Début du contenu principal.
Le ministre de l'Immigration affirme que les Mexicains représentaient 17 % de tous les demandeurs d’asile en 2023 et que la plupart de leurs demandes sont soit rejetées, soit retirées par les demandeurs.
Le Canada rétablira dans la nuit de jeudi à vendredi l'obligation de visa pour les ressortissants mexicains en raison de l'augmentation des demandes d'asile ces dernières années, décision dénoncée par le Mexique qui évoque de possibles mesures de réciprocité.
Le ministre fédéral de l'Immigration, Marc Miller, a principalement expliqué les changements annoncés en affirmant que les Mexicains représentaient 17 % de tous les demandeurs d’asile en 2023 et que la plupart de leurs demandes sont soit rejetées, soit retirées par les demandeurs.
Voyez le reportage de Louis-Philippe Bourdeau sur ce sujet dans la vidéo.
Selon ses dires, le taux d'acceptation des demandes d'asile de Mexicains se situe «dans les 30 %, 40 %», alors qu'il est de «80 %, 90 %» pour celles faites pas des Colombiens.
Ces pourcentages ne tiennent pas compte des nombreuses demandes en cours de traitement, selon les données de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada accessibles en ligne auxquelles l'équipe de M. Miller a renvoyé les médias.
Réagissant par communiqué à la décision d'Ottawa, le gouvernement mexicain d'Andrés Manuel López Obrador a signalé qu'il «se réserve évidemment l'autorité d'agir en réciprocité».
«Le Mexique déplore cette décision et considère qu'il existe d'autres options avant d'arriver à l'application de cette mesure», peut-on lire dans le communiqué en espagnol.
Le ministre Miller a précisé qu'il y aura des exemptions pour les citoyens mexicains ayant détenu un visa pour le Canada au cours des dix dernières années ou ayant séjourné aux États-Unis sur la même période avec un visa américain de non-immigrant. Ces personnes devront demander une autorisation de voyage électronique.
Selon le Canada, les exemptions signifient que la plupart des personnes venant du Mexique pourront voyager sans visa, car beaucoup d'entre elles ont déjà un visa américain.
Appelé à dire s'il anticipe des répercussions économiques pour le Canada vu le mécontentement du Mexique, M. Miller est demeuré vague. Il a répondu ne pas avoir eu d'«indication» au sujet de «mesures commerciales qui seraient mises en vigueur» lorsqu'il s'est entretenu avec la ministre mexicaine des Affaires étrangères, Alicia Bárcena Ibarra.
«Ce sont des relations qui se sont améliorées depuis la dernière décennie et je pense que c’est dans notre intérêt commun de ne pas les endommager, mais c’est clair qu’ils sont mécontents et ils ont une gamme de choix à faire dans les jours et les mois à venir.»
La ministre canadienne des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a quant à elle fait valoir que le Mexique a obtenu des «gains pour (son) système d'immigration» au niveau du Programme des travailleurs agricoles saisonniers (PTAS).
Dans le communiqué de son annonce, Ottawa se dit «prêt à collaborer avec le Mexique pour tirer parti de ce programme, grâce à la modernisation d'un nouvel accord bilatéral relatif au PTAS, afin d'offrir aux travailleurs mexicains de nouvelles possibilités».
«Il y avait nécessairement une demande de la part du gouvernement mexicain depuis longtemps pour qu'on élargisse (ce) fameux programme», a dit Mme Joly
M. Miller n'a pas voulu offrir d'éclaircissement définitif à savoir si l'obligation de visa est une mesure permanente. Il a toutefois envoyé le message que bien des critères doivent être remplis avant qu'Ottawa révise sa décision.
«Ça prendrait vraiment un déclin significatif (du volume) et des mesures au Mexique pour enrayer d'autres facteurs qui font en sorte que les gens viennent ici parfois de façon illicite», a-t-il résumé.
Le gouvernement du Québec, qui faisait pression pour un retour d'exigences pour les visiteurs mexicains, lesquelles avaient été retirées par Ottawa en 2016, se réjouissait déjà mercredi, quand l'annonce du Canada a fait l'objet de fuites dans plusieurs médias.
La ministre québécoise de l'Immigration, Christine Fréchette, a qualifié le changement d'«étape importante», qui démontre que la province a réussi à se faire entendre.
Questionné à ce sujet, M. Miller a soutenu que «c'est clair» que les discussions avec le Québec, «qui, avec l'Ontario, est la (province) plus achalandée en termes de demandeurs d'asile», «ça joue un rôle très important».
Or, il a affirmé que d'autres facteurs ont orienté la décision, comme des pressions faites en privé par le gouvernement ontarien de Doug Ford et des discussions avec les Américains.
«On sait que de plus en plus, il y a beaucoup de ressortissants qui viennent au Canada et ensuite qui se dirigent vers les États-Unis», a dit le ministre. Il a relevé que la proportion d'arrivées en sol américain par le Nord est minime par rapport à celle des ressortissants entrant aux États-Unis par le Sud. Néanmoins, il a parlé d'un «flux significatif qui s'est accru de façon substantielle depuis la dernière année» et qui a été pris en considération.
Si le Québec salue l'annonce, le premier ministre François Legault a encore rappelé jeudi qu'il demande une répartition interprovinciale des demandeurs d'asile arrivant au Canada qui lui convient mieux.
«Il va falloir une réaction beaucoup plus grande et je vais rencontrer M. Trudeau dans les prochaines semaines. (...) Le Québec ne peut pas avoir puis donner des services à tout ce monde-là», a-t-il soutenu en mêlée de presse au cours d'un passage à Morin-Heights, dans les Laurentides.
Actuellement, la province calcule qu'elle accueille 55 % des demandeurs d'asile qui arrivent au pays. Mais le gouvernement fédéral nuance que le quart d'entre eux quittent le Québec.