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International

Corée du Sud: l'opposition amorce une procédure de destitution visant le président

Mardi soir, Yoon Suk Yeol a brusquement imposé la loi martiale d'urgence, promettant d'éliminer les forces «anti-État» après avoir lutté pour faire avancer son programme au parlement, dominé par l'opposition.

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Associated Press
Associated Press

Les partis d’opposition en Corée du Sud ont présenté mercredi une motion de destitution visant le président Yoon Suk Yeol, en réponse à sa décision d'invoquer brièvement la loi martiale, mardi. Le recours à la loi martiale a poussé des troupes lourdement armées à encercler le Parlement, forçant les élus à escalader les murs pour rentrer dans le bâtiment.

La destitution de M. Yoon nécessiterait le soutien des deux tiers du Parlement, ainsi que l'appui d'au moins six juges de la Cour constitutionnelle, qui compte neuf membres. La motion, présentée conjointement par le principal parti d’opposition, le Parti démocrate, et cinq autres plus petits partis, pourrait être mise au vote dès vendredi.

Les principaux conseillers politiques de M. Yoon et le ministre de la Défense, Kim Yong Hyun, ont proposé de démissionner. Le Parti démocrate a présenté une motion distincte pour destituer M. Kim, qui, selon ses informations, a recommandé à M. Yoon d'invoquer la loi martiale.

Dans son discours annonçant l'ordre brutal, M. Yoon a promis d'éliminer les forces «antiétatiques» du pays. Il s'est engagé à continuer de critiquer les tentatives du Parti démocrate de destituer des responsables clés du gouvernement et des procureurs de haut rang.

La loi martiale n'a toutefois été en vigueur qu'environ six heures, le Parlement ayant voté pour annuler la décision de M. Yoon avant que son cabinet ne la lève officiellement.

Le Parti démocrate, qui détient la majorité au Parlement, a déclaré que ses législateurs avaient décidé d'appeler M. Yoon à démissionner immédiatement, sous menace de prendre des mesures pour le destituer.

«La déclaration de la loi martiale du président Yoon Suk Yeol était une violation claire de la constitution. Il n'a respecté aucune des exigences pour l'invoquer», peut-on lire dans un communiqué du parti.

«C'était un acte de rébellion grave et il s'agit d'un motif parfait pour sa destitution.»

Que se passera-t-il si le président est destitué?

Pour destituer M. Yoon, il faudra le soutien de 200 des 300 membres de l'Assemblée nationale. Le Parti démocrate et d'autres partis d'opposition détiennent ensemble 192 sièges. Cependant, lors du vote sur la loi martiale, 18 membres du parti de M. Yoon, le Parti du pouvoir populaire, ont voté contre la décision du président.

Selon Cho Jinman, qui enseigne à l'Université Duksung de Séoul, il est très probable que les législateurs soutiennent la motion de destitution, étant donné que certains membres du parti au pouvoir ont déjà voté contre son décret.

Si M. Yoon est destitué, il sera déchu de ses pouvoirs constitutionnels jusqu'à ce que la Cour constitutionnelle statue. Le premier ministre Han Duck Soo assumerait alors les responsabilités présidentielles.

La Cour constitutionnelle ne compte actuellement que six juges en exercice, après trois départs à la retraite. Cela signifie que tous les six devront approuver la motion de destitution éventuelle pour qu’elle aboutisse.

La décision de M. Yoon d'invoquer la loi martiale, une première en plus de 40 ans, évoque le souvenir des gouvernements sud-coréens soutenus par l’armée, lorsque les autorités ont parfois proclamé la loi martiale et d’autres décrets qui leur permettaient de stationner des soldats et des véhicules blindés dans les rues ou dans des lieux publics pour empêcher les manifestations antigouvernementales.

De telles scènes d’intervention militaire n’avaient pas été vues depuis que la Corée du Sud a accédé à la démocratie, à la fin des années 1980.

Des heures dramatiques au Parlement

Après l'entrée en vigueur de la loi martiale, des soldats portant un équipement de combat complet, y compris des fusils d'assaut, ont tenté d'éloigner les manifestants de l'Assemblée nationale, alors que des hélicoptères militaires atterrissaient à proximité. Un soldat a pointé son fusil d'assaut sur une femme qui se trouvait parmi les manifestants exigeant la levée de la loi martiale.

On ne sait pas exactement comment les 190 législateurs ont pu entrer dans une salle parlementaire pour voter contre le décret de M. Yoon. Le chef de l'opposition, Lee Jae Myung, et le président de l'Assemblée nationale, Woo Won Shik, ont été aperçus alors qu'ils escaladaient des murs.

Aucune violence majeure n'a été signalée. Les soldats et le personnel de police ont été vus plus tard quittant l'enceinte de l'Assemblée nationale après le vote parlementaire réclamant la levée de la loi martiale.

Décision controversée

En vertu de la constitution sud-coréenne, le président peut décréter la loi martiale en cas de «guerre, de situations de guerre ou d’autres états d’urgence nationaux comparables» qui nécessitent le recours à la force militaire pour restreindre la liberté de presse, de rassemblement et d’autres droits afin de maintenir l’ordre. De nombreux observateurs se demandent si la Corée du Sud se trouve actuellement dans un tel état.

La constitution stipule également que le président doit obtempérer lorsque l’Assemblée nationale exige la levée de la loi martiale par un vote majoritaire.

Un responsable présidentiel a déclaré que M. Yoon avait décidé d’imposer la loi martiale pour résoudre une impasse politique et qu’il l’avait fait au milieu de la nuit pour minimiser ses impacts négatifs sur l’économie. Le responsable a requis l’anonymat pour discuter de la nature sensible de la question. 

Certains experts estiment que M. Yoon a violé la constitution dans la manière dont il a imposé la loi martiale.

Alors que la loi martiale autorise des «mesures spéciales» pour restreindre les libertés individuelles et l’autorité des agences et des tribunaux, la constitution ne permet pas de restreindre les fonctions du Parlement. Mais lors de l'imposition de la loi martiale, l’armée a proclamé que les activités parlementaires étaient suspendues et a déployé des troupes pour tenter d’empêcher les législateurs d’entrer à l’Assemblée nationale.

À Washington, la Maison-Blanche a soutenu que les États-Unis étaient «sérieusement préoccupés» par les événements. Un porte-parole du Conseil de sécurité nationale a fait savoir que l’administration du président Joe Biden n’avait pas été informée à l’avance de l'imposition de la loi martiale.

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Associated Press
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