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L’économiste Tu Nguyen, de RSM Canada, affirme que le paysage économique du Canada «est sur le point de changer radicalement».
Des économistes affirment que l'économie canadienne est sur le point de plonger dans une récession cette année si les droits de douane américains entrés en vigueur mardi matin restent en place.
Le paysage économique du Canada «est sur le point de changer radicalement» en raison des mesures prises des deux côtés de la frontière, a déclaré Tu Nguyen, économiste chez RSM Canada, car la guerre commerciale entraînera une augmentation des prix, une hausse du chômage et une baisse de l'activité des consommateurs.
Elle a souligné que, même si les secteurs manufacturier, énergétique et alimentaire étaient immédiatement touchés, aucun secteur ne sera épargné et les entreprises devront supprimer des emplois.
Le décret du président américain Donald Trump frappant le Canada et le Mexique de droits de douane généraux de 25 %, avec une taxe moindre de 10 % sur l’énergie canadienne, est entré en vigueur à 00 h 01 mardi.
Le premier ministre Justin Trudeau a déclaré que la réponse du Canada comprendrait des droits de douane de rétorsion sur 155 milliards $ de biens américains.
Cela comprendra des droits de douane sur 30 milliards $ de marchandises immédiatement et sur les 125 milliards $ restants de produits américains 21 jours plus tard.
«Contrairement à la pandémie, où la reprise a rapidement suivi, les droits de douane provoquent un choc structurel sur l'économie canadienne dont les répercussions se feront sentir pendant des années», a déclaré Mme Nguyen dans une note.
Alors que les entreprises canadiennes élaborent des stratégies pour faire face à la tourmente, elles devraient entreprendre une évaluation complète de leurs chaînes d'approvisionnement, a indiqué Michael Dobner, responsable national de la pratique économique et politique chez PwC Canada.
Il a souligné qu'il est essentiel que les propriétaires d'entreprises comprennent l'ampleur des coûts supplémentaires auxquels ils sont désormais confrontés, ainsi que le montant qu'ils devraient potentiellement répercuter sur les clients.
«Dans quelle mesure avez-vous, en tant qu'entreprise, le pouvoir d'augmenter ou de répercuter une partie ou la totalité de ces droits de douane sur eux ?, a demandé M. Dobner. Ou êtes-vous désavantagés au point de devoir, pour ainsi dire, absorber tout cela ?»
M. Dobner a expliqué que certaines entreprises canadiennes pourraient chercher à se diversifier dans des marchés non américains où elles n'ont généralement pas vendu leurs produits.
Il a dit avoir entendu parler d'autres entreprises qui envisagent de déplacer leur production vers les États-Unis — une option que Donald Trump a encouragée mardi dans un message sur Truth Social, la plateforme de médias sociaux dont il est propriétaire.
«Si les entreprises déménagent aux États-Unis, il n'y a pas de droits de douane !!!», a-t-il écrit, en lettres majuscules.
M. Dobner a ajouté que déménager au sud de la frontière pourrait être une option réaliste pour les entreprises, en particulier dans le secteur manufacturier, «si leur dépendance envers les États-Unis est très importante et (une guerre commerciale) représente une menace existentielle pour leur entreprise».
Mais le revers de la médaille est de renoncer à certains avantages concurrentiels de la production au Canada, comme des coûts de main-d'œuvre moins élevés.
«Lorsque vous déménagez aux États-Unis, vous risquez de perdre certains de ces avantages et vous constaterez peut-être que, oui, vous n'avez pas de droits de douane, mais que vous pouvez avoir d'autres problèmes, et la transition n'est certainement pas facile», a expliqué Michael Dobner.
Malgré les tensions accrues entre les pays voisins, Stephen Brown, de Capital Economics, a expliqué que les marchés financiers anticipaient probablement toujours un «revirement rapide» de la part de l'administration Trump, compte tenu de la baisse limitée du huard jusqu'à présent.
Le dollar canadien s'échangeait à 68,94 cents US mardi après-midi, contre 69,31 cents US lundi.
Malgré tout, M. Brown a indiqué que le «meilleur scénario» est désormais une période prolongée de croissance du PIB plus faible que prévu.
«Si les droits de douane américains restent en place, le Canada tombera sans aucun doute en récession, a-t-il déclaré dans une note. Mais, même si les droits de douane sont bientôt levés, leur imposition représente un changement radical pour les relations commerciales entre les États-Unis et le Canada.»
Il a ajouté que la Banque du Canada réduirait probablement à nouveau son taux d'intérêt directeur la semaine prochaine et l'assouplirait plus que prévu cette année en réponse à l'affaiblissement anticipé de l'économie.
M. Brown avait déjà estimé que des droits de douane de 25 % auraient un impact d'environ 3 % sur le PIB canadien la première année.
Il a expliqué que la taxe plus faible de 10 % sur les exportations d'énergie ne changeait pas cette évaluation, car elle serait compensée par des droits de douane plus élevés sur d'autres produits, tels que l'acier et l'aluminium.
Les exportateurs de ces matières premières pourraient bientôt être confrontés à des droits de douane de 50 %, car la taxe entrée en vigueur mardi s'ajouterait aux tarifs spécifiques aux métaux qui doivent entrer en vigueur le 12 mars.
Donald Trump a également signé un décret présidentiel pour mettre en œuvre des «droits de douane réciproques» à partir du 2 avril. Il a lancé l'idée d'imposer des droits de douane sur les automobiles et a signé des décrets pour enquêter sur les taxes sur le cuivre et le bois d'œuvre.
Donald Trump a ajouté lundi les produits agricoles à sa liste croissante de cibles tarifaires.
«Le Parlement étant prorogé jusqu'au 24 mars et, compte tenu du vide de pouvoir qui a suivi la démission du premier ministre Justin Trudeau, il existe un risque qu'une réponse budgétaire tarde à arriver, a expliqué M. Brown. Et si ces droits de douane restent en place pendant une longue période, ils porteront un coup semi-permanent au potentiel à long terme du Canada et les transferts budgétaires ne suffiront pas à compenser ce coup.»
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