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Le nord-est des États-Unis peut s’attendre à voir les augmentations de prix à la pompe, selon un expert.
La pression pour que le Canada exporte davantage son pétrole et son gaz naturel vers des marchés autres que les États-Unis s’est intensifiée mardi, alors que le président américain Donald Trump a imposé une taxe de 10 % sur les importations d’énergie.
«Cette crise démontre le besoin clair et urgent de construire davantage d’infrastructures de ressources naturelles», affirme l’Association des explorateurs et producteurs du Canada, qui représente les producteurs de pétrole et de gaz conventionnels.
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«Une mesure audacieuse et nécessaire que le gouvernement canadien devrait prendre pour répondre à cette crise est de construire des pipelines de représailles pour diversifier notre économie vers d’autres marchés au-delà des États-Unis, en augmentant notre puissance économique et en soutenant les valeurs canadiennes.»
Lisa Baiton, présidente et directrice générale de l’Association canadienne des producteurs pétroliers, appelle à une refonte urgente de la politique pour permettre la réalisation de projets viables.
Elle ajoute que la diversification des exportations vers l’Asie et l’Europe favoriserait la stabilité à long terme, et que la sécurisation de l’approvisionnement énergétique de l’Ontario et du Québec doit également être une priorité nationale.
«Nous sommes à un moment important de l’histoire du Canada — nous devons saisir ce moment», dit-elle.
«Les choix que nous faisons aujourd’hui détermineront si nous deviendrons un leader mondial de l’énergie ou si nous continuerons à prendre du retard.»
De son côté, la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, rappelle que sa province est assise sur l’une des plus grandes réserves de pétrole au monde et qu’avant l’entrée en vigueur des droits de douane, elle aurait adoré doubler la quantité vendue aux États-Unis.
«Nous allons maintenant devoir nous demander si nous pouvons vendre davantage sur la côte ouest, la côte est et dans le nord, car si les Américains ne veulent pas de nos produits, le reste du monde le veut», affirmait-elle à CNBC lors d’une entrevue mardi.
«L’Amérique est dans une très bonne position en étant le premier client et acheteur de pétrole à prix réduit, et nous allons devoir chercher de nouveaux marchés aussi, si cela persiste.»
Le chef de la direction d’Enbridge, qui est le plus grand canal d’acheminement du brut par pipeline vers les États-Unis, souligne que les droits de douane ne devraient pas modifier la stratégie ou les perspectives à court terme de sa société.
«Il faudrait une très longue période de droits de douane soutenus avant de voir des changements dans les schémas commerciaux et les flux de marchandises», indique Greg Ebel aux journalistes à l’issue d’une présentation aux investisseurs à New York.
Enbridge, établie à Calgary, transporte environ 30 % du pétrole brut produit en Amérique du Nord et près des deux tiers des exportations de pétrole canadien à destination des États-Unis. Elle représente 40 % du total des importations de pétrole brut des États-Unis.
L’imposition des droits de douane a coïncidé avec l’annonce par Enbridge d’un investissement de 2 milliards $ dans son immense réseau Mainline, qui relie le pétrole brut des sables bitumineux aux marchés américains.
«On ne peut pas dire que ce n’est pas une source d’inquiétude», convient M. Ebel à propos de l’intensification du conflit commercial.
«Il s’agit simplement d’un point de vue fondamental, vous essayez vraiment de faire abstraction des émotions et de vous demander quelles sont la réalité économique et l’interconnexion entre les deux pays. Et je pense que, sur n’importe quelle base, il faudrait continuer à dire que le lien est étroit, qu’il est difficile à rompre et qu’il est fort, les désagréments actuels mis à part.»
M. Ebel ajoute que le réseau principal est plein à craquer et qu’il n’a pas vu de clients transporter des barils vers le nouveau système Trans Mountain élargi qui se connecte à un port de la région de Vancouver. Il ne s’attend pas non plus à voir des droits de douane appliqués aux barils qui transitent par pipeline via les États-Unis, mais qui sont destinés à d’autres destinations.
Il y a plusieurs années, Enbridge a proposé de construire le pipeline Northern Gateway vers un port de la côte nord de la Colombie-Britannique, permettant ainsi les exportations de pétroliers vers l’Asie. Le projet a fait l’objet d’une intense opposition environnementale et a finalement été abandonné.
Enbridge précise qu’elle n’a pas l’intention de ressusciter cette proposition, même si les conflits commerciaux stimulent une nouvelle poussée pour construire des infrastructures canadiennes.
«Ce n’est pas que nous ne sommes pas intéressés, spécifie M. Ebel. C’est juste que l’environnement au Canada et la capacité à faire avancer les choses nécessiteraient des changements législatifs significatifs pour pouvoir réaliser cela.
«Malgré l’approbation des autorités réglementaires et le soutien des Autochtones et des clients, le gouvernement fédéral a mis fin à ce projet d’un trait de plume en interdisant les pétroliers au large de la côte ouest.»
Quant aux prix à la pompe pour les conducteurs américains, le nord-est des États-Unis peut s’attendre à voir les augmentations les plus rapides et les plus importantes en raison des droits de douane, car une grande partie du carburant de cette région provient directement de la raffinerie Irving Oil de Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, a écrit Patrick De Haan, de GasBuddy, dans un article de blogue mardi.
«D’ici la mi-mars 2025, le nord-est pourrait s’attendre à ce que les prix du carburant — y compris l’essence, le diesel et d’autres produits pétroliers — soient de 20 à 40 cents US plus élevés par gallon», a-t-il écrit.
«Pour un plein typique de 15 gallons, cela représente 3 à 6 $ US supplémentaires chaque fois que vous visitez la station-service.»
Selon M. De Haan, il n’est pas si simple pour les raffineries américaines de passer facilement au traitement du pétrole national, car bon nombre des installations et des oléoducs qui y sont reliés ont été configurés pour traiter le brut canadien lourd, et non celui plus léger du Texas.
«C’est comme demander à quelqu’un qui possède un camion diesel de faire soudainement le plein d’essence ordinaire.»