Début du contenu principal.
C'est un retour historique.
Donald Trump a été élu mercredi 47e président des États-Unis, un retour extraordinaire pour un ex-président qui a refusé d’accepter la défaite il y a quatre ans, a déclenché une violente insurrection au Capitole, a été reconnu coupable de crimes et a survécu à deux tentatives d’assassinat.
Avec sa victoire dans le Wisconsin, M. Trump a franchi le cap des 270 grands électeurs nécessaires pour décrocher la présidence. Il a remporté le Michigan mercredi après-midi, balayant le «mur bleu» avec la Pennsylvanie – les États clés autrefois démocrates qui ont tous voté pour M. Trump en 2016 avant de basculer vers le président Joe Biden en 2020.
Sa rivale démocrate, la vice-présidente Kamala Harris, l’a appelé mercredi après-midi pour le féliciter. Peu de temps après, M. Biden a fait la même chose et l’a invité à la Maison-Blanche, donnant ainsi officiellement le coup d’envoi de la transition avant le jour de l’investiture.
Des dirigeants étrangers ont également appelé M. Trump, notamment le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, et le président français, Emmanuel Macron.
Cette victoire valide sa vision intransigeante de la politique. Au cours de la campagne, il a attaqué Mme Harris en des termes profondément personnels – souvent misogynes et racistes – tout en promouvant une image apocalyptique d’un pays envahi par des migrants violents.
À VOIR AUSSI | Trump revendique la victoire devant ses partisans
Sa rhétorique grossière, associée à une image d’hypermasculinité, a trouvé un écho auprès des électeurs en colère – en particulier des hommes – dans une nation profondément polarisée.
Pour son deuxième mandat en tant que président, il s’est engagé à poursuivre un programme centré sur la refonte radicale du gouvernement fédéral et la poursuite de représailles contre ses ennemis. S’adressant à ses partisans depuis la Floride, tôt mercredi, M. Trump a affirmé avoir remporté «un mandat sans précédent et puissant».
État après État, M. Trump a fait mieux que ce qu'il avait fait lors de l'élection de 2020, tandis que Mme Harris n'a pas réussi à faire aussi bien que Joe Biden lorsqu'il a remporté la présidence il y a quatre ans.
Lorsqu'il reprendra le pouvoir, M. Trump travaillera avec un Sénat qui sera désormais aux mains des républicains, alors que le contrôle de la Chambre des représentants n'a pas encore été déterminé.
«Nous avons traversé tant d'épreuves ensemble, et aujourd'hui, vous êtes venus en nombre record pour remporter une victoire, a mentionné M. Trump. C'est quelque chose de spécial et nous allons vous rendre la pareille.»
Les marchés boursiers américains, la compagnie Tesla d’Elon Musk, les banques et le bitcoin ont tous grimpé en flèche mercredi, les investisseurs envisageant favorablement une élection sans heurts et le retour de M. Trump à la Maison-Blanche.
Ce résultat couronne une campagne électorale tumultueuse et compétitive au possible, qui a été marquée par deux tentatives d’assassinat visant M. Trump et un changement de candidat dans le camp démocrate à peine un mois avant la convention du parti.
M. Trump héritera d’une série de défis lorsqu’il prendra ses fonctions, le 20 janvier prochain, notamment une polarisation politique accrue et des crises mondiales qui mettent à l’épreuve l’influence des États-Unis à l’étranger.
Sa victoire contre Mme Harris, la première femme noire à diriger un grand parti, marque la deuxième fois qu’il bat une rivale féminine lors d’une élection présidentielle. En 2016, il avait défait Hillary Clinton.
Mme Harris, l’actuelle vice-présidente, a pris les rênes de la campagne démocrate lorsque M. Biden a quitté la course dans la foulée d'inquiétudes suscitées par son âge.
Malgré une poussée d’énergie initiale autour de sa campagne, elle a eu du mal à convaincre les électeurs désillusionnés qu’elle représentait une rupture avec l'administration impopulaire de M. Biden.
Donald Trump devient le premier ancien président à revenir au pouvoir depuis Grover Cleveland en 1892. Il est le premier président à avoir été condamné pour un crime et, à 78 ans, il est le plus âgé à être élu à ce poste. Son vice-président, le sénateur de l’Ohio JD Vance, âgé de 40 ans, deviendra le membre le plus haut placé de la génération du millénaire au sein du gouvernement américain.
M. Trump sera beaucoup moins soumis à des contrôles lorsqu’il reviendra à la Maison-Blanche. Il a l’intention de mettre en œuvre rapidement un programme de grande envergure qui transformerait presque tous les aspects du gouvernement fédéral américain.
Ses anciens détracteurs républicains au Congrès ont été en grande partie battus ou ont pris leur retraite. Les tribunaux fédéraux sont désormais remplis de juges qu'il a nommés. La Cour suprême des États-Unis, qui comprend trois juges nommés par M. Trump, a rendu une décision accordant aux présidents une large immunité contre les poursuites.
À VOIR AUSSI | Élection: des Américains inquiets des débordements après les résultats
Le langage et le comportement de M. Trump pendant la campagne ont poussé de nombreux démocrates, de même que certains républicains, à prévenir que son retour à la Maison-Blanche pourrait causer un choc à la démocratie.
Il a fait l’éloge de dirigeants autoritaires, a prévenu qu’il déploierait l’armée pour cibler ses opposants politiques – qu’il qualifie d’«ennemis de l’intérieur» –, a menacé de prendre des mesures contre les médias en cas de couverture défavorable et a suggéré de suspendre la Constitution.
Certains de ceux qui ont servi à la Maison-Blanche, dont le vice-président Mike Pence et John Kelly, le chef de cabinet de M. Trump le plus longtemps en poste, avaient refusé de le soutenir ou lancé de terribles avertissements publics concernant son retour.
Alors que Mme Harris a concentré une grande partie de son message sur des thèmes positifs, M. Trump a canalisé un puissant sentiment de colère et de ressentiment parmi les électeurs.
Il a profité des frustrations liées aux prix élevés et des craintes concernant la criminalité et les migrants entrés illégalement dans le pays sous l'administration de M. Biden. Il a également utilisé les guerres au Moyen-Orient et l’invasion de l’Ukraine par la Russie pour démontrer que le monde est en proie au chaos sous les démocrates.
C’est une formule que M. Trump a perfectionnée en 2016, lorsqu’il s’est présenté comme la seule personne capable de résoudre les problèmes du pays.
«En 2016, j’ai déclaré que je suis votre voix. Aujourd’hui, j’ajoute: je suis votre guerrier. Je suis votre justice. Et pour ceux qui ont été lésés et trahis, je suis votre châtiment», a-t-il déclaré en mars 2023.
À VOIR AUSSI | La campagne électorale américaine résumée en moins de 3 minutes
Cette campagne a souvent viré à l’absurde, M. Trump amplifiant des rumeurs bizarres et démenties selon lesquelles des migrants volaient et mangeaient des chats et des chiens de compagnie dans une ville de l’Ohio. Il a aussi donné le coup d’envoi d’un rassemblement en faisant l’éloge des organes génitaux du légendaire golfeur Arnold Palmer.
Mais le moment décisif a peut-être eu lieu en juillet, lorsqu’un homme armé a ouvert le feu lors d’un rassemblement de M. Trump à Butler, en Pennsylvanie. Une balle a effleuré l’oreille de M. Trump et tué l’un de ses partisans. Le visage maculé de sang, M. Trump s’est levé et a levé le poing en l’air en encourageant ses partisans à se battre.
Des semaines plus tard, une deuxième tentative d’assassinat a été déjouée, lorsqu’un agent des services secrets a repéré le canon d’une arme à feu qui dépassait d'un buisson alors que M. Trump jouait au golf.
Le retour de M. Trump à la Maison-Blanche semblait peu probable lorsqu’il a quitté Washington, en 2021, en tant que personnage diminué dont les mensonges sur sa défaite ont déclenché une violente insurrection au Capitole américain.
Les démocrates, qui contrôlaient la Chambre des représentants, l’ont rapidement mis en accusation pour son rôle dans l’insurrection, faisant de lui le seul président à avoir été mis en accusation deux fois. Il a été acquitté par le Sénat, où de nombreux républicains ont fait valoir qu’il ne représentait plus une menace parce qu’il avait quitté ses fonctions.
Mais depuis sa station balnéaire de Mar-a-Lago en Floride, M. Trump – aidé par certains républicains élus – s’est efforcé de maintenir sa pertinence politique.
À l’approche des élections de mi-mandat, en 2022, M. Trump a utilisé son influence pour s’affirmer comme le leader incontesté du parti. Ses candidats ont presque toujours remporté leurs primaires, mais certains ont été défaits lors d’élections que les républicains considéraient comme à leur portée.
Si l’avenir de M. Trump était incertain, le portrait a changé en 2023 lorsqu’il a dû faire face à une vague d’inculpations au niveau des États et au niveau fédéral pour son rôle dans l’insurrection, sa gestion d’informations classifiées et son ingérence électorale.
Il a utilisé ces accusations pour se présenter comme la victime d’un gouvernement zélé, un argument qui a trouvé un écho auprès d’une base républicaine de plus en plus sceptique – voire carrément hostile – aux institutions et aux structures de pouvoir établies.
M. Trump a facilement remporté la nomination de son parti, sans jamais participer à un débat contre les autres candidats républicains.
En mai, M. Trump a été reconnu coupable à New York de 34 chefs d’accusation pour un projet visant à influencer illégalement l’élection de 2016 en versant de l’argent à une actrice de films pour adultes. Il risque d’être condamné plus tard ce mois-ci, mais sa victoire pose de sérieuses questions quant à savoir s’il sera un jour puni.
Il a également été reconnu coupable dans deux autres affaires civiles à New York: l’une pour avoir gonflé ses actifs et l’autre pour avoir abusé sexuellement de la chroniqueuse E. Jean Carroll en 1996.
M. Trump fait l’objet d’accusations criminelles supplémentaires dans une affaire d’ingérence électorale en Géorgie qui s’est enlisée. Au niveau fédéral, il a été inculpé pour son rôle dans la tentative d’annuler les résultats de l’élection de 2020 et pour avoir mal géré des documents classifiés. Lorsqu’il deviendra président, le 20 janvier, M. Trump pourrait nommer un procureur général qui retirerait les accusations fédérales.
À son arrivée à Washington en 2017, M. Trump ne connaissait pas grand-chose aux leviers du pouvoir fédéral. Son programme a été contrecarré par le Congrès et les tribunaux, ainsi que par des membres de haut rang de son personnel qui ont pris sur eux de servir de garde-fous.
Cette fois, M. Trump a déclaré qu'il s'entourerait de fidèles qui appliqueront son programme, sans poser de questions, et qui arriveront avec des centaines de projets de décrets, de propositions législatives et de documents politiques approfondis en main.