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C’est fini les tournées, c’est fini le beau moment où on connectait avec notre idole sur la scène durant deux heures. L’industrie est en crise.
À quand remonte la dernière fois que vous avez acheté un billet pour un spectacle ? Avant la pandémie ? Durant la pandémie ou après ? Avez-vous vendu vos billets, décidez de ne pas aller au dit-spectacle parce que ça ne vous tentait plus ? Ou parce que trop cher ?
Avez-vous essayé récemment d’acheter un billet de spectacle pour un artiste que vous adorez pour vous rendre compte que ça allait vous coûter 100 $ dans une salle aussi banale que le MTelus (feu Metropolis) ? Est-ce qu’un spectacle pour lequel vous étiez excité et que vous attendiez depuis 3 ans s’est fait annuler sans aucune nouvelle date au calendrier ?
Bienvenue dans la nouvelle réalité de l’industrie musicale. Celle où les spectacles, principale source de revenus des artistes avant la pandémie, ne leur rapportent plus rien du tout. À tel point que certains d’entre eux, devant les coûts faramineux engendrés par une tournée, décident de ne plus le faire. C’est fini les tournées, c’est fini le beau moment où on connectait avec notre idole sur la scène durant deux heures. L’industrie est en crise. Oui, encore et toujours, je sais.
J’ai assisté à plusieurs spectacles récemment. Ce sont des billets vendus souvent à 50 $ que j’ai acheté en avance, la journée de la vente ou en prévente. Quand j’en parle avec des amis, ceux-ci voulant m’accompagner, se retrouvent face au même billet qui maintenant coûte (roulements de tambour) 150 $. Un petit rire jaune souvent accompagne la découverte du prix exorbitant. 150 $ ? Vraiment ? Il y a 2 ans, on allait voir le show du même artiste pour 30 $.
Oui, bien, avant. C’était avant la pandémie, avant le monopole Ticketmaster, avant l’inflation, avant la pénurie de la main-d’œuvre et sa rareté. Avant que les artistes se sentent au bout du rouleau, au bout de l’épuisement, à court de ressources. Puis, je ne parle pas de petits artistes locaux, non. Je parle d’Animal Collective, Santigold, Little Simz, Metronomy, Regina Spektor… des artistes qui sont vénérés et qui attirent les foules. Imaginez si eux trouvent que c’est dur, comment nos artistes peuvent partir en tournée.
Ils ne peuvent tout simplement pas. Rollie Pemberton alias Cadence Weapon, gagnant du Polaris 2021, a publié une lettre ouverte, un cri du cœur, qui parle de son expérience personnelle. Après une pandémie difficile, il a dû dépenser plus de 20 000 $ de sa propre poche en tournée. Et ça ne s’arrête pas là. Tess Roby, une artiste indépendante de Montréal, parle ouvertement du manque de ressources pour ses tournées sur Twitter. Les tournées ne sont plus lucratives. Aujourd’hui, elles ne favorisent que les artistes déjà riches qui demandent des prix exorbitants pour leurs billets, billets que la masse de fans ne peut pas se permettre. Et à travers tout ça, entre la fermeture des plus petites salles de spectacles (que j’ai déjà abordé), les faibles marges de profits sur les écoutes sur les plate-formes de streaming, la fin de la diffusion de leur musique sur les plateformes profitables (allô Sirius XM !), que reste-t-il ?
Je n’aime pas être négative, mais la situation actuelle n’avantage personne. Un artiste qui ne fait pas de tournée ne fait pas connaître sa musique, n’a pas de nouveaux fans, se retrouve pris un peu dans une bulle. Et si un artiste ne réussit pas à faire de tournée, la culture s’exporte difficilement. Or, nous savons tous que pour qu’une culture rayonne, elle doit s’exporter ! Elle doit connecter en vrai. Rien n’est plus beau que de voir une foule chanter les paroles d’une chanson en chœur avec un artiste. Une fois le spectacle terminé, cette foule repart des étoiles dans les yeux et une envie de parler de son expérience, de prêcher à son entourage la grandeur de son artiste préféré !
Je ne sais pas pour vous, mais moi, un spectacle d’un artiste que j’aime, c’est plus fort que d’aller à la messe à Noël ! Et si les prix grimpent, que les artistes ne le font plus, il y a fort à parier que cette masse de croyants perdra foi en son prophète musicien — et excusez-moi pour mes analogies religieuses.
J’ai mal à ma culture. J’ai mal à ma musique. J’ai mal à ma foi qui autrefois était inébranlable face à l’expérience si personnelle et si universelle d’être dans un show, à connecter avec d’autres fans, à donner de mon temps et de mon argent pour que quelqu’un continue de me faire du bien à l’âme avec son art. On ne peut pas laisser la musique devenir seulement un passe-temps de riches !
Mais surtout, je ne peux plus écrire des chroniques négatives chaque semaine sur cette industrie que j’adore. Ça me rend déprimée, ça m’inquiète, ça me fait perdre foi.
Et je peux comprendre que les artistes, les musiciens, décident de mettre fin à la grand-messe.
Amen.