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«Aussi grave que soit la situation (en raison) de l'impact direct sur les employés de La Baie, les conséquences sont bien plus vastes.»
Lorsque La Baie d'Hudson fermera la grande majorité de ses magasins en juin, les pertes d'emplois ne concerneront pas uniquement les employés du célèbre détaillant.
Les Canadiens travaillant dans les salons de coiffure, les spas et autres fournisseurs de services situés dans La Baie et ses magasins partenaires Saks Fifth Avenue et Saks Off Fifth risquent de perdre leur emploi, ainsi que le personnel embauché directement par certaines marques pour gérer les rayons beauté, les rayons bijouterie ou les boutiques de mode des magasins.
Les personnes dont les entreprises vendent des marchandises à La Baie et perdent ainsi l'une de leurs principales sources de revenus pourraient également se retrouver sur la sellette, tout comme les 9364 employés du détaillant.
«Aussi grave que soit la situation (en raison) de l'impact direct sur les employés de La Baie, les conséquences sont bien plus vastes», a expliqué Lanita Layton, consultante en luxe et commerce de détail et ancienne vice-présidente chez Holt Renfrew.
Elle et d'autres acteurs du secteur de la vente au détail prévoient un coup dur pour le marché de l'emploi du pays avec la fermeture de 74 magasins La Baie d'Hudson, de deux magasins Saks Fifth Avenue et de 13 Saks Off Fifth en juin, après des mois de liquidation. Le plan de liquidation actuel a permis à six établissements de survivre, mais l'entreprise reste en quête d'une solution de secours.
Mike Purkis, président de Caulfeild Apparel Group, estime que la chute de La Baie d'Hudson entraînera autant de pertes d'emplois à l'extérieur qu'à l'intérieur de l'entreprise.
Sa compagnie, qui possède les marques Joe Boxer, Modern English et Benson, a réduit ses effectifs avant que La Baie d'Hudson ne se place sous la protection de ses créanciers le mois dernier.
«La Baie d'Hudson est en difficulté depuis deux ans. On ne savait pas quand (sa disparition) allait se produire, mais on le prévoyait. Nous avons donc réaligné et recalibré nos activités au cours des 18 derniers mois pour nous protéger autant que possible contre cette situation», a mentionné M. Purkis.
Il ne prévoit pas de nouvelles réductions d'effectifs, mais pense que les entreprises de gestion des stocks seront probablement touchées.
Ces entreprises veillent à ce que les marchandises soient acheminées du quai de chargement aux rayons des magasins et qu'elles soient correctement rangées.
Caulfeild a annulé leurs services dès que les rumeurs de liquidation ont émergé.
«Je suppose qu'ils sont confrontés à une forte baisse d'activité», a avancé M. Purkis.
Il prévoit aussi des pertes d'emplois qui affecteront les personnes qui déneigent les stationnements et les allées, nettoient les vitrines et même gèrent les infrastructures des magasins, comme les escaliers mécaniques et les ascenseurs.
Il y a aussi les entreprises qui comptaient sur le détaillant pour écouler 100 % de leurs marchandises. M. Purkis pense que beaucoup auront du mal à trouver d'autres magasins prêts à stocker leurs marchandises, même si elles peinent à recouvrer leurs pertes auprès de La Baie d'Hudson, dont la liste de créanciers s'étend sur 26 pages et à qui l'on doit collectivement près d'un milliard de dollars.
«Certaines entreprises figurant sur cette liste ne seront probablement plus en activité, a-t-il estimé. Je ne sais pas comment certaines personnes vont gérer un coup aussi important.»
John Nguyen est sûr que son entreprise survivrait à la fermeture de La Baie, mais il a admis que certains employés pourraient ne pas conserver leur emploi.
Le président et chef de la direction de la chaîne de salons Hair Republic exploite quatre établissements, dont un à La Baie d'Hudson au Centre Rideau, à Ottawa, et un autre à Sherway Gardens, le magasin du détaillant à Toronto.
Il ne s'inquiète pas pour le personnel du magasin d'Ottawa, car il peut être transféré dans d'autres établissements Hair Republic en ville, mais il a indiqué que certains employés de soutien seront licenciés.
Il est incertain du sort de ses employés de Toronto, car le salon a une entrée par La Baie et une entrée extérieure. Le propriétaire pourrait donc autoriser le maintien des activités après la fermeture du grand magasin.
Lorsque le personnel demande à quoi s'attendre, il se montre optimiste.
«Surtout en cette période de pénurie de main-d'œuvre, nous ne voulons pas effrayer qui que ce soit et pousser à nous quitter prématurément», a mentionné M. Nguyen.
Dans d'autres entreprises, les travailleurs ont déjà une réponse définitive.
Le conglomérat de produits de beauté Estée Lauder a déclaré à La Presse Canadienne le mois dernier que le personnel ne superviserait plus les comptoirs Mac de La Baie d'Hudson à compter du 31 mai, sans toutefois préciser si les travailleurs étaient mis à pied.
«Nous demeurons profondément engagés envers nos consommateurs et nos employés au Canada et nous effectuerons cette transition avec le plus grand respect et la plus grande attention pour nos équipes», a indiqué Estée Lauder dans un communiqué.
Jeremy Herman, associé au cabinet d'avocats Samfiru Tumarkin LLP, a mentionné avoir reçu jusqu'à 20 employés d'Estée Lauder lui disant qu'ils étaient licenciés par l'entreprise.
Avec Mme Layton, il soupçonne que la même chose pourrait arriver aux travailleurs parfois embauchés par les marques de luxe pour superviser leurs rayons La Baie ou Saks.
«Les boutiques louées se demandent probablement maintenant: "Qu'advient-il de notre personnel?", a souligné Mme Layton. Avec un peu de chance, ils pourront les replacer dans d'autres de leurs magasins, mais là aussi, il y a un risque de perte.»