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Ukraine: devrait-on parler d’une crise des réfugiés?
Le regard tourné vers nos écrans pour suivre les derniers développements de la guerre en Ukraine, plusieurs termes s’alternent pour décrire les évènements. «Crise des réfugiés» et «crise des migrants» sont parfois employés au détour d’une conversation ou dans un article. Devrait-on définir de cette façon les nombreuses personnes qui ont dû quitter leur maison?
Selon Luna Vives, professeure adjointe au département de géographie de l’Université de Montréal et spécialiste de la migration internationale, on ne devrait pas combiner le mot «crise» avec «réfugiés» ou «migrants» en raison de l’image de fardeau qui leur est ainsi associé.
À la fin du mois d’avril, l’Organisation des Nations unies (ONU) avait annoncé que la barre des cinq millions de réfugiés ayant fui l’Ukraine avait été dépassée en générant un afflux sans précédent dans certains pays. «Ça va culpabiliser les personnes qui doivent fuir leur maison parce que leur survie ou la survie de leur famille est à risque, indique-t-elle en précisant que ce n’est pas un sujet controversé dans son domaine. On considère que ce n’est pas approprié parce que ça peut gâcher les contextes ou les causes de la situation.»
Si l’on s’attarde aux définitions des mots réfugiés et migrants, ces dernières ne sont d’ailleurs pas les mêmes. «Les réfugiés sont davantage des gens qui vont s’enfuir d’une situation dangereuse dans leur pays d’origine», mentionne Richard Compton, professeur de linguistique à l’Université du Québec à Montréal (UQAM).
Crédit photo : Noovo Info
«Les migrants, c’est un peu plus neutre dans son sens strict, dans le sens qu’il n’y a pas vraiment de situation», poursuit-il.
Crédit photo : Noovo Info
Lorsqu’une situation est qualifiée de crise des réfugiés, des solutions à court terme mettant la responsabilité et les conséquences sur les épaules de ces derniers seront généralement trouvées.
«On va voir une tendance à fermer les frontières, c’est une solution à court terme, comme aux États-Unis avec la frontière sud. On va militariser la frontière, on va collaborer avec des pays étrangers, on va augmenter la déportation», énumère Mme Vives.
La frontière qui sépare les Américains du Mexique est fréquemment traversée par de nombreux migrants de façon illégale. Selon des chiffres publiés par les garde-frontières américains, deux millions d’arrestations ont été effectuées durant l’année 2021.
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Toutefois, la situation qui secoue l’Ukraine demeure bien une crise. Il serait toutefois plus adéquat de la qualifier de crise humanitaire afin que les solutions qui en découlent soient plus adéquates.
«On va trouver des réponses à une crise humanitaire. On a une responsabilité éthique et légale. Comme, par exemple, l’activation pour la première fois de la directive de la protection temporaire de l’Union européenne. On parle, par exemple, de la création de corridors humanitaires. C’est des réponses appropriées pour ce type de situation», note-t-elle.
D’un point de vue linguistique, ce terme fait également davantage référence à la situation qu’à l’individu. «Les mots évoquent des personnes directement, humanitaire c’est plutôt un adjectif qu’un nom donc c’est plus indirect comme référence aux personnes. Ça renvoie davantage à la situation», soutient M. Compton.
Voici le récapitulatif de l'actualité de la journée en Ukraine par Sabrina Rivet au bulletin Noovo Le Fil 17 animé par Noémi Mercier.