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Ottawa a surtout défini lundi le caractère «inefficace» d’une subvention aux combustibles fossiles, dans le cadre d’une annonce à Montréal. C’était sur la liste de tâches du cabinet du ministre Steven Guilbeault depuis un bon moment déjà.
Le ministère de l’Environnement du Canada a présenté son processus d’élimination des subventions «inefficaces» aux combustibles fossiles, dont la mise en place a été devancée de 2025 à 2023.
Ottawa a surtout offert lundi une définition du caractère «inefficace» d’une subvention aux combustibles fossiles, dans le cadre d’une annonce à Montréal. En 2019, le Bureau du vérificateur général du Canada suggérait que «les efforts du Canada pour éliminer les subventions inefficaces aux combustibles fossiles seraient aidés si l’on clarifiait ce qu’on entend par inefficace».
Aujourd’hui, on sait maintenant que des subventions «inefficaces» aux combustibles fossiles comme le pétrole, le gaz naturel ou le charbon sont définies comme des subventions qui ne servent qu’à soutenir des activités dans le secteur des combustibles fossiles, l’avantagent «de manière disproportionnée» et en favorisent la consommation.
Le ministère de Steven Guilbeault empêchera désormais la création de nouvelles mesures qui correspondraient à la définition de subvention inefficace et dit qu’il va s’assurer que les politiques et programmes existants ne soutiennent plus le secteur des combustibles fossiles – hormis quelques exceptions.
Voyez le récapitulatif de Marie-Michelle Lauzon dans la vidéo qui accompagne le texte.
Combien d'argent public économisera le gouvernement avec ce plan? Combien de subventions inefficaces accorde actuellement Ottawa à l'industrie fossile? Les hauts fonctionnaires du gouvernement fédéral n'ont pas été en mesure de répondre à ces questions dans un breffage technique à l'intention des médias lundi matin.
L’engagement du Canada à éliminer les subventions aux combustibles fossiles remonte à 2009. En 2016, le Canada avait statué sur 2025 comme première échéance pour réaliser ce projet.
«Le Canada est le premier pays du G20 à accélérer cette promesse», a commenté le ministre Guilbeault.
Malgré ces déclarations, des personnes ont quand même tenter d'interrompre M. Guilbeault dans son point de presse, en appelant à sa démission. Le ministre a poursuivi son allocution. «C’est quelque chose que vous avez demandé pendant plusieurs années», a-t-il répondu.
M. Guilbeault a convenu que le champ d’application exclut le financement public des combustibles fossiles mais que, d’ici l’automne 2024, le gouvernement présentera son plan en la matière. L'annonce du jour s'avère «étape clé dans cette direction», selon ses dires.
Qu’à cela ne tienne, Équiterre s’est réjouie des mesures annoncées lundi pour mettre fin aux investissements de fonds publics dans le développement des énergies fossiles. L’organisme de défense de l’environnement croit que le travail de mobilisation a convaincu le gouvernement Trudeau «d’agir en ce sens».
«Ce genre de mesures gouvernementales doivent servir de tremplin pour la création de nouveaux emplois durables dans les collectivités qui dépendent de l’exploitation des hydrocarbures», a déclaré Marc-André Viau, directeur des relations gouvernementales d’Équiterre, dans un communiqué.
Le diable est toutefois dans les détails, d’après l’OBNL, qui est préoccupé par les exemptions.
«Ce sont des portes de sortie sur lesquelles l’industrie mise énormément pour maintenir le statu quo dans la production d’hydrocarbures», a avancé M. Viau. «L’argent des contribuables ne doit pas servir à les garder ouvertes. Nous continuerons de faire pression sur le gouvernement pour le sensibiliser à l’importance de ne pas compenser financièrement l’industrie pour ses échecs et s’assurer que celle-ci respecte ses obligations environnementales», a-t-il prévenu.
Même son de cloche du côté de Greenpeace. «Nous souhaitons aussi rappeler au gouvernement fédéral qu’il n'y a pas de subventions "efficaces" pour les combustibles fossiles à une époque où les catastrophes climatiques et les profits de l'industrie pétrolière battent des records, et surtout pas pour des technologies qui n’ont pas fait leurs preuves comme le captage du carbone», a souligné Keith Stewart, stratège chez Greenpeace.
Le Nouveau Parti démocratique (NPD) a fait de l'élimination des subventions aux énergies fossiles une priorité de l'entente de soutien et de confiance conclue avec les libéraux.
Dans un communiqué diffusé après l'annonce, le NPD s'est dit «mécontent» du plan et juge qu'il ne répond pas à l'urgence climatique.
«Il est clair que cette annonce ne répond pas à l'urgence du moment, alors que les catastrophes climatiques mettent en péril tout ce à quoi nous tenons», a affirmé le NPD.
L'une des exemptions qui permettent de continuer à offrir des subventions à l'industrie fossile concerne «les technologies de production atténuée», comme le captage du carbone, ce que déplore le deuxième parti d'opposition.
«Les libéraux sont prêts à donner aux grandes sociétés pétrolières 12 milliards de dollars supplémentaires pour des technologies telles que le captage et le stockage du carbone, alors qu'elles ont déjà réalisé des profits records cette année», a déploré le NPD.
De son côté, Monique Pauzé, porte-parole du Bloc québécois en matière d'environnement, a indiqué que «les libéraux de Justin Trudeau nous mentent éhontément lorsqu'ils parlent de subventions efficaces au secteur pétrolier. Cela n'existe pas et relève de la fiction».
Selon le Bloc, avec autant d'exemptions, «le pétrole et le gaz continueront d'être grassement subventionnés au Canada».
En décembre 2022, Ottawa avait présenté une première mouture de son plan, en publiant les lignes directrices pour mettre fin aux nouvelles subventions directes pour les investissements et les projets de combustibles fossiles à l'étranger, y compris ceux qui appartiennent à des entreprises canadiennes.
Les subventions aux combustibles fossiles se calculeraient en milliards de dollars au Canada. Selon un rapport d’Oil Change International, paru à l'automne 2022, le gouvernement Trudeau avait «injecté directement» une moyenne de 8,5 milliards de dollars dans ce secteur entre 2019 et 2021. Un autre organisme à but non lucratif, Environmental Defence, calcule une vingtaine de milliards de dollars en subventions publiques dans les combustibles fossiles au Canada en 2022, en incluant des programmes d’exemption d’impôt.
Avec de l'information de La Presse canadienne et de Marie-Michelle Lauzon pour Noovo Info