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Selon l’expert en commerce de détail et en sciences de la consommation Carl Boutet, l’engouement pour le Black Friday est à la baisse dans la province, mais les commerçants «seront plus motivés [qu’en 2021]».
Vendredi fou, Cyber lundi, Boxing Day: lors de ces événements promotionnels, les Québécois sont censés bénéficier de plusieurs offres afin d’économiser sur leurs achats du temps des Fêtes.
En 2022, des experts s’attendent à ce que cette vague d’offres techniquement alléchantes soit plus spéciale que les précédentes, et ce, en raison de la hausse du taux d’inflation et de l’arrivée d’une potentielle récession.
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Certains se ruent dans les commerces à la recherche de la bonne affaire pour des produits de tout acabit, mais le jeu du Vendredi fou en vaut-il vraiment la chandelle pour le consommateur? Quelles sont les stratégies des entreprises afin d’engendrer des profits lors de ces fêtes? Se cache-t-il quelque chose derrière ces rabais censément hallucinants?
Explications.
Selon l’expert en commerce de détail et en sciences de la consommation Carl Boutet, l’engouement pour le Black Friday est à la baisse dans la province, mais les commerçants «seront plus motivés [qu’en 2021], parce qu’il y a beaucoup d’opportunités avec tous les inventaires qu’ils ont en stock», après avoir souffert de problèmes d’approvisionnement pendant des mois.
«Tout est un peu décalé. La bonne nouvelle, c’est qu’il devrait y avoir de très bons rabais», a noté le stratège en chef chez Studio RX lors d’un entretien avec Noovo Info.
Maryse Côté-Hamel, professeure en sciences de la consommation à l’Université Laval, affirme que le Vendredi fou sera en effet plus attrayant que les autres événements promotionnels du temps des Fêtes, notamment grâce à sa diversité des choix offerts aux consommateurs. Plusieurs magasins sont aux prises avec des produits qu’ils n’ont pas réussi à vendre et qu’ils doivent écouler.
«Il y a des problématiques d’approvisionnement et ça crée une pression auprès des consommateurs qui se disaient: “Je ne l’achèterai pas maintenant, je vais attendre plus tard, il va finir par être en rabais et il va en rester encore.” Maintenant, on se demande s’il va en rester plus tard», a-t-elle expliqué en entrevue.
«On a la possibilité d’avoir le produit qu’on veut ou qu’on veut donner à quelqu’un à Noël. Donc, c’est sûr que ça crée une pression sur pour le consommateur.»
Mme Côté-Hamel mentionne que, rabais ou non, les consommateurs voudront acheter davantage de produits en novembre et en décembre que lors des autres 10 mois de l’année. Alors, pourquoi offrir tout de même des rabais?
«C’est une façon d’attirer l’attention des consommateurs pour qu’ils se tournent vers eux pour visiter le commerce en personne ou encore pour regarder en ligne», avance-t-elle.
Des entreprises tentent, d’année en année, de séduire les Québécois avec des publicités affichant des prix qui se veulent compétitifs, d’où ces articles à moitié prix ou à 75% de rabais, par exemple.
Amazon dit offrir des télévisions ainsi que des matelas «jusqu’à 50% de rabais» sur la page d’accueil de son site web. Du côté de Walmart, les acheteurs profiteront d’offres plus importantes pour les jouets pour enfants et les jeux vidéo. Il est également possible de se procurer une machine à café à 88$, dont le prix régulier affiché est de 149,96$.
Source: Walmart
«Dans la réalité, ce sont seulement quelques articles qui vont être offerts à des prix aussi bas ou, du moins avec des rabais aussi importants», démystifie Mme Côté-Hamel. «Et souvent, ce sont des produits que [les commerçants] veulent écouler. Donc, la majorité des produits à ce moment de la saison vont être à prix régulier ou avec des rabais minimes de 10-15%.»
Il y aurait donc une part de psychologie dans tout ça.
«Les gros rabais ne seront pas sur les gros produits de la saison, ni sur les produits où il y a un engouement réel chez les consommateurs, parce que s'il y a un réel engouement chez les consommateurs, ils vont aller l’obtenir peu importe le rabais. Il n’y a pas d’incitatif à offrir des rabais dessus, ça coupe dans leurs marges.»
La professeure en sciences de la consommation mentionne que certains commerces vont créer des événements (musique, concours, etc.) à l’intérieur de ses boutiques dans le but de créer un réel engouement auprès des consommateurs et créer un achalandage. Certains commerces iront même jusqu’à vendre quelques produits sous le prix coûtant en boutique exclusivement, souligne-t-elle.
«On sait qu’une fois à l’intérieur [les consommateurs] vont se promener et, en se promenant, ils sont plus susceptibles d’acheter des produits qui ne sont pas forcément à rabais ou dont ils n’avaient pas absolument besoin et qui n’étaient pas la raison de leur déplacement.»
De son côté, Carl Boutet avance que des commerces prévoient et ciblent d’avance certains produits en boutique dans le but de créer un engouement en boutique.
«Ça peut être des produits qui ont des problèmes de qualité. Un manteau qui a une couture un peu de travers, on peut vous le vendre beaucoup moins cher pour cette occasion et créer cet engouement-là en magasin», dit-il. «Chaque catégorie va avoir ses produits [à rabais], que ce soit dans les bijoux, dans le linge, dans l’électroménager, les meubles, etc. Il y a plein de produits qu’ils vont vouloir mettre de l’avant, soit parce qu’ils en ont trop en inventaire, surtout cette année.»
De plus, le Black Friday peut mener à des achats impulsifs, alors que différents facteurs peuvent altérer le jugement d’un consommateur lors de cette grande période de célébrations, selon Mme Côté-Hamel.
«Quand il y a trop de monde, c’est vraiment difficile de se concentrer. On manque de place, on manque de concentration. Il y a de la musique ou du bruit et tout ça nuit à une prise de décision de consommation réfléchie.»
La professeure indique que les nombreuses décorations engendre un manque de concentration chez le consommateur, qui vient la plupart du temps accompagné.
«Quand on est fatigué ou moins alerte, on est encore plus susceptible d’acheter des produits qu’on n’était pas supposé d’acheter ou de prendre des décisions moins optimales.»
En vue du Vendredi fou, l’avocate et conseillère juridique chez Option consommateurs, Sara Eve Levac, énumère quelques conseils afin de permettre à plusieurs Québécois d’économiser lors de ces grandes périodes de rabais, qui peuvent créer un endettement auprès de certaines personnes moins averties.
«Un truc que les consommateurs peuvent garder durant l’année, c’est de vérifier le prix au courant, vérifier auprès de différents commerçants les prix affichés, parce que ça peut différer d’un commerçant à l’autre»
Statistique Canada a d’ailleurs rapporté en septembre que la dette des ménages a augmenté lors du deuxième trimestre.
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«Gardez en tête de faire un budget quand on veut profiter des rabais pour éviter de dépenser au-dessus de nos moyens. Parfois, faire des achats avec de l’argent comptant permet de mieux garder la trace des dépenses qu’on fait», ajoute Mme Levac.
Certains consommateurs peuvent également tomber dans le piège de payer un produit en plusieurs versements malgré le fait qu’ils n’ont pas les moyens de payer les intérêts sur leur carte de crédit.
«Si on voit des rabais alléchants, on peut être intéressé à faire des achats impulsifs et par la suite voir son endettement augmenter si on paye par carte de crédit et par des paiements différés. Ça peut être l’une des conséquences d’aller vers les rabais pendant la période du Vendredi fou», conclut-elle.