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«Je vis une angoisse grandissante à l’approche de cette date fatidique. Je ne vois pas d’issue», déplore une victime d'acte criminel.
À l'aube du 14 octobre, de nombreuses victimes d'actes criminels se sentent désemparées face à la fin, dans certains cas, de leurs prestations de remplacement de revenu en raison de la réforme du gouvernement caquiste. Celle-ci réduira considérablement les délais des indemnisations, ce qui pourrait plonger des victimes dans de grandes difficultés financières.
La Coalition avenir Québec a adopté en 2021 une réforme de l'indemnisation des victimes d'actes criminels (IVAC), qui a entre autres annulé la liste d'infractions admissibles pour que désormais toutes les infractions contre la personne inscrites au Code criminel soient couvertes.
Or, la nouvelle loi, la Loi visant à aider les personnes victimes d'infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement (LAPVIC) a également introduit un délai maximal de trois ans pour la prestation palliant une perte de revenu. La loi antérieure ne prévoyait aucun délai.
En conférence de presse à Montréal dimanche, le sénateur Pierre-Hugues Boisvenu, les avocats Sophie Mongeon et Marc Bellemare, et Émilie Arsenault, dont les deux enfants ont été assassinés il y a quatre ans à Wendake , ont dénoncé à nouveau ce délai, qu'ils qualifient d'arbitraire et de «recul historique». Ils demandent au gouvernement du Québec de revenir sur sa position.
Émilie Arsenault a reçu une lettre de l'IVAC lui confirmant que ses prestations prendront fin en octobre prochain. Elle affirme que la réforme de l'IVAC fera d'elle une victime pour une deuxième fois.
«Je vis une angoisse grandissante à l’approche de cette date fatidique. Je ne vois pas d’issue», déplore-t-elle.
L'Association des familles de personnes assassinées ou disparues, qui vient en aide aux victimes d’actes criminels, estime que c'est toute la mission de l'organisme qui tombe à l'eau avec l'entrée en vigueur de ce délai. L'organisme considère ce changement comme un processus de revictimisation pour ses membres et confirme le sentiment d'abandon et d'impuissance qui règne depuis l'annonce du gouvernement caquiste.
«Ce délai maximal de 3 ans est inacceptable. Personne ne peut prédire la durée de l’invalidité au moment où l’acte criminel survient. Il appartient aux thérapeutes de décider, pas au gouvernement», martèle le sénateur Pierre-Hugues Boisvenu.
Les autres lois d’indemnisation, CNESST et SAAQ prévoient de pleines prestations de remplacement de revenu pouvant aller jusqu’à l'âge de 65 ans, selon des durées d’invalidité applicables à chacun.
L’avocat et ancien ministre Marc Bellemare exige que ce délai de l'IVAC soit retiré et qu'il se rapproche des prestations de la CNESST et de la SAAQ.
«Nous ce qu'on demande c'est de l'équité», indique-t-il en entrevue à Noovo Info.
«Cette loi est nettement discriminatoire. Elle jettera à la rue des centaines de victimes invalides. [...] Cette discrimination évidente face aux victimes de crimes contraste avec l’image pro-victime que tente de se donner le gouvernement Legault au fil des ans.», souligne Me Bellemare.
Il n'y a pas que les victimes qui vivent de la détresse face à cette réforme, les employés de l'IVAC en font également partie. Le nombre d'appels est très élevé en raison de ces changements, les employés croulent sous les dossiers en attente et se sentent impuissants face aux victimes qui se sentent désemparées au bout du fil.
Le président du syndicat qui représente les employés de l'IVAC, Guillaume Bouvrette, estime qu'on se retrouve dans un cercle vicieux.
«En 2022, les employés avaient environ 600 dossiers dans leur charge de travail et c'est passé à plus de 900 aujourd'hui. Alors il y a une augmentation de la charge en termes de quantité, mais il y a aussi une augmentation de la charge émotionnelle. Ça crée donc de la détresse chez le personnel», mentionne-t-il en entrevue à Noovo Info.
Dans une déclaration envoyée par courriel à Noovo Info, le cabinet du ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, rappelle que la réforme élargit l'accès à l'aide aux victimes. Il écrit aussi que «la réforme nécessitait des choix. Et ce sont ces choix qui nous permettent aujourd'hui d'indemniser deux fois plus de personnes victimes». Il précise aussi que «le régime de l'IVAC est un régime d'indemnisation et non un régime d'assurance comme celui de la SAAQ».
Avec les informations de La Presse canadienne.