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Le CELIAPP s’en vient. Si vous n’en avez pas entendu parler, c’est que vous êtes vraiment sur une autre planète fiscale.
Le Compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété (CELIAPP) s’en vient. Si vous n’en avez pas entendu parler, c’est que vous êtes vraiment sur une autre planète fiscale.
On passe d’une promesse électorale improvisée sur le coin d’une table pour acheter des votes (ou pour « aider les Canadiens et Canadiennes ») à une patate chaude à gérer par les institutions financières. Le 1er avril arrive à grands pas, mais le défi opérationnel amènera l’instauration du CELIAPP à « un moment donné en 2023 ».
Entre le moment de l’annonce et sa mise en place, le CELIAPP a été modifié pour tenir compte de certains «ce n’est pas comme ça que ça avait été pensé». Qu’à cela ne tienne, mon cœur balance entre un sentiment d’opportunité fiscale et la révolte.
D’un côté, je me dis que la facture fiscale des jeunes adultes pourrait significativement baisser : un no brainer. D’un autre, cet outil demeure tellement inéquitable pour ceux qui n’auront pas le droit d’y cotiser ou n’ayant pas les liquidités pour le faire.
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Appelons un chat un chat. Le CELIAPP favorisera les contribuables avec des revenus et des actifs importants en donnant une échappatoire fiscale inégalée. Les familles nanties comprennent déjà ce qui se passe. Contrairement au REER, il n’y aura aucun impôt au retrait d’un CELIAPP si on achète une propriété. C’est littéralement une goutte de plus dans le vase de la distorsion fiscale. On ne parle plus de report de l’impôt : on parle de son annulation pure et simple.
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On va swingner l’actif du REEE dans le CELIAPP éventuellement. L’enfant adulte aura une déduction latente qu’il pourra utiliser au moment fiscal le plus opportun. En somme, on vient de dire aux Canadiens : « Si vous achetez une maison, vous méritez d’éviter l’impôt sur 40 000 $ de revenus et sur le rendement des placements ». Pendant que certains Canadiens vont hésiter annuellement entre contribuer au REER, au CELI, au CELIAPP et au REEE, les familles les mieux nanties vont ramasser tout ça en créant à leur progéniture un abri fiscal immense. D’ailleurs, n’oublions pas que le CELIAPP sert à financer une résidence éligible à l’exemption de gain en capital sur résidence principale : un abri fiscal pour en financer un autre.
Maintenant que la folie fiscale est amplement soulignée, il faut quand même se préparer à l’arrivée de l’outil pour les contribuables qui pourront en profiter aux dépens des autres (vive la fiscalité…) Voici quelques réflexions parmi tant d’autres sur le sujet.
On aura jusqu’au 31 décembre de l’année 15e anniversaire de la date d’ouverture du CELIAPP pour exercer le droit au retrait sans impôt (sauf évidemment si on atteint 71 ans avant cette période). Pour l’instant, ce n’est pas un enjeu. Par contre, quand un contribuable arrivera près de la date d’échéance, il y aura un questionnement : est-ce qu’on se presse d’acheter une résidence pour profiter de l’avantage fiscal ou on ajoute la somme à son REER ou son FERR ?
Comme on a plusieurs années pour cotiser pleinement à son CELIAPP, il ne faut pas oublier que le rendement cumulatif aussi sera à l’abri de l’impôt. Imaginons deux personnes qui cotisent au total 80 000 $ sur 5 ans et qui font quelques bons coups dans leurs CELIAPP. Ça pourrait donner une belle mise de fonds cumulative.
En début de carrière, on a parfois un taux d’imposition marginal « raisonnable ». Pas de problème, on aura le droit de cotiser en reportant la déduction. Ça représente tout un avantage de pouvoir non seulement éviter l’impôt sur une portion de ses revenus, mais aussi de choisir le moment où c’est fiscalement logique de le faire :
« Un particulier ne serait pas tenu de demander une déduction pour l’année d’imposition au cours de laquelle une cotisation est versée. À l’instar des déductions pour REER, ces montants pourraient être reportés indéfiniment et déduits au cours d’une année d’imposition ultérieure. »
Pour plusieurs, c’est déjà complexe de parler de fiscalité, de financement ou de séparation des dépenses dans une relation amoureuse. Voilà que le CELIAPP ajoute une couche de complexité fiscale à l’entente entre les conjoints.
Prenons l’exemple où vous tombez en amour avec un conjoint qui est déjà propriétaire d’une résidence. La règle dit que pour ouvrir un CELIAPP, il faut être un éventuel acheteur « d’une première habitation, c’est-à-dire que ni vous-même ni votre époux ou conjoint de fait (conjoint) ne pouvez avoir possédé d’habitation admissible à titre de résidence principale au cours de l’année de l’ouverture du compte ni des quatre années civiles précédentes. »
En français, ça veut dire qu’il y a potentiellement une conséquence importante à trouver l’amour. Imaginez. Vous n’avez pas encore de CELIAPP et vous tombez en amour avec une personne qui possède déjà son condo. Il est donc important d’ouvrir le CELIAPP au plus vite, même si on n’est pas prêt à être en relation ou à acheter une résidence. Le CELIAPP est aussi une question de timing et de planification.
Est-ce que l’amour nuira à certains dans l’accès à un CELIAPP en temps opportun ? Affirmatif. Le hasard de la vie amoureuse créera des situations pénalisantes.
La question demeure : la perte du droit au CELIAPP entrera-t-elle dans un calcul éventuel de compensation financière entre conjoints ? Je t’aime donc tu me nuis ?
Une autre jambette à la vie amoureuse complexe d’aujourd’hui.
Le CELIAPP sera « la personnalité de l’année 2023 » dans le monde des finances personnelles. On aura beaucoup à dire et à écrire. Des stratagèmes seront proposés pour optimiser sa fiscalité et sa vie en lien avec ce nouvel outil.
Chose certaine, si vous avez plus de 18 ans que vous êtes admissible à l’ouverture du CELIAPP, il est temps vous intéresser solidement à ce que ça pourrait changer dans votre vie. Si j’étais plus jeune, j’en ferais une obsession financière et fiscale. Négliger les cotisations au CELIAPP, c’est négliger ses chances d’avoir accès à un outil fiscal sans précédent. Négliger le CELIAPP, c’est se moquer de la valeur de son temps au travail : on vous offre sur un plateau d’argent de créer de la valeur sans travailler. Cotisez et vous refilez la facture au reste de la population.
Le CELIAPP, c’est l’opportunité fiscale d’une seule vie.
Vous n’êtes pas convaincus ? Votre cellulaire sonne. Répondez. C’est votre futur qui vous appelle pour vous faire changer d’idée.