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«C’est au Québec, et au Québec seul, de déterminer ses seuils d’immigration», a rappelé la ministre de l'Immigration Christine Fréchette.
Le premier ministre Justin Trudeau semble «insensible» aux besoins spécifiques du Québec en matière d'immigration et à sa position particulière au sein du Canada, selon la ministre de l'Immigration du Québec, Christine Fréchette.
Mme Fréchette n'a pas tardé à réagir, mardi, aux propos tenus par M. Trudeau en entrevue à La Presse Canadienne, en déclarant que le Québec devrait examiner la possibilité d'accueillir jusqu'à 112 000 immigrants par année, et essentiellement des francophones. Le Québec pourrait ainsi, selon lui, maintenir son poids politique au sein du Canada. Voilà à ses yeux «une réflexion» que le gouvernement du Québec «peut tout à fait entreprendre et devrait entreprendre».
Sauf que le gouvernement Legault, visiblement agacé par la sortie du premier ministre canadien, ne partage pas du tout cette vision des choses.
«C’est au Québec, et au Québec seul, de déterminer ses seuils d’immigration», a rappelé la ministre Fréchette, dans une déclaration écrite à La Presse canadienne visant à commenter les propos de M. Trudeau en ce domaine. Elle n’était pas disponible pour une entrevue mardi.
«Le Québec a un double défi, qui est unique au Canada: réduire la pénurie de main-d’œuvre, tout en freinant le déclin du français, ce à quoi M. Trudeau semble rester insensible», selon la ministre, qui rappelle que depuis une trentaine d’années, Québec et Ottawa ont convenu d’une entente qui octroie certains pouvoirs au gouvernement du Québec en matière d’immigration.
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Le gouvernement Legault n’a donc pas l’intention de revoir à la hausse sa cible pour 2023, soit d’accueillir un maximum de 50 000 immigrants permanents, donc moins de la moitié des 112 000 évoqués lors de l’entrevue avec M. Trudeau.
Au lieu de s’immiscer dans le débat sur les seuils d’immigration au Québec, M. Trudeau devrait plutôt «régler des problèmes concrets, comme de s’attaquer au taux de refus encore trop élevé d’étudiants africains francophones et indemniser le Québec pour les arrivées massives par le chemin Roxham», selon elle.
Le Québec souhaite désormais accueillir une immigration à 100 % francophone d’ici 2026, a dit récemment le premier ministre François Legault. Actuellement, la proportion se situe plutôt autour de 60 %. La ministre de l’Immigration a par la suite nuancé ses propos pour parler d’immigration francophone ou francotrope, donc formée de gens dont la langue serait compatible avec la langue française.
Le sujet de l’avenir du français au Québec sera à l’ordre du jour de la rencontre entre le premier ministre Legault et le premier ministre Trudeau vendredi à Montréal.
Dans les rangs de l’opposition à Québec, la sortie de M. Trudeau n’est pas davantage passée inaperçue.
La porte-parole de l’opposition officielle libérale en matière d’immigration, la députée Filomena Rotiroti, a réaffirmé elle aussi que «c’est au Québec de déterminer ses seuils d’immigration».
Mais les libéraux sont d’avis eux aussi que le gouvernement Legault devrait augmenter ses seuils d’immigration, «pour freiner la baisse de notre poids dans le Canada et contribuer à pallier les effets de la pénurie de main-d’œuvre». Ils croient que le Québec pourrait accueillir sans problème jusqu’à 70 000 immigrants par année.
Du côté de Québec solidaire, le porte-parole, le député Andrés Fontecilla, a rappelé lui aussi que «c’est aux Québécois de décider combien d’immigrants ils veulent accueillir, ce que l’on pourrait faire dans un Québec indépendant en fixant les cibles selon nos besoins et en s’assurant de favoriser l’immigration permanente. Au lieu de cela, le Québec est en train de perdre le contrôle de son immigration avec l’arrivée croissante de travailleurs temporaires, puisque c’est le gouvernement fédéral qui les admet. Ottawa doit considérer la réalité particulière du Québec et nous laisser sélectionner nous-mêmes les travailleurs temporaires pour le Québec», selon lui. Québec solidaire se dit prêt à accueillir de 60 000 à 80 000 immigrants par année.
Loin de prôner une augmentation des seuils, le Parti québécois (PQ) est plutôt d’avis qu’il faut les réduire pour assurer la pérennité du français au Québec. Le PQ croit que le Québec ne doit pas laisser entrer plus de 35 000 nouveaux immigrants par année.
Le chef du parti, Paul St-Pierre Plamondon, a réagi aux propos de M. Trudeau sur les réseaux sociaux pour estimer que «le gouvernement canadien fait le sourd face à la situation linguistique et démographique du Québec et cherche encore à lui imposer sa vision trudeauiste de l’immigration».
Il demande donc au premier ministre Legault de s’affirmer, se questionnant à savoir si le gouvernement du Québec allait tenir «son référendum sur le rapatriement des pleins pouvoirs en immigration».
En vertu de l’entente conclue avec Ottawa, le Québec peut sélectionner les immigrants entrant dans la catégorie de l’immigration économique, soit environ 65 % de son immigration totale. Le gouvernement fédéral gère les cas de réunifications familiales, les réfugiés et les travailleurs temporaires.