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Santé
Chronique |

L’industrie du «mieux-être» ne veut pas notre bien, elle veut notre argent

À une époque où l’on vit beaucoup d’incertitude et où la religion a déserté l’espace social pour laisser sa place à d’autres formes de religiosités et de spiritualités, plusieurs personnes se tournent vers le mieux-être pour se sentir mieux.

The Guardian lançait, il y a quelques jours, une nouvelle section qui se consacre à l’industrie du mieux-être. Et en voyant l’annonce passer, j’ai roté mon kombucha en m’exclamant : «ah non, pas eux autres aussi.»

Well actually

Well Actually, c’est le nom de ce nouvel espace consacré au «wellness». Je savais que je n’aurais pas dû sous-estimer le célèbre média, qui utilise cette expression bien connue, signifiant d’emblée que certains bémols seront mis de l’avant par rapport à cette lucrative industrie, une industrie qui génère annuellement des milliards de clics, et par le fait même, des milliards de dollars.

Oui, on va y remettre en question certains acquis. C’est une excellente nouvelle, puisque, il faut bien l’admettre, cet univers, où devenir la meilleure version de soi-même est le but ultime, a une (grosse) part d’ombre.

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La table est mise pour qu’on y croie

À une époque où l’on vit beaucoup d’incertitude et où la religion a déserté l’espace social pour laisser sa place à d’autres formes de religiosités et de spiritualités, plusieurs personnes se tournent vers le mieux-être pour se sentir mieux. Coach, produits miracles, cures, programmes qui donnent des résultats incroyables, «en veux-tu, en vl’à !»

Mais finalement, sur quoi se base-t-on pour démontrer l’efficacité de tous ces produits, séances et plans, souvent achetés à fort prix via les médias sociaux? Souvent sur de la pseudoscience ou sur des études à la méthodologie discutable à qui on peut fait dire n’importe quoi. Parfois, le marketing entre aussi en ligne de compte et la machine s’emballe.

Un bon exemple de ce phénomène est cette idée selon laquelle il faut ABSOLUMENT marcher 10 000 pas par jours pour être en forme. J’y adhère complètement. Pour vrai, si je ne marche pas mes 10 000 pas, je me sens comme une moins bonne personne et j’ai l’intime conviction qu’un incident cardiaque m’attend sur le bout de mon sofa. Eh bien, j’ai appris vraiment très récemment que cette idée très bien ancrée dans l’imaginaire collectif est en fait une légende urbaine.

En 1965, une compagnie japonaise lance un podomètre et décide de l’appeler Manpo-Kei. On peut traduite par «mesure de 10 000 pas». La planète entière s’est alors mise à penser que 10 000 pas étaient la quantité quotidienne d’activité physique recommandée pour maintenir la forme. Tellement que nos montres intelligentes le prennent comme référence. En vérité, j’apprenais récemment dans plusieurs médias, dont The Guardian [1], que marcher entre 4000 et 5000 pas par jour serait suffisant pour réduire les risques liés à l’inactivité.  

Ça, c’est pour les choses un peu plus «sérieuses». Marcher, ça ne fait pas de mal à personne. Il faut néanmoins avouer qu’il existe des produits assez farfelus, tellement qu’on dirait une mauvaise blague. Sans grande surprise, Gwyneth Paltrow, qui s’est transformée, avec les années, en papesse du «wellness», a souvent fait parler d’elle à cause des affaires incongrues disponibles sur son site, Goop. Pensons à l’œuf de jade ou au Vampire Repellent [2]. Toutes des patentes à gosse vendues à fort prix et dont l’efficacité est nulle.

Et que serait cette chronique sans parler de «l’eau citronnée gate». Au Québec, quand on pense à de l’eau et à du citron, on songe indubitablement à Marilou, de la marque 3 fois par jour. Elle revient d’ailleurs avec humilité sur sa phase «mieux-être» et sur sa fameuse routine matinale — ça fait environ 10 ans et on en parle encore — dans l’épisode 2 de la nouvelle saison du balado À plat ventre, de Loounie.  

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Je veux zéro taper sur la tête de Marilou. Au contraire. Je salue cette sortie où elle ose faire un retour en arrière pour avouer bien candidement que, quand elle y repense, elle trouve qu’elle était un peu trop intense avec ses jus verts, etc. Elle révèle d’ailleurs, au cours de l’épisode, quelque chose qui, je pense, est hyper important pour comprendre toute cette industrie et l’engouement suscité par des produits ou des méthodes souvent farfelues  elle y croyait. Elle n’avait aucune mauvaise intention puisqu’elle s’adonnait elle-même à ce rituel matinal. Elle voulait sincèrement aider sa communauté à se sentir mieux.

Marilou n’est pas une coach de vie. Mais je me sers de cet exemple parce que je pense que beaucoup de coach et de vendeurs de machins croient sincèrement aux vertus de ce qu’ils proposent et sont animés par un désir de faire le bien.

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D’ailleurs, quand on se met à regarder des vidéos d’influenceurs «wellness», on remarque que le discours est souvent axé sur leur désir de nous montrer comment atteindre le même état de bien-être qu’eux autres (pour 20,99 $ par mois). C’est évident que ça pogne. Ça vient remplir un vide et donner une marcher à suivre «simple» et abordable pour régler des situations souvent complexes.  

Une affaire super lucrative qu’on voit en ce moment, surtout sur Instagram, ce sont les fameuses retraites à l’étranger ou en région. Beaucoup d’influenceuses et d’influenceurs se sont transformés, au fil des mois, en espèce de guru, et invitent leurs abonné.es à acheter des formations très coûteuses ou à carrément payer des milliers de dollars pour une retraite «transformatrice» dans le sud. Certains tiennent un discours assez inquiétant, notamment sur l’alimentation ou les produits naturels qu’il faudrait prendre pour se sentir vraiment bien et être la meilleure version de soi (ça revient assez souvent, cette maudite expression).

Je veux juste avouer, parce que je ne suis pas imperméable à ce marketing du mieux-être, qu’il y a plein d’affaires que je fais moi-même tout en sachant très bien que ça ne changera rien à ma vie et à ma santé globale. J’aime ça me faire des smoothies au collagène de machin et m’allumer des chandelles dont je sais pertinemment que les effluves sont toxiques. Comme tout le monde, c’est pour me faire du bien et je me dis que même si ça marche dans ma tête, c’est bon pour moi.

Sauf qu’il ne faut pas être dupes. Quand je vois certaines personnes ou compagnies abuser de la crédulité ou de la détresse des gens, c’est là où je décroche. Et j’ai pour mon dire que les plateformes qui laissent officier des influenceurs et des marques qui trompent ou mettent en danger les consommateurs devraient être imputables des dommages causés.

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