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La mère, autrefois détenue dans le nord-est de la Syrie, est décédée alors qu’elle attendait d’être rapatriée.
Une Québécoise mère de six enfants, autrefois détenue dans le nord-est de la Syrie, est décédée alors qu’elle attendait d’être rapatriée. La Canadienne n’était connue que par ses initiales F.J.
Ce texte est une traduction d'un article de CTV News
Le gouvernement fédéral a refusé de la rapatrier, mais a ramené ses deux filles et ses quatre fils à Montréal au début de l’année.
La position d’Affaires mondiales Canada était que F.J. représentait un risque pour la sécurité et qu’il n’y avait aucun moyen de contrôler son comportement une fois qu’elle était entrée au Canada.
«Cette excuse pour ne pas la rapatrier était manifestement fausse», a dit Lawrence Greenspon, son avocat basé à Ottawa. «Nous le savons parce que nous avons réussi à faire venir huit Canadiennes et 21 enfants canadiens, et que certaines de ces femmes sont soumises à des conditions très strictes dès qu’elles posent le pied au Canada.
Selon Me Greenspon, la quadragénaire est décédée dans des circonstances mystérieuses dans un centre d’expulsion turc. Il a qualifié sa mort de tragédie inutile.
Me Greenspon a indiqué que F.J. s’était échappée du camp d’Al-Roj en mars, mais qu’elle avait été arrêtée en Turquie trois mois plus tard et accusée d’appartenance à un groupe terroriste armé.
Elle a été détenue à la prison fermée pour femmes de Tarsus, dans le sud-est de la Turquie, et son procès s’est tenu le 15 octobre. Elle a été acquittée et transférée dans un centre de détention.
Le matin du 17 octobre, les gardiens de prison l’ont trouvée morte. Me Greenspon affirme qu’il s’agissait d’une femme forte qui avait survécu à des conditions très difficiles pendant longtemps, et que son seul objectif était de rentrer chez elle, au Canada, pour retrouver ses enfants.
«Nous demandons qu’une autopsie soit pratiquée», a souligné Me Greenspon. «Le moment choisi est très suspect. Il n’est pas logique qu’après avoir été acquittée le 15, elle ait été retrouvée morte dans les 48 heures qui ont suivi.»
Le camp d’Al-Roj, où F.J. a été détenue pendant six ans, était géré par les autorités kurdes. Ses trois enfants sont nés en Syrie, dont deux dans une zone de guerre, tandis qu’un autre est né dans le camp de détention où les maladies étaient endémiques.
«On peut se demander quel type de politique ou de fondement non humanitaire a été mis en avant pour, d’une part, ramener les enfants et, d’autre part, dire "non" à leur mère», ajoute Me Greenspon.
F.J. serait la dernière Canadienne détenue en Syrie. Au moins huit autres ont été renvoyées en Colombie-Britannique, en Alberta, en Ontario et au Québec.
Pendant la guerre brutale en Syrie et en Irak, plusieurs extrémistes canadiens se sont rendus dans la région. Certains ont été tués dans le conflit, et lorsque les forces kurdes ont vaincu ISIS en 2019, d’autres ont été envoyés dans des prisons de fortune ou des camps de détention. On ne sait pas exactement combien d’entre eux avaient rejoint les rangs d’ISIS.
Alex Neve est chercheur principal à l’École supérieure d’affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa, et il faisait partie de la délégation de la société civile qui a visité les camps de prisonniers syriens en août dernier et a rencontré F.J. et ses enfants.
Il affirme que la position d’Ottawa n’est pas fondée en droit canadien et que la Québécoise s’est déclarée prête à répondre aux allégations portées contre elle dans le cadre d’une procédure judiciaire équitable.
«Après l’avoir rencontrée, j’ai pu constater qu’il s’agissait d’une famille très unie [...] La politique canadienne avait permis à ses enfants de revenir dans ce pays, et après tous les traumatismes qu’ils ont subis, ils apprennent maintenant avec tristesse qu’ils ne la reverront plus jamais.»
M. Neve et la délégation de la société civile ont écrit à la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, ainsi qu’au ministre de la Sécurité publique, Dominic Leblanc, jeudi, pour demander qu’une enquête indépendante soit menée de toute urgence. Selon lui, cette enquête devrait déterminer les circonstances qui ont poussé F.J. à quitter le camp pour se rendre en Turquie, ainsi que la manière dont l’affaire a été traitée.
«Mais avant tout, ses six enfants, que ce soit aujourd’hui ou dans les années à venir, méritent et ont le droit de savoir ce qui est arrivé à leur mère et pourquoi», a affirmé M. Neve. «Le gouvernement canadien a la responsabilité de veiller à ce que cela se produise.»
Dans un courriel adressé à CTV News, Affaires mondiales Canada a déclaré qu’il était au courant des rapports sur le décès d’une Canadienne en Turquie, mais qu’il ne pouvait pas communiquer d’autres informations pour le moment en raison de considérations liées à la protection de la vie privée.