Début du contenu principal.
Bien que ce coup de sonde laisse entrevoir certains progrès dans la culture du hockey junior au Québec, les experts estiment qu’il faut impérativement intensifier et mieux encadrer les efforts de prévention.
Mentionnons d’emblée que le sondage n’a pas été conçu par une firme spécialisée, environ 220 joueurs y ont participé de manière volontaire et anonyme. Le professeur retraité de l’École de travail social à l’Université Laval et expert en prévention, Michel Dorais, a conseillé la ligue dans son élaboration.
«Le 6 %, c’est un chiffre énorme à mes yeux. On est loin du zéro. […] Pour qu’un joueur de hockey affirme être une victime, c’est une grosse étape, et ce pourcentage c’est sûrement un chiffre minimal», croit Michel Dorais.
Voyez le reportage de Louis-Philippe Bourdeau dans la vidéo.
«Y a-t-il des problèmes aussi gros qu’avant ? Non. Y a-t-il encore des problèmes? Assurément», ajoute l’expert.
Contactée par Noovo Info, la directrice des services aux joueurs de la LHJMQ, Natacha Llorens, reconnaît que le travail de sensibilisation et prévention est loin d’être terminé.
«Même s’il y en avait juste un, deux ou trois, ce serait trop, assure-t-elle. On veut s’assurer justement que ces situations ne se reproduisent pas, et qu’on prenne les mesures appropriées pour mieux les prévenir.»
Parmi tous les répondants au sondage, seuls quatre joueurs ont déclaré avoir eux-mêmes initié des comportements inappropriés.
À l’exception de quelques cas d’intimidation, la quasi-totalité des jeunes hockeyeurs interrogés affirme n’avoir jamais observé de comportements problématiques au sein de leur équipe.
À lire également:
«Je pense qu’il peut y avoir aussi une certaine forme de déni de la part de certaines personnes, et c’est normal. […] Il faut considérer ça lorsqu’on voit de tels résultats», estime la conférencière Léa Clermont-Dion, qui a mené des formations sur les notions de consentement et de violence sexuelle auprès des joueurs de la LHJMQ.
Les répondants ont aussi souligné que la consommation d’alcool (14%), la gestion de la colère (19%) et la pression sociale (15%) ou l’influence des pairs (13%) étaient parmi les principaux facteurs qui pourraient les amener à commettre de tels gestes.
«Ça reste des jeunes, ils sont aussi confrontés aux mêmes défis que les autres jeunes, mais — en plus — ils ont le contexte de la LHJMQ, et ils ont d’autres facteurs de risque qui viennent s’ajouter», explique Mme Llorens.
«[Ces données] nous permettent de connaître leur vulnérabilité, et leur force, pour pouvoir les aider à être des meilleurs joueurs sur la glace, et de meilleurs citoyens», espère Michel Dorais.
Le sondage a été déposé ce jeudi à l’Assemblée nationale à la suite de la commission parlementaire sur les violences dans le milieu du hockey, tel que réclamé par certains députés.
Questionnée sur les enjeux de consentement et de violence sexuelle, la totalité (100%) des joueurs a affirmé être convenablement formée à ces deux notions.
Le sondage a été mené dans la foulée des ateliers menés par Léa Clermont-Dion.
«Je pense qu’il y a une grande différence, entre comprendre et agir, croit la formatrice. Ce n’est pas parce qu’on fait une formation sur le consentement que, du jour au lendemain, tout est réglé.»
La chercheuse postdoctorale à l’Université Concordia se montre tout de même optimiste quant à l'évolution des mentalités chez les joueurs.
Elle espère surtout que les chiffres de ce sondage sont porteurs d'un réel changement, bien qu’elle estime que la réflexion en cours demeure « insuffisante » et « qu’un dialogue plus sérieux » doit être entamé collectivement.
Ce sondage doit servir de base à la création d’un programme de formation continue et de prévention. Le hic ? L’argent pour le financer ne semble pas au rendez-vous ni au gouvernement ni au sein de la LHJMQ.
Cette dernière a présenté deux demandes de soutien financier au palier provincial, et n’a toujours pas obtenu de réponse.
Entre temps, est-ce que la ligue serait prête, elle-même, à assumer les coûts? Non, selon un autre sondage mené par Mme Llorens auprès de toutes les équipes.
«J’ai sondé les 18 équipes pour voir quel montant elles étaient prêtes à mettre pour financer cette formation. Les montants identifiés n’étaient pas suffisants pour [couvrir les frais]», dit-elle.
Pour Léa Clermont-Dion, la responsabilité de la formation ne devrait pas incomber uniquement à la LHJMQ, qui n'est pas la mieux outillée pour y arriver.
«On a un questionnement à avoir collectivement : veut-on vraiment laisser la responsabilité à la LHJMQ l'avenir de nos jeunes ?», soulève -t-elle.
À son avis, les futures formations devraient être mieux encadrées, et pourraient s’inspirer - par exemple - de la loi P22.1 mise en place dans les établissements d'enseignement supérieur au Québec, pour combattre les violences à caractère sexuel par l'implantation, entre autres, de formations obligatoires
«Il me semble qu'on devrait créer ce type de contenus également pour les organisations sportives à travers la province du Québec, et ne pas laisser les organisateurs sportifs improvisés des formations», lance Mme Clermont-Dion.