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«Nos dirigeants doivent s'unir autour de cette ambition et montrer au monde que le Canada est de retour sur le marché.»
Le président et chef de la direction de TC Énergie, exploitant d'oléoducs et de gazoducs, estime que le Canada peut devenir le premier exportateur de gaz naturel liquéfié vers l'Asie, mais que la volonté politique est cruciale pour y parvenir.
«Nous disposons de l'offre, nous bénéficions d'un avantage en matière de coûts de transport et la demande est là, a indiqué François Poirier lors d'un discours prononcé jeudi au Canadian Club de Toronto. Nos dirigeants doivent s'unir autour de cette ambition et montrer au monde que le Canada est de retour sur le marché.»
Le gaz naturel liquéfié (GNL) est un gaz refroidi à l'état liquide, ce qui permet son transport outre-mer dans des pétroliers spécialisés. Le gaz produit dans l'Ouest canadien pourrait se vendre beaucoup plus cher en Asie que s'il restait enclavé et trouver de nouveaux acheteurs réduirait la dépendance du Canada envers les États-Unis.
La phase initiale du premier terminal d'exportation de GNL du Canada devrait démarrer en milieu d'année à Kitimat, en Colombie-Britannique.
LNG Canada a annoncé la semaine dernière qu'un navire transportant du gaz naturel importé était arrivé à l'installation pour des essais d'équipement.
TC Énergie a construit le gazoduc Coastal GasLink, qui achemine le gaz naturel jusqu'à Kitimat en Colombie-Britannique.
Selon M. Poirier, pour que le Canada devienne un chef de file mondial du GNL, il faudra une volonté politique et une vision ambitieuse et audacieuse.
«Il y a 15 ans, le Canada était aux avant-postes avec les États-Unis pour exporter du GNL. À un moment donné, le Canada avait proposé 18 projets de GNL au large de la côte ouest du Canada, a-t-il rappelé. Nous avions alors l'occasion d'être numéro un, et maintenant nous rattrapons notre retard. Le Canada met aujourd'hui en service sa première installation de GNL, tandis que les États-Unis sont devenus le plus grand exportateur mondial.»
Le Canada exporte actuellement la quasi-totalité de ses exportations de gaz naturel vers les États-Unis. Les relations commerciales entre les deux pays ont été ébranlées par l'évolution constante des droits de douane du président américain Donald Trump et par ses réflexions sur l'annexion du Canada.
M. Poirier a également appelé à une «gestion politique concrète» afin de garantir que les projets soient réalisés dans les délais et le budget impartis. Il a ajouté que, quel que soit le parti qui remportera les élections fédérales du 28 avril, il devrait demander aux chefs d'entreprise une liste de projets prioritaires que le gouvernement, l'industrie et les dirigeants autochtones pourront concrétiser ensemble et avec un sentiment d'urgence.
«Nous savons que la volonté politique et la capacité de gestion peuvent faire la différence de nos jours, et cela a été prouvé par d'autres gouvernements à travers le monde», a-t-il déclaré.
Il a précisé que la certitude politique quant aux délais d'approbation des projets est primordiale si le Canada veut être compétitif en matière d'investissements. Il peut falloir une décennie pour que les projets se concrétisent au pays.
«Si nous laissons cette inertie perdurer, nous risquons bien plus que des retards, a soutenu M. Poirier. Nous risquons de céder des parts de marché à nos concurrents, mais surtout, nous confions notre avenir énergétique à d'autres et nous perdons l'occasion de souveraineté économique qui devrait être la norme pour un pays riche en ressources comme le Canada.»
Michael Sambasivam, analyste principal chez Investors for Paris Compliance et spécialiste du GNL mondial, a avancé que des «hypothèses dépassées» sous-tendent l'opinion courante selon laquelle l'Asie représente une zone de croissance considérable pour la demande de gaz naturel et que le Canada est parfaitement placé pour y répondre.
«Le mandat du gouvernement du Canada ne devrait pas être de faire avancer ces projets à tout prix, ce qui semble être (…) la tendance patriotique actuelle, a-t-il mentionné. Le GNL a été dépeint comme une sorte de planche à billets.»
Le groupe de défense des actionnaires pour une émission carboneutre a publié un rapport en décembre soulignant une surproduction de GNL à l'échelle mondiale, une demande incertaine sur les marchés émergents, des coûts de production canadiens élevés et des risques politiques.
«Nous sommes un peu en retard. Et ce retard va également nuire à notre capacité à vendre du gaz, car bon nombre de ces projets sont sous-traités sur plusieurs années, a fait valoir M. Sambasivam. Le Canada est toujours aux prises avec le remboursement des coûts d'investissement de bon nombre de ces nouveaux projets de GNL, alors que le pic de la demande en GNL est probablement déjà derrière nous.»
François Poirier était l'un des 14 dirigeants du secteur de l'énergie à avoir écrit une lettre ouverte aux quatre principaux chefs de partis fédéraux avant le déclenchement des élections. Dans cette lettre, ils exhortaient Ottawa à invoquer des pouvoirs d'urgence non spécifiés pour accélérer les projets clés jugés d'intérêt national.
Ils ont réclamé une simplification de la réglementation et un engagement à respecter des délais fermes de six mois pour l'approbation des projets. Ils souhaitent également l'élimination du plafond d'émissions du gouvernement fédéral, l'abrogation de la taxe fédérale sur le carbone pour les grands émetteurs et des garanties de prêts pour favoriser les opportunités de co-investissement autochtones.
Lors d'une séance de questions-réponses avec Victor Dodig, président et chef de la direction de la CIBC, M. Poirier a souligné qu'il souhaitait obtenir plus de détails de la part des deux partis en tête des sondages.
«Dire que nous voulons la construction de pipelines est bien perçu dans les sondages en ce moment, mais la réalité est que nous aurons besoin d'un soutien pour construire ces infrastructures pendant cinq ans ou plus», a affirmé M. Poirier.
Les conservateurs se sont engagés à prendre toutes les mesures préconisées par les PDG du secteur de l'énergie dans leur lettre et ont promis de développer un corridor où les projets comme les pipelines seraient préapprouvés.
Les libéraux ont indiqué qu'ils signeraient des accords dans les six mois suivant leur entrée en fonction avec les provinces et les gouvernements autochtones qui le souhaitent, qui reconnaîtraient les évaluations de projets énergétiques de leurs territoires.
Ils ont également signalé qu'ils accéléreraient l'approbation de ces projets en créant un bureau unique pour les évaluations des grands projets fédéraux, qui rendrait une décision après un seul examen.