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Opinion |

Yara El-Soueidi | Les propos frappants d'une ex-escorte pendant le Grand Prix de F1

Avez-vous pris le temps de vous promener sur les rues Saint-Laurent ou Sainte-Catherine récemment?

Avez-vous pris le temps de vous promener sur les rues Saint-Laurent ou Sainte-Catherine récemment?

Non?

Laissez-moi vous décrire la frénésie des derniers jours: il y a Mural qui bat son plein présentement, de même que les Francofolies. Les terrasses sont de nouveau bien en place, le beau temps est malgré tout au rendez-vous, les touristes sont de retour… Bref, Montréal revit.

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Et à travers cette résurrection presque divine, il y a la Formule 1 de Montréal. L’événement que je n’ai pas besoin de présenter et qui attire des touristes souvent très riches, d’âge moyen et qui vont dépenser leur argent en restaurants trop chers, en souvenirs ringards, en cocktails de piètre qualité et, évidemment en prostitution qui devient très souvent le centre des discussions lors de cette semaine.

Cette année, le message du Comité Un trop grand prix, comité constitué de la Concertation des luttes contre l’exploitation sexuelle (CLES), de Prévention jeunesse Laval, Prévention jeunesse Longueuil et du Y des femmes de Montréal, est simple. La campagne est presque partout d’ailleurs.

Payer pour du sexe est illégal au Canada. Avec l’afflux de touristes qui profiteront des services sexuels tarifiés, l’organisme dit qu’il est important de rappeler que se procurer ces services sexuels a des conséquences sévères. Dans un communiqué de presse, Jennie-Laure Sully, organisatrice communautaire à la CLES, explique les raisons du message.

Je cite: «Il nous semblait particulièrement important de s’adresser aux touristes sexuels et autres clients de la prostitution qui voient dans le Grand Prix une occasion d’acheter des actes sexuels. Il s’agit de leur passer le message que payer pour du sexe est illégal au Canada.»

C’est vrai. Après 2 ans de pandémie, le retour de la F1 inquiète les autorités, les organismes qui luttent contre l’exploitation sexuelle, les experts, bref, tout le monde ou presque qui vit à Montréal. L’événement qui est censé marquer le début de l’été et le côté fêtard de la ville finit par être un événement fortement abandonné par les locaux pour ce qu’il symbolise.

Je suis très ouverte sur le fait que je n’aime pas du tout la F1, le bling-bling, toute cette exubérance qui s’affiche dans une ville qui a besoin d’un peu d’amour. Le tourisme sexuel autour de l’événement m’inspire un sentiment fort de frustration. Mais cette semaine, j’ai pris le temps de lire dans Nouvelles Intimes, une infolettre qui parle du travail du sexe, un texte de Mélodie Nelsonsur la couverture du tourisme sexuel durant cette période.

Cet article m’a tout d’abord frappé. Peut-être parce que c’était la première fois que je lisais l’opinion d’une ex-escorte qui avait vécu la F1. Et peut-être que Nelson a raison. Peut-être qu’il y a une majorité d’escortes qui, elles, sont consentantes durant cette période-là.

Des escortes qui ont fait ce choix et pour qui la F1 est une période importante en matière de travail et de revenu. Des escortes qui ne sont pas des victimes de proxénétisme, d’exploitation sexuelle et qui savent ce qu’elles font. Je sais que la prostitution n’est pas légale au Canada et que Montréal est reconnue pour son tourisme dit «sexuel» durant cette période, mais sommes-nous vraiment au fait du choix de certaines? Devons-nous nécessairement diaboliser toute personne qui décide de faire affaire avec une escorte durant la F1, surtout si celle-ci est consentante?

Si énergie il y a à mettre quelque part, c’est vraiment au niveau du trafic d’adolescent.es durant la période de l’événement. Mettons nos efforts au niveau de l’exploitation de femmes vulnérables plutôt que de cibler les touristes. Allons à la source du problème. Car le problème n’est pas nécessairement de payer pour un service fait entre adultes consentants, mais plutôt de solliciter les services d’une adolescente ou d’une femme prise dans une situation vulnérable, et ça, on s’y attaque déjà en amont plutôt que durant l’événement.

Parce que oui, la F1 est peut-être l’étalement de l’exubérance des nouveaux riches, mais c’est aussi une période faste pour plusieurs femmes qui sont escortes par choix. Et peut-être qu’il faudrait se concentrer sur la véritable exploitation sexuelle plutôt que d’humilier celles et ceux qui sont consentants cette fin de semaine.