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Le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador ont ainsi réglé un vieux contentieux de presque 60 ans.
Les Québécois paieront en moyenne 30 fois plus cher pour l’électricité du barrage terre-neuvien de Churchill Falls, au Labrador, pendant les 50 prochaines années, mais cela ne devrait pas avoir d’impact sur les tarifs.
Le premier ministre du Québec, François Legault, ainsi que son homologue de Terre-Neuve-et-Labrador, Andrew Furey, ont annoncé en grande pompe une nouvelle entente de principe à Saint-Jean, jeudi, qui devrait rapporter pas moins de «200 milliards $» à chacun des deux partenaires selon leurs calculs.
Voyez le compte-rendu de Jean-François Poudrier dans la vidéo ci-haut.
Le fédéral a même prêté assistance à la petite province pour qu'elle soit d'égale à égale avec le Québec dans ses négociations, a-t-on appris.
«Aujourd’hui, tout change pour Terre-Neuve-et-Labrador», a clamé M. Furey en conférence de presse, sous les applaudissements, dans une salle comble d'un centre culturel de Saint-Jean, où l'atmosphère était fébrile tant ce litige historique était encore une question douloureuse dans cette province.
«Aujourd’hui, avec Québec, nous commençons un nouveau chapitre», a-t-il ajouté, affirmant qu'il était temps de «déchirer» l'entente de 1969 – il l'a même déchirée littéralement lors de la période des questions.
En mettant fin ainsi au contrat dès 2025, Hydro paiera 9 milliards $ de plus jusqu'en 2041, en vertu de la nouvelle entente.
Hydro-Québec versera au total 33,8 milliards $ au consortium de Churchill Falls jusqu’à la fin de 2075, selon l’entente de principe.
Des «ajustements» pourraient être nécessaires après les négociations avec les communautés autochtones, a laissé entendre le président- directeur général d'Hydro-Québec, Michael Sabia, dans une conférence de presse à Montréal.
En échange, le Québec aura accès à 7200 MW additionnels pour combler ses besoins.
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Cet accord est «gagnant-gagnant», a insisté le premier ministre Legault, qui a salué celui qu'il a décrit comme son «ami», M. Furey, avec qui il prépare le projet depuis quatre ans.
«C'est vraiment une entente extraordinaire. Moi, ça fait six ans que je suis premier ministre du Québec, c'est de loin l'entente dont je suis le plus fier», s'est réjoui M. Legault en conférence de presse.
Comment le Québec aura-t-il accès à ces 7200 MW?
Par l’augmentation de la puissance de la centrale actuelle (550 MW), une deuxième centrale à Churchill Falls (1100 MW) et une centrale en aval du fleuve Churchill à Gull Island (2250 MW), des projets évalués au total à 25 milliards $, dont Hydro-Québec sera maître-d’œuvre. Une ligne de transmission devra raccorder Gull Island à La Romaine, donc il faudra l’assentiment des communautés autochtones.
«On va ouvrir le dialogue avec les communautés autochtones du Labrador et du Québec», a affirmé M. Sabia, en reconnaissant qu’il y a «beaucoup de frustration des Innus de la Côte-Nord. (…) Notre engagement est de les impliquer à chaque étape. S’il faut faire des ajustements, on va les faire».
M. Legault se dit très confiant d'en arriver à une entente avec les Innus, même si la communauté de Uashat mak Mani-utenam a déposé une requête en Cour supérieure en 2023 afin d'obtenir 2,2 milliards $ d'Hydro-Québec pour avoir «détruit» son territoire.
Ce sera le deuxième plus gros projet hydro-électrique en Amérique du Nord, après la Baie James. Son coût de production sera de 11 cents le kilowattheure (kWh), ce qui reste très concurrentiel, selon ce qu’a tenu à préciser M. Sabia.
Cette entente de principe vient régler un vieux contentieux avec la province voisine, qui s’estimait flouée par le contrat de 1969, selon lequel Hydro-Québec achète l’électricité à 0,2 cent le kWh, mais la revend ensuite à gros prix. Le prix passera graduellement à 6 cents le kWh, donc 30 fois plus.
François Legault a avancé que le gain de 200 milliards $ du Québec à long terme est fondé sur la différence entre un coût de revient de 6 cents le kWh et les coûts de revient des autres options possibles, soit la construction de nouveaux barrages au Québec ou d'autres sources d'énergie, des options estimées entre 12 et 16 cents le kWh.
Il a aussi soutenu que l'électricité supplémentaire de Terre-Neuve permettra de «créer entre 4000 et 8000 nouveaux emplois manufacturiers au Québec».
L’entente actuelle est non contraignante, donc il y a beaucoup de travail à faire pour arriver à une entente définitive, a indiqué M. Sabia.
«Est-ce que cette entente peut changer de façon importante? Selon nous, non.»
François Legault a laissé entendre qu'on «veut régler le plus rapidement possible».
Il a accepté de rouvrir le contrat qui était source de mécontentement de la province voisine, pour pouvoir garantir l’approvisionnement au-delà du contrat actuel dont l’échéance était en 2041. Il a laissé entendre que des entreprises se questionnaient à propos de cette garantie d'approvisionnement après 2041.
Pour sa part, M. Furey a confié qu'il a pu bénéficier de l'appui du gouvernement fédéral dans ses négociations, pour être dans une «position équivalente» à celle du Québec et non dans une «position de faiblesse» comme autrefois.
«C’est une entente assez bien balancée, a plaidé M. Sabia. Ça va créer une atmosphère de collaboration entre Terre-Neuve et nous-mêmes.»
Actuellement, la puissance de Churchill Falls est 5400 MW et elle fournit 15 % de l’électricité d’Hydro-Québec.
«Oui, 15 %, c’est important, mais ce n’est pas suffisant pour avoir un impact majeur sur nos tarifs», a assuré M. Sabia.
M. Legault a tenu a assurer que la hausse du tarif résidentiel restera plafonnée à 3 %.
Les deux premiers ministres ont assuré que le nouvel accord aurait un impact pendant des générations.
«Il faudrait que nos enfants disent: "vous avez fait une bonne job"», a conclu M. Legault.
«Dieu protège Terre-Neuve-et-Labrador», a pour sa part lancé M. Furey à la fin de son discours.