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Au total, 18 % des ménages affirment avoir de la difficulté à rembourser leurs dettes. Si vous êtes dans cette situation, vous n’êtes pas seul, insiste Maude Pugliese, chercheuse spécialisée en finances et inégalités à l’INRS.
Déjà en 2022, près d’un Québécois sur cinq a eu de la difficulté à rembourser ses dettes. Un plus grand nombre risquent de se trouver dans cette posture précaire au moment où l’inflation et la hausse des taux d’intérêt plombent les finances des ménages, selon un rapport de l'Institut national de la recherche scientifique (INRS), publié mardi.
Avec un sondage auprès de 4800 répondants, l’INRS a voulu connaître la proportion de Québécois qui vivent de l’insécurité financière par rapport à leurs dettes. Ses chercheurs voulaient également savoir quel était le profil des personnes les plus touchées par cette précarité et comment elles s’étaient trouvées dans cette posture difficile.
Au total, 18 % des ménages affirment avoir de la difficulté à rembourser leurs dettes. Si vous êtes dans cette situation, vous n’êtes pas seul, insiste Maude Pugliese, chercheuse spécialisée en finances et inégalités à l’INRS, en entrevue.
«Les personnes qui ont des difficultés d'endettement se sentent souvent très seules. Elles n'osent pas en parler. Elles pensent que c'est leur faute. (...) Pour moi, il y avait vraiment un intérêt à montrer que, finalement, il y a beaucoup de gens qui sont touchés par ça.»
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Les réponses de ceux qui peinent à payer leurs dettes démontrent que l’enjeu n’est généralement pas une question de responsabilités individuelles, défend Mme Pugliese. L’étude rapporte que 70 % des gens qui ont contracté des dettes en raison d’un évènement, comme une perte d’emploi, une maladie ou l’obligation de s’occuper d’un proche, ont de la difficulté à les rembourser. Cette proportion est de seulement 10 % pour ceux qui ont utilisé le crédit pour acheter une maison ou une voiture.
Ces parcours de vie démontrent que le manque de connaissance n’est pas l’unique facteur qui mène les ménages dans une posture financière difficile. «Les gens étaient somme toute peu susceptibles de dire que c'était seulement un manque de connaissances qui les avait menés aux dettes.»
L’étude démontre également que la proportion de personnes qui peinent à rembourser leurs dettes est plus importante chez les jeunes, les parents seuls, les personnes racisées et les nouveaux arrivants.
À la lumière des réponses données par les répondants, on aurait tort de voir l’insolvabilité comme un problème de volonté personnelle, prévient Mme Pugliese. Avoir de la difficulté à rembourser est une étiquette très stigmatisante pour celui ou celle qui la porte.
Elle donne l’exemple de la cote de crédit, «qui est utilisée beaucoup plus largement que pour seulement octroyer des prêts», notamment pour obtenir un emploi ou un logement. «C'est devenu presque une façon d'évaluer la moralité des gens, à quel point ils peuvent être fiables ou non.»
Ce sentiment d’exclusion est également vécu dans les interactions avec les institutions financières. «Il y a toutes sortes de choses qui peuvent faire en sorte que les gens puissent se sentir mal à l’aise de poser des questions, précise-t-elle. Tu peux aussi sentir que tu n’es pas respecté ou encore que tu ne sens pas que tu cadres avec la clientèle usuelle d’une institution.»
La chercheuse précise que le sondage communique des informations sur la perception des répondants, mais qu’il ne permet pas de déterminer si les actions des banques justifient ou non cette impression.
Fait inusité, plusieurs parents se sont trouvés dans une posture financière difficile après avoir emménagé avec un nouveau conjoint.
Mme Pugliese donne l’exemple d’une mère qui recevait des allocations familiales alors qu’elle était célibataire et qui perd ce soutien après avoir emménagé avec un nouveau conjoint. «Très rapidement, après un an, on va prendre en considération le revenu du nouveau conjoint, mais c'est bien possible que le conjoint ne participe pas aux dépenses des enfants qui ne sont pas les siens.»
Le portrait tracé par l’étude pourrait se détériorer davantage en raison de l’augmentation du coût de la vie et des taux d’intérêt élevés. L’INRS avait fait son premier coup de sonde au début de l’année 2022, juste avant que l’inflation ne s’emballe. Ses chercheurs ont donc décidé de refaire un sondage en 2023 auprès d’un plus petit échantillon de 800 répondants.
En apparence, le rapport indique qu’il n’y avait pas de différences «statistiquement significatives» entre 2022 et 2023. En ajustant les données afin de comparer des personnes ayant des caractéristiques similaires, «le risque de déclarer des difficultés de remboursement devient bien plus élevé en 2023 qu’en 2022, par 16,1 points de pourcentage», peut-on lire dans le rapport.
Bien des propriétaires pourraient se trouver en mauvaise posture au moment du renouvellement du terme de leur prêt hypothécaire à un taux plus élevé, prévient Mme Pugliese. «Les effets de la hausse du taux directeur vont prendre un certain temps à se matérialiser complètement.»