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Mon futur époux sera un vaillant travailleur de la construction qui porte le costume traditionnel du chanteur de YMCA!
Bien entendu, comme vous tous cette semaine, j’ai vu passer le « Lucidepodcast », un balado concocté par ces deux hommes très virils qui parlent fort parce que lorsqu’on parle fort, ça donne plus de poids à nos arguments. Et ça rentre plus profond dans la tête quand ON CRIE !
En résumé très simple, c’est un gars barbu, qui visiblement n’a pas encore trouvé la femme parfaite pour lui trimer la mâchoire et un autre gars, pas barbu, qui nous expliquent la place que devrait occuper la femme dans la société, mais surtout dans l’environnement de son homme (lire ici : mari).
Je suis tout de suite tombé sous le charme poussiéreux de ces deux messieurs, issus des années 1954 ! Mais je me suis triste parce qu’ils ne s’adressent qu’aux couples traditionnels, homme et femme. J’aurais aimé qu’ils pensent à moi, pauvre gai qui aurait aussi besoin d’être guidé vers le retour aux sources du bonheur conjugal. Je peux facilement imaginer qu’ils aimeraient mieux me guider vers les portes de l’enfer et de la dépravation, mais reste, que j’aimerais, moi aussi, vivre à Traditionville !
Mon futur époux serait un vaillant travailleur de la construction qui porte le costume traditionnel du chanteur de YMCA !
Naturellement, dès que nos fréquentations seraient devenues sérieuses, j’aurais tout de suite arrêté ma formation de sténodactylo. Plus de besoin de devenir secrétaire de direction ! Je sais, je visais haut. Probablement beaucoup trop haut pour mon cerveau de gerboise.
Je le vois demander ma main à genoux devant mon père. Dès que celui-ci m’aurait offert à Anatole (c’est le nom de mon futur époux), mon homme à moi se serait relevé pour m’enfiler une bague de fiançailles que je n’ai pas choisie et qu’il a forgée lui-même, comme Thor.
Ce sont les yeux remplis des beaux souvenirs de notre voyage de noces à Niagara Falls que j’aurais passé les portes de notre bungalow à Traditionville, dans ces bras forts de gars qui fend des 2x4 à mains nues. Des bras musclés qui me protégeront toujours d’une attaque sournoise d’un écureuil venu visiter nos poubelles de banlieue. Ce sont mes cris stridents de terreur qu’il l’aurait alerté. Il aurait cessé immédiatement de lire « La Gazette » pour venir à mon secours.
Chaque jour, je verrais ma fierté grandir à force de maîtriser TOUTES les recettes de la bible culinaire de Jéhane Benoît. Le rôti de palette n’aurait plus de secret pour moi ! Oh non ! Jamais sec ! Et que dire de mon daiquiri aux fraises fraîchement brassé dans mon blender tout neuf qui attend mon homme à son retour du chantier. Je le vois en train de siroter son cocktail, bien installé dans sa chaise capitonnée du salon, pendant que je défais ces bottes de travail recouvertes de bran de scie pour libérer ses pieds de travailleur ! J’adore la saleté ! Ça me donne l’occasion d’utiliser ma grosse balayeuse Électrolux toute neuve !
Sans même avoir besoin de discuter, je comprendrais ce qu’il aimerait que je lui fasse ! Le soir, dans notre chambre conjugale, j’attendrais impatiemment dans mon demi-lit qu’il me fasse signe de le rejoindre dans le sien. Je prendrais bien soin de le faire jouir dans les règles de l’art. Même que parfois, j’aurais un peu de fun aussi ! Mais c’est facultatif !
Naturellement, je ne pourrais plus vous écrire dans un média comme je le fais présentement. Mais on s’en fout ! À quoi ça sert ? RIEN ! Peut-être que si mon mari était extrêmement ouvert d’esprit et attentionné, il me laisserait écrire un petit encadré dans le journal local de Traditionville une fois par mois. J’essaierais, tant bien que mal, dans toute ma limite intellectuelle, de parler d’un produit ménager que j’affectionne particulièrement. Bien sûr, mon mari aurait lu et approuvé le petit texte avant que j’aille le porter au rédacteur en chef. Ça va de soi.
Nous aurions même un page Instagram conjointe dont seul Anatole aurait les accès ! Ça ne me dérange pas parce que je ne comprends rien à la technologie ! On y verrait des photos d’Anatole en Speedo à la pêche, en Speedo à la chasse, en Speedo devant le barbecue, en Speedo en train de passer la tondeuse et en Speedo en train de laver sa voiture à lui seul ! Une fois de temps en temps, je pourrais mettre une photo de mon potager, mais sans que je sois sur la photo.
Bien que l’on pratique plus que régulièrement et que le sperme de mon époux soit aussi fort, sinon plus, que celui d’un mâle alpha hétérosexuel, nous ne pouvons pas concevoir d’enfant. Mon époux et moi n’avons donc pas d’autre choix que de s’inscrire sur la longue liste de la crèche des Sœurs de Compostelle de Traditionville.
En attendant de pouvoir adopter un enfant conçu par une pécheresse de Sodome, nous sommes allés nous chercher un gentil chien à la fourrière. Un beau berger allemand que nous avons appelé « Docteur Mailloux » parce qu’Anatole était un grand fan du docteur ! J’aurais préféré un caniche, mais mon mari fait dire que ça fait moumoune en tabarnak ! Évidemment, un berger allemand, ça me fait un peu peur, mais je m’habitue ! Et comme l’affirme Anatole : Va le promener l’après-midi, ça va t’empêcher de finir avec un gros cul ! Il est tellement drôle. Je l’adore !
Je sais que je rêve présentement, mais j’espère vraiment avoir la chance de voir Traditionville de mes propres yeux ! Bien sûr cette semaine, comme la tradition le veut, qui prend mari, prend son nom, je signe donc mon papier avec mon nouveau nom…
Monsieur Anatole Babin.
P.S. : Ce texte a été lu et approuvé par mon mari.
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Note de la rédaction: Ce contenu est un article d'opinion qui aurait dû figurer dans notre section de Chroniques. Pour plus d’information, consultez les normes éditoriales de Noovo Info.