Début du contenu principal.
Les électeurs semblent prêts à laisser une chance à Mark Carney. Mais y a-t-il une limite au pardon populaire?
Gaffes à répétition, signes d’impatience, doutes en matière d’éthique: on pourrait dire que Mark Carney vit un mauvais début de campagne. Pourtant, il se maintient dans les sondages. Les électeurs semblent prêts à lui laisser une chance. Mais y a-t-il une limite au pardon populaire? Ou bien est-ce que le pays a décidé que Mark Carney avait l’expertise requise, peu importe tout le reste?
Et à la question «À qui faites-vous confiance pour faire face à Trump», Mark Carney fait toujours bonne figure. Tout autour de cette question centrale, un paquet d’enjeux se retrouvent éclipsés.
C’est le cas ce ceux plus spécifiques au Québec : immigration, langue française, laïcité… Nul ne sait ce que Mark Carney en pense. Son niveau de français peut toujours passer, mais son absence de connaissance et d’intérêt pour le Québec commence à paraître.
Certes, tout le monde peut se tromper dans un nom. Nathalie Provost s’est fait rebaptiser «Nathalie Pronovost», mais d’appeler la tuerie de la Polytechnique «tuerie de Concordia» était d’une grande maladresse.
Il ne suffit pas de lire la note de breffage, il faut prendre le temps de comprendre l’importance de cet événement dans l’histoire du Québec. «Mais le pauvre! Il s’est retrouvé précipité dans une campagne! Il n’a pas le temps de prendre connaissance de tous les détails!».
Un manque de sensibilité, diriez-vous? On avait déjà des petits drapeaux qui se levaient quand il a nommé son conseil des ministres: pas de ministre de la Condition féminine, pas de ministre des Langues officielles. «Mais il faut comprendre! Nous sommes en guerre (commerciale)! Il doit prioriser!».
Malgré une semaine ardue, le PLC se maintient pour le moment dans les sondages d’intention de vote, menant sur les conservateurs par quelques points.
À VOIR AUSSI | Paradis fiscal et bourde sur Polytechnique: François-Philippe Champagne se porte à la défense de Mark Carney
Mercredi, la nouvelle tombe : Trump imposera des tarifs de 25 % sur l’importation d’automobiles. Le jour même où le PLC annonce des mesures pour l’industrie automobile ! Pas de chance. Ou alors… petit coup de chance ? Je n’insinue pas que Mark Carney souhaitait ces tarifs, mais il faut avouer que ça lui a permis de reprendre son souffle avant de recommencer sa campagne.
Ayant travaillé comme consultante, je ne peux m’empêcher de faire le parallèle : nous sommes en gestion de crise. Lorsqu’une crise survient au sein d’une organisation, il n’est pas rare que nous fassions appel à un consultant, un expert en gestion de crise. Souvent, cette personne ou cette équipe débarque un peu de nulle part. Ils se disent spécialistes de ce genre de situation, ils connaissent ça, ils inspirent rapidement confiance même s’ils n’ont pas d’attachement particulier ou d’historique avec l’organisation, et même s’il n’a pas toujours mis son expertise au service de la veuve et de l’orphelin par le passé.
Est-ce que le Canada est en train de s’embaucher un consultant en gestion de crise en la personne de Mark Carney ? Et à ce titre, est-ce notamment pour ça que les électeurs passent outre sa faiblesse en français, ses écarts de conduite dans les Bermudes ou son manque de sensibilité sur certains enjeux? Après tout, on le paie pour faire UNE job : négocier avec Trump. Tant pis pour le reste.
Certes, les choses peuvent changer rapidement. Mais peut-être pas aussi rapidement que le souhaiterait Pierre Poilievre. Le fait que Mark Carney ait l’opportunité de jouer son rôle de premier ministre dans un contexte où la crise avec les États-Unis ne prend pas de pause, ce n’est vraiment pas de la tarte de tirer son épingle du jeu. Même chose pour le Bloc québécois. Ce dernier peut néanmoins compter sur une partie de l’électorat québécois qui n’aime ni Mark ni Pierre. Mais malheureusement pour les bloquistes, il semble que pas mal de gens se forcent pour aimer un peu Mark, l’instant d’une crise.
Pour recevoir toutes les chroniques d'Antonine Yaccarini, abonnez-vous à notre infolettre, Les débatteurs du samedi.