Début du contenu principal.
Et quand je dis «toute», ça veut dire «toute toute toute».
Et quand je dis «toute», ça veut dire «toute toute toute». Même les petites vidéos boboches sur Pornhub ou autres sites du même genre. Je demande ça parce que récemment, je lisais un article dans un média qui s’interrogeait sur l’éthique de la plateforme depuis son rachat par une entreprise de capital d’investissement d’Ottawa, Ethical Capital Partners.
D’emblée, je dirais qu’il me paraît bien utopique de croire que le modèle d’affaires déployé par PornHub puisse être éthique ou en voie de le devenir un jour, et ce, malgré tous les efforts que va déployer son nouvel acquéreur dans le futur.
Je précise au passage que le terme «pornographie éthique» est contesté par plusieurs chercheurs et spécialistes de la question. Mais il est bon de nous rappeler à nous, simples mortels qui consommons du contenu pour adulte, ce en quoi consiste une porno «plus éthique».
Évidemment, la notion de consentement est la pierre angulaire de tout l’édifice. Vient ensuite la volonté de changer les représentations communes basées uniquement sur le désir masculin (le fameux male gaze) et des conditions de travail dignes afin d’éviter les abus. Parlant d’abus, la rémunération devrait être paritaire et tenir en compte des actes qui sont performés dans les vidéos ou toutes autres formes de matériel.
Mais revenons à Pornhub, qui est l’un des sites pour adultes les plus populaires au monde avec environ 150 000 000 de visiteurs actifs par jour. Si le site se voulait vraiment être éthique, il présenterait uniquement des vidéos qui satisferaient tous les critères énumérés ci-haut. Et ce n’est pas tout, la plateforme s’assurerait d’être éthique dans sa façon d’opérer. C’est là que ça se corse.
Une histoire de «revenge porn» est à l’origine d’un recours collectif de 500 millions contre Pornhub, autrefois propriété de Mindgeek, devenu Aylo dans la foulée de plusieurs révélations scandaleuses concernant le contenu disponible sur la plateforme en 2020. En effet, on y avait découvert des milliers de vidéos téléchargées sans le consentement des protagonistes ainsi que des milliers d’autres mettant en scène des mineurs.
De plus, on apprenait récemment que le FBI avait mené une enquête criminelle sur MindGeek et détiendrait des preuves de sa participation à des transactions financières illégales impliquant les fruits de la traite de personnes. Aylo négocierait présentement avec les procureurs fédéraux américains pour éviter un procès. Éthique, disait-on?
Je ne suis pas contre la vertu, mais je doute fort qu’Ethical Capital Partner parvienne à rendre une plateforme comme PornHub «éthique», considérant que cela exigerait un changement de culture complet.
Oui, l’entreprise de capital d’investissement a posé des gestes concrets en s’engageant notamment à utiliser les procédés de sécurité en ligne les plus récents et les meilleurs disponibles. Mais pour le moment, rappelons que pour accéder au site, il suffit de cocher qu’on a plus de 18 ans. Un autre outil intéressant déployé récemment est lié à la recherche des internautes. Quand un utilisateur cherche du contenu illégal, on le réfère à des ressources en santé mentale. Sauf que ça ne changera pas la face du monde, surtout que cette fonctionnalité n’est même pas disponible en français.
Enfin, et c’est peut-être le plus intéressant, PornHub prétend avoir mis en place une équipe de modération humaine. On parle ici d’un humain qui regarderait chaque vidéo avec le son du début à la fin et non pas une modération par algorithmes. Ne soyons pas dupes. Ça me semble impossible qu’il y ait assez d’employés pour visionner les gigantesques quantités de vidéos disponibles sur la plateforme.
Alors, comment mettre complètement fin à la «revenge porn», à la présence de mineurs dans les vidéos, aux violences sexuelles et à la mise en ligne de contenus qui jouent finement sur la ligne du consentement ? Ça me semble tout simplement impossible. On a créé un monstre. Et le monstre est devenu difficilement contrôlable.
Le problème, avec la volonté de devenir éthique de Pornhub, c’est qu’il faudrait payer pour accéder à tous les contenus afin de satisfaire les critères de la pornographie éthique tant dans le fond que dans la forme.
Il existe tellement d’autres plateformes avec des contenus gratuits, que ça me semble complètement surréaliste de penser que les gens seront prêts à payer pour ça. Pornhub s’effondrerait si on exigeait un paiement autre que pour l’abonnement premium. Money talks, comme on dit.
On s’est habitués à la gratuité, alors, malheureusement, nous ne sommes pas prêts, en majorité, à dégainer notre carte de crédit pour 10-15 minutes de plaisir solitaire.
«Pour recevoir toutes les chroniques de Geneviève Pettersen, abonnez-vous à notre nouvelle infolettre, Les débatteurs du samedi.»