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Des erreurs en français auront marqué le premier débat du PLC.
Celui qui est vu comme le meneur de la course à la chefferie du Parti libéral du Canada (PLC), Mark Carney, a montré lundi plusieurs vulnérabilités dans sa maîtrise du français lors d'un premier débat plutôt consensuel entre les candidats qui cherchent à remplacer Justin Trudeau.
Le moment le plus saisissant de ses lacunes est survenu lors d'un débat sur la guerre à Gaza. «Alors, nous sommes d’accord avec Hamas», a-t-il lancé sur la scène, visiblement par inadvertance.
Celle qui est vue comme sa principale rivale dans la course, l'ancienne vice-première ministre Chrystia Freeland, lui a renvoyé du tac au tac que «nous ne sommes pas d’accord» avec le Hamas. «Mais contre, contre, contre Hamas», a corrigé dans la commotion M. Carney.
Les conservateurs n'ont pas manqué de lui reprocher cette bourde. «N'est-il pas important qu'un premier ministre puisse communiquer clairement que le Canada n'est PAS d'accord avec le Hamas? Apparemment, Mark Carney n'est pas capable», a écrit sur X Pierre Paul-Hus, le lieutenant politique de Pierre Poilievre pour le Québec, en partageant l'extrait.
À un certain moment, Mme Freeland l'a aidé à dire «gestion de l'offre», puisqu'il peinait à terminer sa phrase. Puis, dans un débat sur les obstacles aux commerces entre les provinces, M. Carney a tenté d'expliquer que «le prix est énorme», voulant dire que le Canada a beaucoup à gagner à les réduire.
Moment cocasse, durant un segment portant sur les seuils d'immigration, l'animateur Pierre Jobin demande à M. Carney de résumer son idée en 20 secondes. «Combien», lui demande le candidat qui se fait répondre en anglais «20 seconds».
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Karina Gould a également, à plusieurs reprises, fait des erreurs de français, mentionnant par exemple quelle était sans doute «la seule sur cet étage» à vouloir conserver la «taxe» sur le carbone. La députée ontarienne voulait sans doute parler de la «scène» qui est, en anglais, «stage».
En mêlée de presse, tous les adversaires de M. Carney lui ont pardonné sa bourde sur le Hamas. Mme Gould a, par exemple, expliqué qu'il est difficile de débattre à un tel niveau «pour les gens qui n’ont pas d’expérience», non sans lui faire une petite jambette.
«Je suis certain que M. Carney a (…) trébuché. Je suis 100% convaincu que M. Carney est contre le Hamas», a dit Frank Baylis, le candidat dont la position est que le Canada doit reconnaître la Palestine comme un État.
Mme Freeland a pour sa part expliqué qu'«en tant qu’anglophone, le français est difficile», mais qu'elle a senti le besoin d'intervenir. «C’était, pour moi, en tant que libérale, important de clarifier la position (…) parce que je savais dans ce moment-là que ça pourrait être un moment dangereux pour nous tous», a-t-elle dit.
Le président américain Donald Trump a occupé une place prédominante dans le débat. À plusieurs reprises, M. Carney a répété qu'«on doit être maîtres chez nous», reprenant le célèbre slogan de la Révolution tranquille.
Mme Freeland, qui était jusqu'à tout récemment ministre des Finances, a aussi exprimé un désaccord avec M. Carney quant à son approche pour que le Canada réponde aux menaces de M. Trump.
«Je ne suis pas d'accord qu'on ne peut pas répondre au président Trump et qu'on ne peut pas gagner», a-t-elle signalé.
Elle a plaidé que le Canada est «le marché le plus important pour les États-Unis, plus important que la Chine, le Japon, le Royaume-Uni et la France ensemble».
«Alors, on peut ''activiser'' les Américains avec une réponse forte et on doit le faire», a-t-elle ajouté, employant un mot qui n'existe pas dans la langue de Molière.
L'ex-leader parlementaire Karina Gould a fait valoir que la situation n'est pas la même aujourd'hui que durant la première présidence de M. Trump.
«Chrystia a fait un excellent travail avec (la renégociation de) l'ALÉNA la première fois, mais on doit aussi reconnaître qu'on ne peut pas répondre de la même manière cette fois-ci.»
Quant à l'homme d'affaires et ex-député montréalais Frank Baylis, il a insisté pour dire qu'il a de l'expérience à «dealer» avec des individus comme M. Trump.
L'aspirant chef, entièrement bilingue, a soutenu qu'il a «négocié déjà des centaines et des centaines de contrats avec des Américains». «De temps en temps, j'ai rencontré le caractère de M. Trump et je sais comment ''dealer'' avec ce monsieur-là», a-t-il fait valoir.
Au fil du débat, Mme Freeland a semblé vouloir souligner que M. Carney ne répondait pas directement à une question que lui posait le modérateur du débat sur la «taxe» sur le carbone refilée aux consommateurs.
«Mais Mark, qu’est-ce que tu vas faire concernant la taxe?» a-t-elle lancé, sous-entendant, par le fait même, que son rival dans la course n’avait peut-être pas compris la question en français.
Le débat de lundi est le seul où les quatre candidats à la chefferie libérale ont croisé le fer en français dans une telle joute oratoire. Mardi, un deuxième et dernier débat réunira les quatre candidats à la succession du premier ministre Justin Trudeau – cette fois-ci en anglais.
Les membres du PLC pourront commencer à voter dès mercredi pour déterminer l'issue de la course. Leur prochain chef – et le prochain premier ministre du Canada – sera connu le 9 mars.