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Le gouffre s’élargit entre Ottawa et Québec sur la question des seuils d’immigration.
Le gouffre s’élargit entre Ottawa et Québec sur la question des seuils d’immigration.
Réunis par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le ministre responsable de la Langue française et responsable des Relations canadiennes, Jean-François Roberge, et son homologue fédérale responsable des Langues officielles, Ginette Petitpas Taylor, ont tenu des discours diamétralement opposés sur le nombre d’immigrants que le Canada doit accueillir.
Voyez le reportage d'Étienne Fortin-Gauthier sur ce sujet dans la vidéo de cet article.
Ce différend, abordé en mêlée de presse à la suite de leur conférence avec le président de la Chambre, Michel Leblanc, faisait contraste avec la bonne entente affichée par les deux ministres sur la question de la langue.
Mme Petitpas Taylor a bien cherché à dégonfler le ballon de 100 millions d’habitants au Canada d’ici 2100, surnommé l’Initiative du siècle et avancé en 2016 par un comité formé par le ministre des Finances de l’époque, Bill Morneau, affirmant que «ce n’est pas une politique officielle» de son gouvernement. Elle a cependant évoqué la «perte démographique», le vieillissement de la population et la pénurie de main-d’œuvre qui a un impact important sur l’économie comme autant d’éléments à l’appui de la volonté fédérale d’«augmenter les cibles» en matière d’immigration.
La volonté d’ouvrir les portes du Canada à 500 000 immigrants par année d’ici 2025, plus officielle celle-là parce qu’annoncée par le premier ministre Justin Trudeau lui-même, est toutefois rejetée avec véhémence par Québec. «Ce qu'on appelle l'initiative du siècle, pour moi, c'est la lubie du siècle. Ça n'a aucun sens. L'objectif de quelque chose comme 500 000 immigrants permanents à chaque année au Canada, ça n'a pas de sens, ni pour le Canada, ni pour le Québec», a lancé le ministre Roberge.
«Ce n'est pas raisonnable de penser qu'on est capable d'accueillir tout ce monde-là à court terme. En ce moment, il y a des pénuries de logements, les gens ont de la misère à trouver des places en garderie pour leurs enfants, de la misère à trouver des places à l'école. Il faut faire les choses dans l'ordre», a-t-il fait valoir.
Sur la question de la langue et de la francisation, M. Roberge et Mme Petitpas Taylor avaient cependant parlé d’une seule voix auparavant, faisant preuve d’une communion de pensée jamais vue dans l’histoire des relations entre Québec et Ottawa sur les questions de langue. La décision d’Ottawa de reconnaître pour la première fois que le français est menacé au Québec et non seulement dans les communautés francophones hors Québec est l’une des raisons principales de cette percée.
Mme Petitpas Taylor a d’ailleurs remis un faucon pèlerin en peluche à M. Roberge, symbole d’une espèce dont le statut s’est amélioré, passant de menacée à vulnérable, afin d’exprimer la reconnaissance par le fédéral de la vulnérabilité de la langue française partout au pays, incluant au Québec.
Jean-François Roberge en a profité pour faire appel au Sénat afin que le projet de loi fédéral C-13 sur les langues officielles soit adopté sans modification, démontrant à quel point la relation a fait un bond de géant sur la question de la langue.
De son côté, Michel Leblanc a exprimé à quel point la communauté d’affaires réclame de meilleurs programmes de francisation, le retour d’initiatives passées comme la francisation en commerce et en entreprise et la mise à contribution des groupes communautaires.
«Des gens qui travaillent fort, qui viennent d'arriver parfois avec des enfants, des familles ou des femmes ou des maris qui doivent s'intégrer, il faut leur faciliter la vie. C’est vraiment ça la leçon. Si on blâme l'immigrant, on perd de vue que c'est probablement que notre système n'est pas assez accommodant pour son horaire, pour sa réalité, donc c'est à nous de faire l'extra pour que ce soit facile», a-t-il plaidé.
Jean-François Roberge a promis que les détails de l’offre du guichet unique «Francisation Québec», dont la mise en place est prévue pour le 1er juin, seront annoncés bientôt par sa collègue Christine Fréchette, ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration.