Les podcasts offrent aux politiciens une occasion unique de diffuser leur message de manière authentique et sans filtre.
«C’est même très central et à toutes les campagnes électorales des politiciens», explique Jay Grandmont, expert en marketing d’influence.
Selon lui, la présence des chefs dans des podcasts à l’étranger, notamment aux États-Unis , est une stratégie gagnante, quand on sait combien de Canadiens consomment ces plateformes à l’influence internationale.
En janvier dernier, Pierre Poilievre avait réalisé une entrevue avec le psychologue canadien Jordan Peterson. Un podcast de près de deux heures sur Youtube qui comptabilise plus de 5 millions de vues. Ce coup marketing avait, à l’époque, offert à M. Poilievre l’occasion d’exposer ses objectifs de campagne devant un animateur conquis d’avance.
Contrairement aux émissions télévisées ou aux débats publics, où le temps de parole est souvent limité et l’interaction avec l'audience est indirecte, le podcast permet une plus grande liberté de discours.
De plus, les podcasts favorisent une plus grande proximité avec les auditeurs. En permettant aux politiciens de s’exprimer sur des sujets de manière approfondie, sans les contraintes des formats médiatiques traditionnels. Un exercice qui renforce notre perception d’authenticité par rapport à ces chefs, d’après Catherine Ouellet, professeure adjointe au département de science politique de l’Université de Montréal.
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Le chef du Nouveau Parti démocratique Jagmeet Singh, par exemple, a parlé ouvertement de sa vie privée et de sa famille lors de son passage au balado québécoisTout le monde s’haït qui compte 21 000 abonnés sur Youtube. Yves-François Blanchet du Bloc québécois a participé à un exercice similaire sur le balado Sans Filtre Podcast, qui pour sa part rejoint 53 000 abonnés sur Youtube. Le co-chef du Parti vert du Canada, Jonathan Pedneault, s’est quant à lui rendu au micro du balado anglophone The Radical Centre Podcast.
«Pour les candidats, ça peut être avantageux, notamment grâce à la viralité numérique», évoque Catherine Ouellet, qui rappelle qu’il n’est pas rare que des extraits de ces entrevues deviennent viraux sur des plateformes comme TikTok. Tout ça, à coût nul (ou presque) pour les partis politiques.
Un tiers de la population au Canada écoute des podcasts
Si les balados sont si alléchants pour les politiciens, c’est qu’ils sont de plus en plus populaires chez les 18-34 ans, un groupe d’électeurs dont les partis politiques s'arrachent l’appui.
Quelque 39% des adultes canadiens ont écouté des podcasts au moins une fois par mois en 2024, selon un rapport de Triton Digital. Cette proportion – déjà en forte augmentation par rapport aux années précédentes – explose chez les 18-34 ans. Ce sont 60% des jeunes adultes de ce groupe qui consomment régulièrement des podcasts. De plus, la durée moyenne d’écoute des podcasts a augmenté de 15 % en l’espace d’un an, ce qui témoigne de l’engagement grandissant des auditeurs.
Les données de Triton Digital révèlent également que les Canadiens passent désormais plus de temps à écouter des podcasts que des médias en ligne traditionnels. Ce changement dans les habitudes de consommation médiatique ouvre un espace stratégique pour les partis politiques, qui peuvent utiliser ce format pour dialoguer directement avec les électeurs.
Une nouvelle dimension de la communication politique
Le podcast est désormais un outil clé pour capter l’attention des électeurs, particulièrement ceux de la génération millénaire et de la génération Z, qui privilégient les supports numériques.
Philippe Garneau, spécialiste en marketing politique basé à Toronto, précise que le podcast est toutefois une arme à double tranchant, puisque les politiciens pourraient se limiter à ce format. «Ni Mark Carney, ni Pierre Poilievre se sont déplacés pour aller dans d’autres médias où ils seraient mal reçus, estime-t-il.On continue de développer cette idée qu’un politicien ne va plus voir ceux avec qui ils ne sont pas d’accord.»
M. Garneau croit que les podcasts joueront un rôle central dans la manière dont les électeurs s'informent et s'engagent politiquement au cours de la présente campagne électorale fédérale.
«D’aller discuter sur des formats longs vient ajouter une couche au côté humain du politicien et ça peut faire une différence dans la balance des votes», croit quant à lui Jay Grandmont, expert en marketing d’influence. Il insiste cependant sur la nécessité d’avoir un intervenant capable de poser des questions justes et pertinentes aux politiciens qui se frottent à cet exercice.
Les podcasts permettent une écoute sur demande, sans contrainte d'heure, de lieu ou de format. Cette flexibilité fait de cet outil un canal particulièrement puissant pour capter l'attention des électeurs, notamment des jeunes, qui privilégient souvent ce format à la télévision ou à la radio. Un outil désormais «indispensable» pour les politiciens, tranche Catherine Ouellet.