sur les exigences linguistiques des postes. Sinon, 207 plaintes portaient sur la langue de travail, 10 portaient sur la participation équitable, 44 portaient sur la promotion du français et de l’anglais et seulement 3 portaient sur les autres parties de la Loi sur les langues officielles.
«Il est crucial de redonner à nos langues officielles le caractère prioritaire et l’importance distincte qu’elles méritent, et ce, de façon durable. Ce devoir, qui appartient en grande partie à nos leaders, est nécessaire pour concrétiser la vision d’un Canada où il est possible, là où la Loi s’applique, de voyager, d’obtenir des services, de travailler et de s’épanouir dans la langue officielle de son choix», a expliqué le commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge.
Dès la préface de son rapport 2022-2023, le commissaire affirme que «beaucoup reste à faire» pour concrétiser le projet d'un pays où tant les francophones que les anglophones puissent planifier leur visite dans un aéroport, se déplacer en avion, prendre le train ou traverser la frontière dans leur langue.
M. Théberge s'est cependant réjoui que le projet de loi C-13 qui modernise la Loi sur les langues officielles lui octroie de nouveaux pouvoirs s'il est adopté, notamment de rendre des ordonnances et d'imposer des amendes. C-13 a reçu l'appui de tous les députés aux communes et est en train d'être étudié par le Sénat.
«Présentement, les seuls outils qu'on a à notre disposition, c'est de faire des recommandations, et on se fie sur la bonne volonté des institutions fédérales pour faire la mise en œuvre de ces recommandations. Donc ces nouveaux pouvoirs sont beaucoup plus contraignants», a-t-il dit.
Questionné à savoir si les amendes, allant jusqu'à 25 000 $, ont le potentiel de secouer les colonnes du temple d'Air Canada, M. Théberge s'est montré «réaliste».
«Je ne pense pas qu'une amende de 25 000 $ va faire trembler, a-t-il admis. Ce qui est intéressant est que dans ce qui est proposé le gouverneur en conseil peut toujours revoir les montants. C'est aussi pour chaque plainte.»
Son bureau entend publiciser les amendes et croit que cela pourrait avoir un impact bien plus dissuasif que les amendes elles-mêmes.
Le commissaire a émis ainsi quelques recommandations pour améliorer l'application de la Loi sur les langues officielles. Il recommande entre autres à la présidente du Conseil du Trésor et au ministre des Transports d’élaborer des outils et des lignes directrices concernant les obligations linguistiques des administrations aéroportuaires et de les communiquer aux administrations aéroportuaires d’ici le 31 mars 2024. Il demande au ministre des Transports d’exiger des administrations aéroportuaires qu’elles soumettent un plan sur la façon dont elles s’acquitteront de leurs obligations linguistiques envers le public d’ici le 30 juin 2025.
Le commissaire recommande à la présidente du Conseil du Trésor, à la ministre des Langues officielles et à la greffière du Conseil privé de travailler de concert, d’ici la fin de juin 2025, pour définir, dans un plan d’action, des moyens concrets de mettre en évidence la place des langues officielles au sein de la fonction publique fédérale et de mesurer la capacité réelle des fonctionnaires fédéraux à travailler dans la langue officielle de leur choix dans les régions désignées bilingues aux fins de la langue de travail.
Le commissaire recommande à la présidente du Conseil du Trésor de mettre en œuvre son plan d’action triennal visant à assurer la conformité des institutions fédérales à l’article 91 de la Loi sur les langues officielles d’ici juin 2025 au plus tard.
Dans le foyer de la Chambre des communes, la ministre des Langues officielles, Ginette Petitpas Taylor, a indiqué qu'elle «accepte» les recommandations contenues dans le rapport.
La ministre a insisté pour dire que son projet de loi a `du mordant' et qu'il est accompagné d'un plan d'action qui prévoit des `investissements historiques' de 4,1 milliards $ pour protéger et promouvoir le français et l'anglais au pays.
«Le commissaire nous a demandé pour plus d'outils et nous avons livré la marchandise. (...) Avec notre projet de loi, on veut qu'il y ait un changement de comportement. C'est exactement qu'est-ce qu'on pense qui va arriver.»
Quant aux amendes maximales de 25 000 $, le député libéral de la Nouvelle-Écosse Darrell Samson a expliqué que «ce n'est pas autant l'argent» qui fera monter «le stress» d'Air Canada, mais bien d'être montrée du doigt.
Le ministre fédéral des Transports, Omar Alghabra, a également été questionné en mêlée de presse à savoir s'il s'engage à respecter les deux recommandations qui le concernent et qu'Air Canada doit faire `plus d'efforts' pour respecter ses obligations.
«Le rapport vient d'être publié, a-t-il dit. Je ne l'ai pas lu. (...) En principe, je suis déterminé et notre gouvernement s'engage à faire tout ce qui est en son pouvoir pour améliorer la culture qui nourrit et permet aux Canadiens de recevoir les services dans la langue de leur choix.»
Au cabinet du porte-parole conservateur en matière de Langues officielles, Joël Godin, on indique sentir le souhait du commissaire de corriger la situation. On ajoute du même souffle constater qu'«il ne dispose pas des outils nécessaires» et que C-13 lui en fournit «très peu» afin de renverser le déclin du français au pays.
À son arrivée à la période des questions, le député bloquiste Alexis Brunelle-Duceppe a ironisé que le nom d'Air Canada devrait plutôt être prononcé à l'anglaise.
Quelques instants plus tard, son collègue porte-parole en matière de Langues officielles, Mario Beaulieu, a jugé qu'Air Canada a un «problème de culture d'entreprise» qui est «inacceptable».
«Ce que ça prend, je pense, c'est vraiment une mobilisation. Ça n'a aucun sens. Alors, il faut que ça arrête. Au Québec, on ne peut pas continuer à reculer», a-t-il ajouté.
La porte-parole du Nouveau Parti démocratique (NPD) en matière de Langues officielles, Niki Ashton, s'est dite `préoccupée' par le niveau `inacceptable' de plaintes envers Air Canada.
«On espère que la Loi sur les langues officielles devienne réalité aussitôt que possible pour donner les outils au gouvernement fédéral à pouvoir rendre (redevables) les compagnies comme Air Canada», a-t-elle déclaré.
Le projet de loi C-13 a reçu l'appui de la quasi-totalité des députés aux Communes et est en train d'être étudié par le Sénat.
Avec les informations de Louis-Philippe Bourdeau pour Noovo Info et La Presse canadienne