Début du contenu principal.
«Une nouvelle crise est à nos portes. Si la menace tarifaire américaine se concrétise, les conséquences économiques seront graves.»
Les tarifs américains et les représailles du Canada auraient un effet dévastateur sur l’économie, freinant la croissance tout en ravivant l’inflation, affirme le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem.
«Une nouvelle crise est à nos portes. Si la menace tarifaire américaine se concrétise, les conséquences économiques seront graves.»
Néanmoins, contrairement à l’inflation qui a suivi la pandémie de COVID-19, dans ce scénario, la Banque du Canada n’a pas beaucoup d’options dans sa boîte à outils pour atténuer les effets dévastateurs que les tarifs douaniers auraient sur l’économie, indique M. Macklem dans un discours prononcé vendredi lors d’un événement organisé par la Chambre de commerce de Mississauga et la Chambre de commerce d’Oakville.
L’amélioration de la situation économique par rapport à celle d’il y a quelques années aidera, selon lui, mais il avertit que le choc des tarifs serait très différent du choc économique de la pandémie.
«Avec la pandémie, nous avons connu une forte récession suivie d’une reprise rapide à la faveur de la réouverture de l’économie», rappelle-t-il.
«Cette fois, si les droits de douane sont durables et généralisés, il n’y aura pas de rebond. Nous pourrions éventuellement retrouver notre taux de croissance actuel, mais le niveau de production baisserait de façon permanente. Plus qu’un choc, il s’agit d’un changement structurel.»
Le président américain Donald Trump a menacé d’imposer des tarifs douaniers sur les produits canadiens à compter de mars. Le Canada a quant à lui brandi le spectre de mesures de rétorsion tarifaires.
Si les États-Unis mettent en place leurs menaces et que le Canada riposte, la croissance économique canadienne pourrait en souffrir tandis que l’inflation pourrait également augmenter, ajoute M. Macklem.
La baisse des ventes à l’exportation résultant des tarifs douaniers réduirait le revenu des ménages, tandis que les tarifs de rétorsion seraient inflationnistes sur les produits américains entrant au Canada, explique-t-il.
«Bien que ces nouveaux droits de douane n’aient pas encore pris effet, l’incertitude entourant la politique commerciale américaine se répercute déjà sur notre économie. Et si les États-Unis déclenchent un conflit commercial prolongé, les conséquences pourraient être graves.»
La Banque du Canada peut aider l’économie à s’adapter à un choc commercial en abaissant les taux d’intérêt pour soutenir la demande des consommateurs, indique M. Macklem.
Cependant, il ajoute que la banque centrale ne peut pas trop baisser les taux sans risquer de mettre de l’huile sur le feu de l’inflation.
«Nous ne pensons pas ici à une réponse de type COVID», affirme-t-il lors de la conférence de presse qui a suivi le discours.
La Banque du Canada a successivement réduit les taux d’intérêt au cours des derniers mois, l’inflation s’étant modérée par rapport à ses sommets lorsque l’économie stagnait.
Le huard s’est affaibli ces derniers mois en raison de la baisse des taux, et M. Macklem avance que cette tendance pourrait se poursuivre dans un contexte de guerre commerciale.
Les exportations vers les États-Unis représentent environ un tiers du revenu national du Canada, rappelle M. Macklem.
Il souligne que le libre-échange entre le Canada et les États-Unis, qui a renforcé au fil des ans, a profité aux deux pays.
«Une augmentation importante des droits de douane mettrait tout cela en péril», prévient-il.
La Banque du Canada a relevé ses taux pour lutter contre l’inflation qui a frappé l’économie après la pandémie, avant de commencer à les réduire l’année dernière.
La Banque du Canada est peut-être limitée dans sa capacité à réagir aux tarifs douaniers, mais M. Macklem met de l’avant quelques moyens par lesquels les gouvernements peuvent apporter des changements structurels positifs pour aider le Canada à traverser la tempête.
Ce sont deux questions sur lesquelles les groupes d’entreprises réclament des changements depuis bien avant l’entrée en vigueur des tarifs.
L’une d’entre elles est la question de la productivité. M. Macklem admet qu’il s’agit d’un concept un peu informe, mais qu’il conduirait à des salaires plus élevés pour les travailleurs et rendrait les entreprises plus compétitives au pays et sur l'échiquier mondial.
«Pour la politique monétaire, cela signifie que l’économie peut croître davantage sans pression inflationniste», explique-t-il lors de la période de questions après son discours.
La Banque du Canada a déjà tiré la sonnette d’alarme sur la faible productivité du Canada, témoigne M. Macklem, «et si l’heure a sonné, c’est maintenant».
M. Macklem rappelle également l’existence de barrières commerciales interprovinciales et espère que, cette fois-ci, le Canada pourra enfin agir sur cette plainte de longue date des entreprises.
Ces obstacles font partie de ce que le gouverneur nomme des objectifs internes qui, s’ils étaient résolus, protégeraient mieux l’économie nationale des défis extérieurs.
«Nous avons de nombreuses petites différences réglementaires entre les provinces qui entravent la circulation des biens et des services à travers le pays parce qu’elles augmentent les coûts», observe-t-il.
«Nous pourrions les harmoniser, ou (…) nous pouvons simplement reconnaître mutuellement ces différences réglementaires à travers le pays.»