Début du contenu principal.
Carla White est la seule locataire restante de son immeuble, qui doit être démoli pour faire place à un projet de condominiums de 176 unités.
Carla White se tient près de la fenêtre de son appartement jaune et rose rempli de plantes au cœur du centre-ville de Montréal et se demande où elle ira vivre ensuite.
L'appartement est petit et encombré, il n'y a pas de poêle en état de fonctionnement et son lit et son petit bureau occupent la majeure partie de l'espace au sol. Mais c'est chez elle et, à 400 $ par mois, le prix lui convient.
Mme White, qui ne veut pas dévoiler son âge, dit qu'elle était sans abri après plusieurs expulsions précédentes avant de trouver cet appartement qu'elle pouvait se permettre il y a dix ans. La petite garçonnière lui a donné une certaine stabilité.
Mais comme tant de locataires à faible revenu à Montréal, cette stabilité est menacée par la gentrification et le développement.
Elle est la seule locataire restante de son immeuble, qui doit être démoli pour faire place à un projet de condominiums de 176 unités. Mais pour aller de l'avant, le promoteur doit parvenir à un accord avec Mme White, qui assure qu'elle ne partira pas tant qu'elle ne pourra se loger à un endroit qui offre la stabilité à long terme dont elle a besoin pour éviter de retourner à la rue.
Lors d'une réunion au début du mois de mai, le comité chargé de la démolition de la Ville de Montréal a voté pour le démantèlement de l'immeuble situé au coin des rues Saint-Hubert et Sainte-Catherine Est, qui comprend l'ancien site d'un restaurant italien bien connu, Da Giovanni. Cependant, l'approbation est assortie de conditions, notamment celle prévoyant que le promoteur démontre que le dossier a été réglé avec la locataire récalcitrante, selon le procès-verbal de la réunion du comité.
Le développeur, Mondev, n'a pas répondu à une demande d’entrevue. Mais lors de la réunion du comité du 1er mai, l'associé principal, David Owen, a déclaré que la société tentait de négocier avec Carla White depuis trois ou quatre ans, sans succès.
M. Owen a signalé que l'entreprise avait proposé à Mme White un autre appartement, ce qu'elle a refusé. Ils lui ont ensuite offert 20 000 $, ce qu'elle a également refusé, a-t-il dit. «Elle a indiqué à nos avocats qu'elle voulait un penthouse et un montant de plus de 50 000 $», a-t-il ajouté lors de la réunion du comité.
Carla White et son avocat, Manuel Johnson, disent qu'elle ne demande rien de déraisonnable, compte tenu de la flambée des loyers de la ville et de la disparition des logements abordables. M. Johnson pense que son dossier est un cas classique, qui oppose le désir de riches développeurs de faire des profits sur le dos des besoins de la population en général.
«Le droit de faire des profits dans le développement immobilier existe mais n'est pas illimité», selon l’avocat Johnson. «Il ne devrait pas prendre le pas sur le droit fondamental au logement, qui est un besoin humain fondamental.»
À revoir également : Le gouvernement «ignore» la crise du logement, dit Valérie Plante
Manuel Johnson signale que Carla White veut un appartement avec un loyer abordable garanti pendant au moins cinq ans, ou l'équivalent en espèces. Il reconnaît que le promoteur a offert un appartement à Mme White, mais celle-ci répond qu’elle ne se sentirait pas en sécurité dans le bâtiment proposé et qu'elle n'était pas convaincue que le loyer n'augmenterait pas.
Carla White ajoute que 20 000 $ ne lui dureront pas longtemps, car les loyers des appartements à Montréal ont grimpé en flèche et la plupart de ceux qu'elle voit se situent entre 1400 $ et 1700 $ par mois. «Jusqu'où iront 20 000 $ à 1600 $ par mois ? Je serai expulsée d'ici un an. Je serai de retour à la rue.»
Elle se dit prête à considérer de s’installer dans différents quartiers de la ville.
Le conseiller municipal Robert Beaudry affirme que l'obligation pour le promoteur de s'entendre avec les locataires déplacés n'est pas nouvelle et que les droits des locataires sont déjà inscrits dans les statuts et règlements. «Dans l'état actuel des choses, il est très difficile de trouver un nouveau logement, alors nous avons voulu souligner à nouveau le fait que selon la réglementation, ils doivent démontrer que tout a été fait pour respecter les droits de la locataire», a-t-il mentionné lors d'un entretien téléphonique.
Bien que M. Beaudry pense qu'il y a de la «bonne volonté» de la part du promoteur pour négocier, on ne sait pas ce qui se passera si un accord ne peut être conclu.
Les deux parties doivent comparaître le mois prochain devant le Tribunal administratif du logement du Québec, qui statue sur les litiges entre propriétaires et locataires. L’avocat Johnson ne pense pas, cependant, que cet organisme aura le pouvoir d'imposer un accord, en particulier parce que sa cliente et lui sont satisfaits de la décision de la Ville.
Il croit que si une entente n'est pas conclue, il appartiendra à un juge de la Cour supérieure du Québec de trancher, ce qui pourrait être un processus beaucoup plus long.