Début du contenu principal.
«Comme si les Québécois n'allaient pas réaliser que le Parti libéral du Canada instrumentalise une zone de tension historique importante qu’on ne doit pas minimiser.»
Le chef bloquiste Yves-François Blanchet accuse le chef libéral Mark Carney d'instrumentaliser les tensions commerciales entre le Canada et les États-Unis.
«On a vu (...) la mise en scène du grand héros ‘’Canadian’’ derrière lequel les Québécois doivent aller se réfugier soudainement, quitte à y sacrifier ce qu’ils sont comme Québécois», a lancé M. Blanchet en point de presse dans le quartier montréalais de l'Île-des-Sœurs, vendredi.
La veille, il avait donné le ton à cette ligne d'attaque à l'endroit de M. Carney durant un discours prononcé devant des militants bloquistes à Saint-Bruno-de-Montarville.
«Comme si les Québécois n'allaient pas réaliser que le Parti libéral du Canada instrumentalise une zone de tension historique importante qu’on ne doit pas minimiser», avait-il dit.
Appelé à préciser sa pensée, vendredi, le chef bloquiste a argué que «la simple journée d’aujourd’hui est un exemple».
Le chef libéral a, pour une troisième fois en trois semaines, mis sur pause ses activités de campagne électorale pour se présenter, vendredi, aux Canadiens dans ses habits de premier ministre.
«Il y a une instrumentalisation. Au début, c’était presque conspirationniste de dire ça, mais je pense qu’aujourd’hui les gens sont capables de l’observer», a ajouté M. Blanchet.
À son avis, M. Carney devrait se garder «une petite gêne» puisqu'il a succédé au premier ministre Justin Trudeau sans être dûment élu par les électeurs canadiens.
M. Blanchet fait valoir que l'élection, le 28 avril, du plus grand nombre possible de députés bloquistes permettrait d'avoir une réponse canadienne plus forte face au président américain Donald Trump et à ses droits de douane.
«Nous pouvons être des partenaires (et) alliés à la condition que lui, potentiel premier ministre du Canada et nous, potentielle principale voix du Québec, nous entendions entre égaux et entre partenaires pour faire face de façon plus forte qu'il ne pourrait le faire lui-même», a-t-il dit aux militants bloquistes jeudi.
Certaines personnes qui s'étaient déplacées pour l'entendre ont toutefois confié qu'ils s'attendent à ce que le Bloc subisse des pertes considérables au terme de l'élection, jusqu'à ne conserver qu'entre 15 et 20 sièges plutôt que 33.
Ce scénario correspond aux projections que fait l'agrégateur de sondages «Canada338», de même que celui de CBC, appelé «Poll Tracker».
«La campagne ne se déroule pas bien, je trouve», a laissé tomber Antoine Bécotte, qui dit militer auprès du Bloc québécois depuis les années 1990.
À son avis, Donald Trump a «fait peur à une certaine partie de la population et il y a une autre partie de la population qui a suivi les peureux».
«Ce sont des gens qui sont partis dans ce sens-là, qui se sentent rassurés par M. Carney», a-t-il dit à La Presse canadienne.
M. Bécotte compare le soutien allant à M. Carney à l'élan d'appui dont a bénéficié le Nouveau Parti démocratique sous le leadership de Jack Layton.
«Quand il y a eu la vague orange, en 2011, ça ressemble un peu à ça. Dans ce temps-là, quand ça part, c’est ''ben d’valeur'', (mais) c’est parti. Ça ne se reprend pas en trois semaines, ça prend un an ou deux, trois ans», croit-il.
Questionné à savoir s'il est d'accord pour dire qu'on assiste à une «vague rouge», M. Blanchet a refusé de répondre, au cours d'une mêlée de presse, justifiant cela par le fait que La Presse Canadienne n'a pas identifié, au moment de formuler sa question, le militant ayant fait un parallèle avec la vague orange.
«Je ne peux pas commenter ça», a soutenu le chef bloquiste.
M. Blanchet estime que trop d'attention est portée sur les sondages alors que la campagne électorale n'est pas terminée.
Par ailleurs, tous les militants bloquistes ne sont pas unanimes sur l'état de la campagne électorale pour leur camp.
«Je pense que c’est un peu difficile, mais j’ai quand même confiance. Je pense que c’est la seule façon que ma ville puisse être représentée au Parlement à Ottawa parce qu’autrement les autres partis ne le feront pas», croit Henri Colpron, bénévole pour le Bloc dans Boucherville.
Vendredi, M. Blanchet s'est entouré du sociologue et défenseur notoire de la laïcité Guy Rocher pour insister sur ses engagements électoraux à ce chapitre.
Le chef bloquiste a promis que sa formation politique déposerait un projet de loi visant à ce que les fonctionnaires fédéraux en position d'autorité travaillant en sol québécois doivent se conformer à la loi 21.
L'interdiction de port de signe religieux viserait notamment des agents de la Gendarmerie royale du Canada et le personnel de pénitenciers fédéraux. Le Bloc croit aussi qu'il devrait y avoir une «clause grand-père».
«Ce n'est sûrement pas beaucoup de monde, (mais) si on nous dit que parce que ce n’est pas beaucoup de monde, c'est inutile, je vais dire ''on va virer ça de bord''. Parce que ce n’est pas beaucoup de monde, c'est plus facile», a dit M. Blanchet.
Le chef bloquiste a aussi réitéré qu'il souhaite l'abolition du poste de représentant spécial du Canada chargé de la lutte contre l’islamophobie, présentement occupé par Amira Elghawaby.
M. Rocher, de son côté, s'est dit enthousiasmé par le fait que le Bloc fasse de la laïcité une pierre d'assise de ses engagements. Il s'est remémoré à voix haute le moment où il a été aux premières loges de la séparation entre le clergé et le système d'enseignement au Québec.
«Ce qui me frappe en tant que sociologue ayant vécu ses cent ans, ayant essayé d'analyser ses cent ans, c'est que cette évolution s'est faite si rapidement (…) et sans manifestation dans les rues contre, sans opposition. (…) Cette évolution, elle s'est faite parce que les Québécois y ont adhéré», a-t-il dit.
M. Blanchet a également proposé, vendredi, une consultation publique visant à encadrer l'exercice de la prière dans des lieux publics qui tombent dans les champs de compétence du fédéral, comme les aéroports et les gares de train.