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Après deux années intenses de travail en pleine pandémie de COVID-19, l’infirmière révèle qu’elle et ses collègues ont souffert «d’intimidation» de la part de gestionnaires.
Après avoir travaillé 25 ans dans un hôpital ontarien, une infirmière a livré un puissant témoignage, expliquant pourquoi elle a décidé de quitter les soins de première ligne, alors que des hôpitaux ont récemment annoncé qu’elles allaient fermer leur salle d’urgence.
La dame de 52 ans, qui a voulu protéger son identité, a expliqué qu’elle adorait son emploi, elle qui a notamment travaillé en tant qu’infirmière en salle opératoire,, en réhabilitation ainsi qu’en soins palliatifs.
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Mais depuis février, l’infirmière dit s’être absentée du travail en raison du stress et doit régulièrement consulter un psychologue après avoir souffert d’un épuisement professionnel.
Ce texte est une traduction d'un article de CTV News.
Après deux années intenses de travail en pleine pandémie de COVID-19, l’infirmière révèle qu’elle et ses collègues ont souffert «d’intimidation» de la part de gestionnaires, qui, selon elle, les ont forcés à soigner davantage de patients que ce qui est suggéré. D’autres employées ont été contraintes de faire des heures supplémentaires obligatoires en raison d’une pénurie importante de personnel. En effet, plusieurs infirmières manquaient à l’appel puisqu’elles avaient contracté le virus, qu’elles étaient épuisées ou bien qu’elles avaient tout simplement démissionné.
«Quand je pense à la profession d’infirmière maintenant… je tremble, a déploré la dame de 52 ans. Il y avait toujours une certaine menace qui nous disait "n’appelle pas pour dire que tu es malade" ou "nous savons que tu es stressée, mais l’Ontario a besoin de toi".»
Elle a donc décidé de prendre une retraite anticipée et dit qu'elle connaît plusieurs autres infirmières expérimentées qui sont parties travailler dans d’autres secteurs de soins infirmiers, où elles peuvent choisir leurs propres heures de travail, réduisant ainsi leur stress. Deux autres infirmières seraient sur le point d’annoncer leur démission à leur supérieur, lance-t-elle.
«Toutes les personnes à qui j’ai parlé ont soit démissionné, pris leur retraite ou consultent un psychiatre et sont sur les antidépresseurs… Comme c’est triste», avance l’ex-infirmière.
Ce témoignage survient après que plusieurs hôpitaux canadiens aient décidé de fermer temporairement leur salle d’urgence en raison d’un manque criant de médecins et d’infirmières.
Le Glengarry Memorial Hospital, à Alexandria en Ontario, fait partie de cette liste, alors qu’un hôpital à Kamsack en Saskatchewan doit réduire ses heures d’urgence et fermer ses lits d’hôpitaux parce qu’il n’y a pas assez d’infirmières pour s’en occuper.
Deb Lefebvre, une infirmière vivant à Kingston en Ontario, mais travaillant à l’extérieur de la communauté, a décrit les soins d’urgence au Canada comme étant «peu sécuritaires».
«Ils sont devenus un endroit peu sûr pour les patients, estime-t-elle. Nous quittons les hôpitaux... avec le sentiment que les soins aux patients sont compromis.»
Crédit photo: CTV News
Une autre infirmière, interrogée par le CTVNews.ca, qui a également voulu conserver l’anonymat, a également critiqué la situation actuelle.
«Le taux de personnel pour le nombre de patients n’est pas suffisant et plusieurs infirmières démissionnent en sachant maintenant que les patients ne reçoivent pas de soins appropriés. Les appels sonnent pendant des heures, les patients se salissent parce qu'il n'y a personne pour les emmener aux toilettes, les patients meurent dans les salles d'attente. Les hôpitaux au Canada ne sont pas sécuritaires.»
L'Association canadienne des médecins d'urgence a averti la publication dans un communiqué de presse en juillet, qu’il n’avait «jamais été aussi important de prêter attention à l'état actuel des services d'urgence».
Mme Lefebvre mentionne que la décision de mettre fin à ces services est énormément inquiétante, alors qu’il n’y a pas assez de personnes pour faire le travail de manière efficace. Elle conseille à la population canadienne désirant aller vers les urgences au cours des prochaines semaines de se munir d’un accompagnateur pour s’assurer que leur condition ne se détériore pas pendant le temps d’attente.
Le président et directeur général de SoinsSantéCan, Paul-Émile Cloutier, a admis que les deux dernières années ont grandement ébranlé le système de santé canadien.
«Tout au long de la pandémie, les travailleurs de la santé ont travaillé, et continuent de travailler dur pour prodiguer les meilleurs soins possible dans des circonstances extrêmement difficiles. Ce que nous voyons maintenant, c’est un personnel qui n’est plus en mesure de boucher les trous d’un système, qui n’a pas été conçu pour gérer cette pression constante, a-t-il répondu par courriel. Les pénuries de personnel de santé ne s'amélioreront pas si nous continuons simplement à injecter plus d'argent dans un système défaillant. Il doit être repensé pour répondre efficacement aux besoins changeants d'une population vieillissante.»
Un rapport de Statistique Canada, datant de 2021, rapporte qu’une infirmière sur quatre souhaite quitter son emploi d’ici trois ans en raison du stress ou d’inquiétudes liées à la santé mentale.
Avec l’arrivée d’une 7e vague de COVID-19 en plein été, le manque de personnel en soin de première ligne pourrait s’aggraver, selon Linda Silas, cheffe de la Fédération canadienne des syndicats d’infirmiers et infirmières.
«Ce que nous entendons des syndicats provinciaux est que chaque jour ils reçoivent un appel d’infirmières, demandant un changement d’horaire pour réduire leurs heures de travail de manière importante ou annonçant tout simplement qu’elles prennent leur retraire anticipée.»
Les primes offertes par certaines provinces comme l'Ontario et le Québec n'ont pas réussi à changer les choses, affirme-t-elle.
Les problèmes liés à la profession, estime Mme Silas, sont la qualité de vie et le traitement à l’endroit des infirmières, qui doivent faire plusieurs heures supplémentaires et ne sont pas en mesure de prendre des vacances.
Garder les infirmières expérimentées en poste est la première étape pour «arrêter le saignement» et assurer la sécurité des soins de santé de première ligne, ajoute-t-elle.
Des groupes d'infirmières ont également demandé au gouvernement fédéral d'élaborer un plan national pour remédier à la pénurie d'infirmières, en annonçant le nombre d'infirmières qui seront nécessaires au cours des prochaines décennies.
-Un texte d'Avis Favaro pour CTV News