En octobre 2022, Martin Parent entame une thérapie de 28 jours au Centre de réadaptation Wapan à La Tuque, en Haute-Mauricie, pour selon les dires de ses proches, reprendre sa vie en main et arrêter de consommer. Une semaine avant d’avoir complété son programme, il quitte abruptement l'établissement. Quatre jours plus tard, il est retrouvé sans vie.
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Une source bien au fait du dossier de Martin Parent témoigne sous le couvert de l’anonymat: «On avait la gâchette facile. La décision a été prise par une seule personne. Il n’y a pas eu de comité d’intervention avant de mettre à la porte Martin. Des mesures de sécurité auraient dû être prises. Il y avait une rigidité et de l’intolérance.»
Expulsé ou parti de son plein gré?
La mère de Martin Parent, Lise Launière, a récemment questionné la directrice du Centre de réadaptation Wapan, Christine Jean. Dans un enregistrement remis à Noovo Info, on entend la gestionnaire répéter que l’ancien usager n’a pas été expulsé: «on ne l’a pas mis dehors Martin, il y a eu un départ d’un commun accord» ou encore «il n’est pas parti en mauvais terme avec nous».

Ce n’est pas l’avis d’usager et d’intervenants qui l’ont côtoyé. Deux anciennes camarades de thérapie se sont confiées à Noovo Info: «On ne met pas quelqu’un comme ça qui est au bout» ; «Il a été renvoyé dès qu’il a réussi à s’ouvrir. J’ai encore de la misère avec ça.» À la suite du décès de Martin, six compagnons de thérapie ont co-signé une lettre pour porter plainte «contre les règlements du Centre Wapan et celles qui les appliquent».
La mère de Martin Parent déplore aussi qu’on ne l’ait pas averti du départ de son fils. Encore à ce jour, elle tente sans succès d’obtenir son dossier et le rapport faisant état de son départ.
«[Martin] m’avait dit que c’était sa dernière chance. Si j’avais su que vous l’aviez laissé partir, j’aurais pu le récupérer.»
Pas un cas isolé
La mère d’un autre usager déplore également le traitement reçu par son fils expulsé du centre en mai 2022, soit cinq mois avant Martin Parent. «Il a été démoli et son estime de soi a été très très touchée» se remémore Lizette Petiquay.
Selon les intervenants et usagers questionnés, trois avertissements suffisaient pour mettre un participant à la porte. L’évolution des risques suicidaires est également montrée du doigt par au moins trois professionnels.
«J’avais avisé que de mettre des gens dehors sans ressources pouvait mener à ça», confie l’infirmière Sandra Fortin Awashish. «Le fait d’avoir une simple barre tendre dans sa poche pouvait conduire à un avertissement.»
Le Centre de réadaptation Wapan est financé par Service Autochtones Canada à la hauteur de 3,3M$ en 2024-2025. Par courriel, le ministère fédéral indique prendre au sérieux les allégations et les plaintes et qu’un processus est en place pour s’assurer qu’elles soient examinées correctement. «Un processus est en place pour s’assurer que celles-ci sont examinées correctement et que les mesures appropriées sont prises», a-t-on indiqué à Noovo Info.
La direction générale de Wapan n’a pas répondu aux questions de Noovo Info en lien avec l’expulsion d’usagers et le suicide de l’un d’entre eux.
À voir dans la vidéo ci-contre.
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