Début du contenu principal.
«Cela fait 235 jours aujourd'hui...»
Pendant les 51 jours où elle a été détenue par le Hamas à Gaza, Hagar Brodutch n'a jamais perdu la notion du temps. La mère de famille dit s'être efforcée chaque matin de se rappeler le jour de la semaine et le nombre de jours pendant lesquels elle a été retenue en otage.
Six mois plus tard, elle compte toujours les jours.
À voir également - Négociations entre Hamas et Israël: là où ça bloque
Ce texte est une traduction d'un article de CTV News.
«Cela fait 235 jours aujourd'hui», dit-elle d'emblée.
Mme Brodutch, ses trois enfants et sa voisine Abigail Idan, âgée de 4 ans, ont été enlevés par des militants du Hamas dans leur maison de Kfar Aza, en Israël, le 7 octobre. Ils ont été libérés en novembre dans le cadre de la brève trêve, mais Mme Brodutch dit que ses pensées ne sont jamais loin de ceux qui sont toujours détenus à Gaza. «Je ne peux pas imaginer ce qu'ils ressentent», a-t-elle confié.
«Je sais ce que j'ai vécu et ça n'a duré que 51 jours.»
Mme Brodutch, son mari Avihai et leurs enfants, Ofri, 10 ans, Yuval, 9 ans, et Oriya, 4 ans, viennent d'arriver à Toronto où ils passent une partie de l'été à rendre visite à des parents.
«Je pense que nous allons mieux de jour en jour», affirme la mère. «Nous avons perdu de nombreux amis, notre maison et notre communauté. Mais nous continuerons à avancer.»
Hagar Brodutch raconte qu'il était environ 6h30 lorsque les sirènes ont commencé à retentir le 7 octobre. Peu après, on a frappé à sa porte et, à l'extérieur, se tenait leur voisine, Abigail Idan, qui était âgée de 3 ans à l'époque. Mme Brodutch se souvient qu'elle n'était pas blessée, mais qu'elle était couverte du sang de ses parents, qui venaient d'être tués dans la résidence d'à côté.
Mme Brodutch a ramené la fillette à l'intérieur et s'est rendue dans la pièce sécurisée de la maison avec ses enfants. Membre de la garde civile de la communauté, Avihai a revêtu son équipement de sécurité et a quitté la maison pour apporter son aide.
La mère se souvient qu'ils ont passé quatre heures dans la pièce sécurisée à attendre le «feu vert». Au lieu de cela, elle estime que 15 combattants du Hamas sont entrés dans sa maison et ont forcé l'entrée de la pièce sécurisée.
Elle raconte qu'ils lui ont demandé ses clés de voiture, «puis ils m'ont dit “chaussures”», se souvient-elle. «C'est à ce moment-là que j'ai compris ce qui se passait.»
Mme Brodutch indique qu'ils ont été conduits tous les cinq à Gaza dans sa propre voiture, où une foule les attendait.
«Il y avait une foule nombreuse, qui applaudissait et dansait», se souvient-elle. «Ils étaient heureux de nous voir, une femme et quatre enfants. Elle raconte que l'homme qui conduisait la voiture n'a cessé d'essayer de soulever Ofri, 10 ans, pour la montrer à la foule.
«Ils ont pris sa chemise et ont essayé de montrer à la foule qu'il y avait une petite fille. Une petite fille juive, israélienne», dit-elle.
Mme Brodutch raconte qu'ils ont été emmenés dans la maison d'une famille et enfermés dans une petite pièce avec une autre otage qui était blessée. Il n'y avait pas d'eau courante et très peu d'électricité. La nuit, il faisait si sombre qu'elle ne pouvait pas voir sa propre main.
Les enfants n'arrêtaient pas de demander: «Quand est-ce qu'on rentre à la maison? Que se passe-t-il?». « Je n'arrivais pas à croire que mes enfants allaient dormir la nuit, à Gaza, dans la maison de quelqu'un d'autre», lance Hagar, très émotive.
Ils sont restés là un peu plus de deux semaines, jusqu'à ce que la maison soit touchée par une frappe.
«La maison s'est alors effondrée sous les bombes des FDI.» Ofri a été blessée, mais Mme Brodutch dit qu'ils ont eu de la chance de survivre.
Après que la maison a été touchée, ils ont été séparés des autres otages et déplacés vers un autre endroit. Mme Brodutch ajoute qu'ils ont été embarqués dans une ambulance et conduits à la maison d'une autre famille, mais celle-ci était vide.
«C'était un cauchemar, l'enfer», dit-elle. «On est enfermé dans une petite pièce avec quatre personnes. Nous avions des cartes, alors nous avons essayé de les utiliser pour passer la journée. Mais nous avons souffert. Nous étions affamés.»
Selon elle, chaque membre de la famille recevait de petites quantités d'eau et un morceau de pain pita par jour. Ils entendaient les bombes toute la journée et toute la nuit, et vivaient dans la crainte d'être touchés.
Lorsque les bombes ont cessé à la fin du mois de novembre, Mme Brodutch a déclaré qu'elle savait qu'il se passait quelque chose à l'extérieur. Elle et les quatre enfants ont été libérés le 26 novembre dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu.
Pendant les semaines qui ont précédé leur libération, M. Avihai était assis devant le bâtiment du ministère de la Défense à Tel-Aviv, l'un des premiers à demander au gouvernement d'accorder la priorité à la libération des otages. 112 d'entre eux ont été libérés, mais Israël affirme qu'il en reste plus de 130; on ne sait pas exactement combien sont encore en vie.
«Nous devons tout arrêter et les ramener chez eux», implore-t-elle. «Rien n'est plus important qu'eux.»
Les otages ont été au centre des négociations sur le cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, négociations qui ont été interrompues à plusieurs reprises en raison de la poursuite de la guerre à Gaza. Les perspectives de reprise des négociations se sont récemment accrues, alors même qu'Israël menait de nouvelles attaques à Rafah.
Lundi, le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, a déclaré qu'une «tragique mésaventure» s'était produite lorsqu'une frappe israélienne avait mis le feu à un camp abritant des réfugiés palestiniens. Au moins 45 personnes ont été tuées, selon le Croissant rouge palestinien. Les forces de défense israéliennes (IDF) ont déclaré qu'elles avaient ouvert une enquête sur ces décès.
La tragédie a entraîné de nouvelles critiques sur la façon dont Israël mène la guerre, qui a tué plus de 36 000 Palestiniens, selon le ministère de la Santé de Gaza.
Aucune date n'a été fixée pour la reprise des négociations sur le cessez-le-feu, mais de nouvelles propositions de médiateurs égyptiens et qataris sont en cours d'élaboration.
Quant à Mme Brodutch, elle espère que la paix reviendra un jour.
«Je veux vivre en paix avec mes voisins», dit-elle. «Nous devons trouver une solution pour nous deux. Pour Israël et les Palestiniens. La guerre n'est pas une option. Nous ne pouvons plus vivre comme ça.»