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«Une conséquence directe des droits de douane imposés par le président américain Donald Trump contre le Canada.»
Le Canada pourra difficilement éviter une récession si les États-Unis sont eux-mêmes frappés, selon le chef libéral Mark Carney.
«C'est très difficile pour le Canada d'éviter une récession s'il y en a une aux États-Unis», a tranché, lundi, l'ancien gouverneur des banques centrales du Canada et d'Angleterre lors d'un point de presse à Saanichton, en Colombie-Britannique.
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Dès le début de son discours, M. Carney, qui entame cette troisième semaine de campagne dans l'Ouest canadien, a commenté les mouvements «spectaculaires» des marchés boursiers.
Il s'agit «une conséquence directe des droits de douane imposés par le président américain Donald Trump contre le Canada, le Mexique et désormais au monde entier», a-t-il résumé.
«Je ne vais pas édulcorer la situation. Des jours difficiles pourraient s'annoncer pour les Canadiens, mais je tiens également à rassurer: nous sommes prêts.»
Le chef libéral a ensuite vanté son expérience et les mesures que le gouvernement fédéral prend pour aider les Canadiens qui en arrachent.
Les grands indices américains continuaient à afficher des pertes importantes, en fin de matinée. Les pertes de lundi font suite aux fortes baisses enregistrées jeudi et vendredi, après l’annonce par M. Trump d’une vaste série de droits de douane à l’échelle mondiale mercredi soir, alimentant les craintes d’une récession imminente.
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Le président Trump a qualifié les reculs boursiers résultant de ses droits de douane de «remède» nécessaire qui s’inscrivent dans un plan à plus long terme visant à rapatrier la production et les usines aux États-Unis.
M. Carney a entamé dimanche après-midi, à Victoria, sa tournée dans l'Ouest canadien où les libéraux sont à l'offensive dans l'espoir de ravir des sièges aux néo-démocrates.
Appelé à préciser quel est le cœur de son message à ceux qui ont voté en faveur du Nouveau Parti démocratique (NPD), M. Carney est revenu sur le thème qui lui sourit dans les intentions de vote. «Le grand danger, c'est la lutte contre les menaces américaines: qui va représenter le Canada à la table», a-t-il envoyé.
Le vote néo-démocrate est en train de s'effondrer et bascule dans le camp libéral dans cette province située entre l'océan Pacifique et les montagnes Rocheuses.
La vague est si puissante que des 13 circonscriptions que détenait le NPD à la dissolution de la Chambre, il n'en resterait qu'une selon le site de projections électorales Canada338. Même le chef néo-démocrate, Jagmeet Singh, est en danger dans sa circonscription de Burnaby Central.
À l'inverse, les libéraux bondiraient de 15 à 22 circonscriptions. Les conservateurs en gagneraient six, pour atteindre 20 circonscriptions.
Quant à la cocheffe du Parti vert du Canada, Elizabeth May, la projection serait qu'elle perdrait sa lutte à trois avec le Parti libéral et le Parti conservateur dans Saanich—Gulf Islands.
«Il n'y a qu'une poignée de champs de bataille (électoraux) au pays, et la Colombie-Britannique en est certainement un», a insisté Stewart Prest, un politologue à l'Université de la Colombie-Britannique (UBC), en entrevue avec La Presse Canadienne.
Les sièges qui s'y trouvent, notamment dans les Basse-terres continentales (la région métropolitaine de Vancouver), seront «cruciaux» aux libéraux s'ils veulent former une minorité très forte ou même un gouvernement majoritaire, a-t-il insisté.
Dans cette province où les bassins progressistes sont nombreux, il fait la «promesse» de ne «jamais» couper dans les programmes sociaux, y compris celui de soins dentaires et l'assurance médicaments.
Or, le NPD qui l'écoutait attentivement, n'en croit pas un mot. L'affirmation du chef libéral est «en contraction» avec ses engagements à dépenser moins et équilibrer le budget de fonctionnement d'ici trois ans, prétend-on.
Et dans cette région où on est un peu plus «grano», M. Carney a choisi de rencontrer les médias dans un vignoble et d'y faire une annonce en matière d'environnement et de protection de la nature.
Comment convaincre d'élire un homme qui veut construire un corridor énergétique, soit notamment des pipelines, s'est fait demander l'ancienne ministre de l'Environnement, Catherine McKenna, qui participait la veille à un rassemblement.
«Je ne supporterais pas Mark Carney s'il n'avait pas à cœur les changements climatiques», a-t-elle répondu du tac au tac.
Et au chapitre des promesses, le chef libéral s'engage également à mettre en place des mesures pour protéger l'épargne des aînés en ces temps d'incertitude économique en réduisant de 25 % le montant minimum devant être retiré d’un Fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) pendant un an.
Les libéraux comptent aussi augmenter de 5 % le Supplément de revenu garanti pendant une année, ce qui permettrait aux aînés à faible revenu de retirer jusqu'à 652 $, non imposable.
Après son point de presse dans la capitale britanno-colombienne, M. Carney est allé rencontrer le premier ministre de la province, David Eby, un néo-démocrate qui a déjà donné son soutien au chef du NPD, Jagmeet Singh.
M. Carney s'est ensuite rendu à Richmond, en banlieue de Vancouver, pour un rassemblement en soirée auquel ont assisté près de 2000 personnes.
C'est la première fois de la campagne que les libéraux mettent le cap à l'ouest de Winnipeg.
Pendant chacune des deux premières semaines, Mark Carney est revenu à Ottawa pour revêtir ses habits de premier ministre face aux assauts tarifaires de l'administration Trump.
À en croire la progression des intentions de vote, le président américain met carrément du mazout dans l'avion libéral à mesure qu'il fait des déclarations sur les droits de douane.
Depuis qu'il a pris le chemin de la campagne, M. Carney met l'accent sur la réponse canadienne. L'enjeu «dépasse la partisanerie», insiste-t-on dans son entourage.
Pour le professeur Prest, le défi des libéraux en est un «cadrage», soit les aspects qui seront mis en évidence ou atténués afin d'influencer la façon de penser du public.
Les libéraux sont perçus comme les défenseurs indéfectibles du pays lorsque l'accent est mis sur la menace d'instabilité, de difficultés économiques liées aux tarifs douaniers, et à la souveraineté canadienne, a-t-il noté.
À l'inverse, ce sont les conservateurs qui sont avantagés lorsque c'est plutôt les enjeux de l'accessibilité financière et du sentiment qu'une partie de la population, en particulier les jeunes électeurs, est laissée pour compte.
Le professeur a expliqué qu'ils doivent donc trouver des moyens de faire comprendre aux électeurs qu’ils feront tout pour défendre le pays, mais également qu'ils n’ont pas perdu de vue ce segment de la population et ses enjeux, sans toutefois en faire un aspect central de l’élection.