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Les 124 élus de l’Assemblée nationale du Québec reprendront le taureau par les cornes le 31 janvier prochain, alors que recommenceront les travaux parlementaires.
Les 125 élu(e)s de l’Assemblée nationale du Québec — en comptant celui ou celle qui doit prendre la relève de Dominique Anglade dans la circonscription de Saint-Henri—Sainte-Anne — reprennent le taureau par les cornes le 31 janvier 2023, tandis que recommencent les travaux parlementaires.
Quels sont les dossiers politiques sensibles? Quelles sont les différentes priorités des partis en présence et à quoi peut-on s’attendre des quatre formations politiques? Tour d'horizon des principaux enjeux à l'aube de la rentrée parlementaire.
François Legault enchaîne les moments de grâce et a tendu la main à plusieurs reprises aux partis de l'opposition depuis le début de l'année. Le premier ministre est-il sincère ou n'est-ce là qu'une pure tactique politique? Peu importe ses intentions réelles, le gouvernement Legault a les coudées franches: avec ses 90 élus caquistes et devant une opposition relativement affaiblie, la CAQ peut manœuvrer sans trop de problèmes.
Le premier ministre du Québec, François Legault, à droite, est applaudi par son gouvernement alors qu'il se lève pour présenter le discours inaugural, à l'Assemblée nationale, le mercredi 30 novembre 2022. Crédit: Jacques Boissinot | La Presse canadienne
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Chose certaine, M. Legault et son nouveau ministre de l’Éducation Bernard Drainville ont du pain sur la planche afin de remettre le réseau scolaire sur le chemin de la réussite. Étant «sa priorité des priorités», M. Drainville notamment s’attaquer au manque criant de personnel dans le milieu.
Ce sont pas moins de 2700 enseignants au niveau primaire et pré scolaire, 3000 au secondaire ainsi que 2700 éducatrices en services de garde dans les écoles qui doivent intégrer le réseau d’ici 2026 afin de pallier à la pénurie de main-d’œuvre qui affecte les écoles au Québec.
Le plan d’action du nouveau ministre Drainville — enfin, «nouveau»... on connaît le passé péquiste de Drainville avant son hiatus passé dans les médias — se décline en sept priorités distinctes et mise notamment sur la création d’«une voie rapide» vers un brevet d’enseignement. Cette nouvelle pratique permettra entre autres aux titulaires d’un baccalauréat qualifiant de devenir enseignantes ou enseignants agréés. Une manière de répondre rapidement à la pénurie de main-d’œuvre, estime-t-on.
François Legault présente Bernard Drainville comme candidat dans Lévis lors de la campagne électorale provinciale de 2022. Crédit: Jacques Boissinot | La Presse canadienne
Lors de la dernière campagne électorale, le premier ministre s’est engagé à allonger 2 milliards de dollars supplémentaires pour remettre à neuf le tiers des 1800 écoles désuètes aux quatre coins de la province. Cet investissement s’ajoute aux 7 milliards de dollars prévus au plus récent budget pour rénover les écoles au cours des quatre prochaines années, pour un total de 9 milliards de dollars.
Des données initialement dévoilées par La Presse ont mis en lumière les difficultés que les élèves de cinquième secondaire ont éprouvées lors de l’épreuve uniforme de français. Réagissant aux nombreux échecs, le ministre a affirmé à Noovo Info «être préoccupé par les résultats à la baisse», explicable en partie en raison de la pandémie de COVID-19, et confirme «travailler sur l’enjeu qu’est la réussite du français à l’école».
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Le gouvernement contre le déclin du français
La question du déclin du français au Québec se retrouve également au-dessus de la pile de dossiers sur le bureau du premier ministre Legault. «C’est notre devoir», avait-il lancé lors du discours inaugural qui officialisait la 43e législature à l’Assemblée nationale.
Pour répondre au problème, il ne faut cependant pas s’attendre à ce que soit rouverte la loi 96 ou une extension de la loi 101 au cégep. Non, afin d’inverser la lourde tendance du recul du français, particulièrement à Montréal, le premier ministre Legault mise plutôt sur les compétences linguistiques des immigrants.
Le premier ministre du Canada Justin Trudeau et le premier ministre du Québec François Legault, lors d'une rencontre à la fin 2022. Crédit photo: Paul Chiasson | La Presse canadienne
«La clé, c’est vraiment autour de l’immigration», avait-il mentionné, ne cachant pas le défi qui l’attend dans les discussions avec Ottawa sur ce sujet. Rappelons que le Québec prévoit accueillir quelque 50 000 nouveaux arrivants par année.
L'heure de vérité pour Dubé ?
L’homme fort qui dirige le «mammouth de la Santé» devra rendre des comptes en 2023.
À la tête du ministère doté de la plus grosse enveloppe budgétaire (56 milliards de dollars en 2022-2023 sur le budget total de 135 milliards de dollars du Québec) depuis trois ans, Christian Dubé réussira-t-il là où plusieurs se sont cassé les dents, tandis que les urgences craquent, que le personnel déjà éreinté s'est davantage essoufflé en raison de la pandémie et que les besoins sont tous aussi criants?
Le gouvernement désire entre autres mettre un terme au très impopulaire temps supplémentaire obligatoire pour les infirmières en plus d’élargir les pouvoirs des infirmières praticiennes spécialisées, des pharmaciens et des techniciens ambulanciers paramédicaux. Une mésentente dans les négos concernant les conventions collectives touchant plus de 500 000 employés du secteur public pourrait néanmoins ralentir les ardeurs de M. Dubé.
Crédit: Darryl Dyck | La Presse canadienne
Les partis de l'opposition ne lâcheront pas le morceau et on peut certainement s'attendre à ce que le ministre soit pressé de répondre de ses décisions et de ses ambitions lors de la reprise des travaux parlementaires.
Québec peut toutefois commencer à espérer une entente avec Ottawa en ce qui concerne les transferts en santé. Les PM du Conseil de la fédération se réuniront pour discuter de l'épineux dossier le 7 février prochain.
Énergie et «super» ministre
François Legault désire accélérer le grand chantier de l’électrification du Québec en 2023. Pour y arriver, il a conféré d’importants pouvoirs à Pierre Fitzgibbon, désormais responsable de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie.
Le «super» ministre Fitzgibbon, qui fait face à une sixième enquête de la commissaire à l'éthique, devrait dès le mois de février commencer à jeter les bases de ce projet pharaonesque qui doit faire augmenter de 50% la production d’Hydro-Québec d’ici 2050, étape cruciale pour atteindre la carboneutralité dans la province
Pierre Fitzgibbon à l'Assemblée nationale en 2022. Crédit: Jacques Boissinot | La Presse canadienne
Autre dossier à surveiller: la nomination d'un(e) nouveau/nouvelle PDG à la tête d'Hydro. Sophie Brochu, qui était appréciée par M. Legault, en a surpris plus d'un en annonçant son départ au début de l'année. Des différences d’opinions sur l’avenir du secteur énergétique étaient apparues à l’automne dernier entre la grande patronne d’Hydro et le gouvernement Legault.
Un potentiel défi de conciliation commence à poindre à l'horizon.
Douloureuse inflation et incertitudes économiques
«Les perspectives économiques se sont détériorées», a lancé le ministre des Finances, Eric Girard, lors de sa dernière mise à jour économique. Puis, l’inflation avait quelque peu décéléré en décembre pour s’établir à 6,3 %.
Eric Girard à l'Assemblée nationale en 2022. Crédit: Jacques Boissinot | La Presse canadienne
Les secousses économiques continuent d’affecter négativement une majeure partie de la population et pour répondre partiellement à la hausse du coût de la vie, le gouvernement Legault a limité à 3% l’augmentation de certains tarifs gouvernementaux, a envoyé des chèques ponctuels (oui, ces fameux chèques qui n'ont pas fait l'unanimité), en plus de mettre en place son «bouclier contre l'inflation» qui prévoit notamment une baisse d'impôt en 2023.
Si le scénario d’une récession devait se produire (mais Eric Girard a prévenu que la situation est moins pire qu'on ne le prévoyait), la réserve de 8 milliards $ mise de côté par le gouvernement sera-t-elle suffisante pour soutenir l’économie? On suppose que les oppositions à Québec écorcheront le gouvernement de François Legault si la réponse n'est pas adéquate.
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Le Parti québécois (PQ), le Parti libéral du Québec (PLQ) et Québec solidaire (QS) se partagent les 34 sièges restants au Salon bleu.
Le PQ et le PLQ ont connu des revers majeurs aux élections de 2022, avec les pertes respectives de 10 et sept députés. QS a pour sa part limité les dégâts en faisant élire une personne de plus.
Résultat des courses: les libéraux se retrouvent à 19 voix au Salon bleu; on retrouve 11 solidaires; et un trio de péquistes a survécu, composé du chef Paul Saint-Pierre Plamondon, du député de Matane-Matapédia Pascal Bérubé et de celui des Îles-de-la-Madeleine Joël Arsenault. À la suite de son imbroglio avec le caucus libéral, Marie-Claude Nichols siège comme indépendante et un siège demeure vacant depuis le départ de la cheffe Dominique Anglade de la circonscription de Saint-Henri–Sainte-Anne. Marc Tanguay dirige le PLQ sur une base intérimaire.
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Opération «promotion du PQ»
Réduit à trois députés, le PQ devra parier sur la promotion de ses idées s'il veut renouer avec sa renommée d'antan, estime l'analyste politique Dominic Vallières. «L'opération “faire connaître Paul St-Pierre Plamondon” est terminée […] Il avait un déficit de notoriété lorsque la campagne électorale a débuté. Ça se résorbe tranquillement et il faut désormais faire rejaillir le tout sur le PQ», a expliqué M. Vallières à Noovo Info.
Saint-Pierre Plamondon est conscient du faible rapport de force que son parti possède face au gouvernement fortement majoritaire, et concède qu'il est mieux d'être «en mode collaboration» s'il veut obtenir des compromis. «PSPP» ne s'attend toutefois pas à une avancée dans le dossier de l'élargissement de la loi 101 aux cégéeps. «Ça fait huit fois que j’en débats avec M. Legault. Je ne pense pas que cette fois-là a été plus concluante», a-t-il avoué lors d'une entrevue à Noovo Info.
Les députés péquistes Paul Saint-Pierre Plamondon (au centre), Pascal Bérubé (à gauche) et Joël Arsenault à l'Assemblée nationale en 2022. Crédit: Jacques Boissinot | La Presse canadienne
Les péquistes ont obtenu une victoire politique en faisant adopter, en décembre dernier, le projet de loi 4, qui rend facultatif le serment autrefois obligatoire à la Couronne britannique. Le trio qui avait défié cette pratique «humiliante» pourra donc officiellement siéger au Salon bleu lors de la rentrée parlementaire.
PLQ: à la recherche de leadership
Qui saura prendre les rênes du PLQ? La réponse pourrait être connue à l'automne 2023... au plus tôt.
C'est le député de LaFontaine Marc Tanguay qui a hérité du défi de diriger les troupes libérales en attendant la nomination du successeur de Dominique Anglade, qui a quitté la vie politique après une campagne difficile où le PLQ a perdu plusieurs plumes.
M. Tanguay a été embourbé dans une querelle politique au moment de son entrée en poste comme chef intérimaire du parti. «Ça n'a pas vraiment bien débuté pour M. Tanguay avec la saga de Mme Nichols (qui a quitté le caucus) et de Frantz Benjamin», rappelle Dominic Vallières, «mais les récentes semaines [en décembre] ont été bonnes pour les libéraux».
Marc Tanguay lors de l'annonce de sa nomination comme chef par intérim du PLQ, en 2022. Crédit: Jacques Boissinot | La Presse canadienne
On devra donc, du côté de Marc Tanguay, continuer sur cette lancée afin de redonner confiance aux députés. Ceux-ci pourront «recommencer à marcher la tête plus haute», ajoute l'analyste Dominic Vallières.
Chose certaine, les règles pour cette future course au leadership libéral seront fixées cet hiver.
D'ici là, les députés du PLQ entendent concentrer leur travail d'opposition officielle axé sur les trois «E»: l'économie, l'environnement et l'énergie, ainsi que sur les missions essentielles de l'État.
QS a les yeux rivés sur Saint-Henri–Sainte-Anne... et les moins jeunes
L’élection dans Saint-Henri–Sainte-Anne, dont la date n’est pas encore établie par le premier ministre Legault, pourrait être bénéfique à Québec solidaire, qui cherche à faire élire un 12e député. QS jouit d’ailleurs d’une certaine longueur d’avance dans la course depuis que l'unique candidat connu jusqu'à maintenant, Guillaume Cliche-Rivard, a confirmé qu’il tentera à nouveau de remporter la circonscription laissée vacante par Mme Anglade.
Le co-porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois (à gauche), en compagnie du candidat dans Saint-Henri-Sainte-Anne, Guillaume Cliche Rivard, en 2022. | Crédit: La Presse canadienne
M. Cliche-Rivard, avocat de formation, n'a pas mal fait au plus récent scrutin, récoltant 27,7% de l'appui populaire et terminant deuxième derrière Dominique Anglade. L’élection partielle devrait être déclenchée d’ici le 1er juin 2023.
Le co-porte-parole de QS, Gabriel Nadeau-Dubois, a admis lors d'une entrevue à Noovo Info qu'il y avait du boulot à accomplir pour «améliorer» les propositions de QS et pour «construire le pont» vers les moins jeunes.
Parce que si la formation de gauche désire élargir son pouvoir à l'Assemblée nationale, du travail reste à accomplir afin de mieux «s’adresser aux autres générations». Les gestes concrets pour y arriver restent à définir, mais on convient déjà qu'il faut reconnecter avec les régions du Québec.
On s'attend à ce que les solidaires talonnent, dans les prochains mois, le gouvernement Legault sur la problématique de la crise du logement, mais aussi sur la place que prend le privé dans le réseau de la santé.