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«Je vous dirai, en outre, que les piles au sodium doivent être considérées comme les plus énergiques.»
Northvolt prévoit être la première entreprise à commercialiser à grande échelle des batteries au sodium. Cette technologie pourrait jouer un rôle important dans la transition énergétique, mais pas nécessairement au niveau de l'électrification des véhicules.
L'idée de concevoir des piles au sodium n'est pas nouvelle. En 1870, l'auteur Jules Verne y faisait d'ailleurs référence dans 20 000 lieux sous les mers.
Dans ce roman d'aventures, le capitaine Nemo explique au scientifique Pierre Arronax que son sous-marin, le Nautilus, parcourt le fond des mers grâce à des batteries faites avec le sel de l'océan.
«Je vous dirai, en outre, que les piles au sodium doivent être considérées comme les plus énergiques, et que leur force électromotrice est double de celle des piles au zinc», peut-on lire dans le roman de Jules Verne.
Depuis, plusieurs entreprises se sont intéressées sans grand succès aux piles au sodium et 150 ans après l'écriture du roman de Jules Verne, Northvolt a annoncé «une nouvelle percée» dans les batteries sodium-ion.
«Le monde a placé de grands espoirs dans le sodium-ion, et je suis très heureux de dire que nous avons développé une technologie qui permettra son déploiement à grande échelle pour accélérer le développement de la transition énergétique», a indiqué Peter Carlsson, PDG et cofondateur de Northvolt, dans un communiqué publié au début du mois de décembre.
L'entreprise suédoise, qui compte ouvrir une méga-usine de batteries sur le bord de la rivière Richelieu, n'a toutefois pas l'intention de remplacer le lithium par le sodium dans la composition des cellules des batteries de véhicules électriques.
Le sodium, une ressource beaucoup plus abondante que le lithium, en plus d'être meilleur marché et d'avoir une empreinte environnementale moins élevée, serait plutôt utilisé pour stocker de l'énergie.
«Le faible coût et la sécurité à haute température rendent cette technologie particulièrement attrayante pour les solutions de stockage d'énergie sur les marchés émergents, notamment en Inde, au Moyen-Orient et en Afrique», a précisé M. Carlsson dans le communiqué.
Selon Michel Jébrak, professeur émérite au département des sciences de la Terre et de l'atmosphère de l'UQAM, le stockage d'énergie renouvelable dans des batteries au sodium est très prometteur.
«Le couplage d'une éolienne ou d'un panneau solaire avec des batteries au sodium, c'est excellent, parce que ça veut dire que vous produisez l'énergie quand vous en avez de disponible, vous la stockez dans des batteries qui ne vont pas coûter trop cher a priori puisque ce sera un matériel très abondant, et vous serez capables ensuite d'envoyer cette énergie quand vous en avez besoin. C'est certainement un couplage gagnant.»
Le sodium utilisé dans les batteries peut être récupéré dans l'eau de mer, a ajouté Michel Jébrak, comme l'avait imaginé Jules Verne.
«La technologie peut être produite avec des matériaux d'origine locale, offrant ainsi une voie unique pour développer de nouvelles capacités régionales de fabrication de batteries entièrement indépendantes des chaînes de valeur traditionnelles des batteries», a indiqué le PDG de Northvolt, qui prévoit être la première entreprise à commercialiser cette technologie.
Des batteries au sodium destinées aux véhicules?
Selon le communiqué publié par Northvolt, la deuxième génération de batteries au sodium pourrait être utilisée pour les véhicules.
«La première génération de cellules sodium-ion de Northvolt est conçue principalement pour le stockage d'énergie. Les générations suivantes, offrant une densité énergétique plus élevée, pourraient ouvrir des opportunités pour permettre des solutions de mobilité électrique rentables.»
Mais selon Michel Jébrak, auteur du livre Objectif lithium: Réussir la transition énergétique, le sodium ne remet pas en cause, du moins à court terme, le rôle du lithium dans l'électrification des transports.
«Le problème fondamental des batteries au sodium, c'est que le sodium est à peu près trois fois plus lourd que le lithium.» Donc, «imaginez si vous avez des batteries de 300 kilogrammes dans vos véhicules électriques, si vous les mettez au sodium, ça va faire 900 kilogrammes», a précisé le professeur.
Selon lui, des piles au sodium pourront éventuellement servir au transport, mais le poids «sera toujours un problème».
«Aujourd'hui, les technologies sont matures pour le lithium-ion», qui demeure «le meilleur compromis pour l'instant» dans l'électrification du transport.
Pendant combien de temps le lithium sera-t-il «le meilleur compromis»?
Certainement «pour une dizaine d'années», selon Michel Jébrak, qui est toutefois d'avis que le développement de nouvelles technologies comme la pile au sodium ou encore celle à l'hydrogène favoriseront «une diversification des marchés de la batterie» et «beaucoup d'innovations dans les années à venir».