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Grâce à des documents obtenus via la «Loi sur l’accès à l’information», Mme Rizqy a dévoilé qu’il y a eu 4256 situations de violence dans les écoles primaires et secondaires desservies par la Sûreté du Québec (SQ) au cours des cinq dernières années.
La députée libérale de Saint-Laurent, Marwah Rizqy, réclame encore une fois l’intervention du gouvernement de François Legault — et particulièrement celle du ministre de l’Éducation – Bernard Drainville – afin de contrer la violence au sein des écoles du Québec. L’année scolaire 2021-2022 a été techniquement la plus violente des cinq derniers cycles au Québec avec 1175 cas répertoriés dans les écoles primaires et secondaires desservies par la Sûreté du Québec (SQ).
Mme Rizqy a obtenu ces données par l'entremise de la Loi sur l’accès à l’information. Noovo Info a obtenu des copies des documents. Mme Rizqy réclame une «vraie discussion avec tous les collaborateurs du réseau, incluant parents, élèves, enseignants» et intervenants de tout acabit, puisqu’il y a eu plus de 4000 situations de violence dans les écoles primaires et secondaires desservies par la SQ au cours des cinq dernières années. La député libérale dénonce une «tendance» à la hausse.
Lorsque interpellé par Mme Rizqy au Salon bleu, vendredi, le ministre Drainville a reconnu la «hausse» de la violence en milieu scolaire et s'est dit ouvert aux suggestions, mais n'a pas acquiescé à la demande de l'opposition officielle, indiquant qu'il y a déjà des moyens en place dans la lutte contre le phénomène, incluant le déploiement à l'automne 2022 d'une équipe multidisciplinaire du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) composée de policiers «spécialisés» afin de prévenir la violence et l’usage d’armes à feu.
Mais voilà, les chiffres obtenus par Mme Rizqy n’incluent pas les écoles de Montréal et de Québec, ainsi que plusieurs autres villes, puisque ces territoires sont desservis par leur propre service de police. «SVP, répondez, on attend encore après vous», a commenté Mme Rizqy en point de presse à l'Assemblée nationale. Or, Noovo Info a mis la main sur des données du SPVM, et pas seulement sur cinq ans, mais bien à partir de 2017.
À Montréal, la tendance est bien claire: la violence est en hausse dans les établissements scolaires. En 2017, on avait répertorié 45 cas de voies de fait armées et/ou graves dans une institution d'enseignement sur le territoire montréalais. Ce total est passé à 80 en 2022.
Nombre total de voies de fait pendant les heures supervisées et non supervisées dans l’ensemble des établissements scolaires de Montréal
*Année de la déclaration de pandémie
Source: SPVM
La tendance semble se reproduire dans d'autres grandes villes du Québec. À Laval, les dossiers répertoriés par le Service de police de Laval (SPL) indiquent 100 cas de violence pour l'année 2021 et 95 cas de violence pour 2022. Dans ce cas-ci, le SPL calcule le nombre de cas de violence dans les écoles primaires et secondaires de son territoire sur une base annuelle plutôt que sur celle du calendrier scolaire.
À Gatineau, il est question de 219 cas de violence dans les écoles primaires et secondaires pour l’année 2021-2022.
À Saint-Jean-sur-Richelieu, le service de police indique avoir ouvert 193 dossiers entre les années scolaires 2018-2019 et 2022-2023 en lien avec un crime contre la personne ayant eu lieu dans une école primaire ou secondaire. À Trois-Rivières, le service de police dénombre 117 cas de violence dans les écoles primaires et secondaires de son territoire entre les années 2019-2020 et 2022-2023, dont deux cas de violence armée.
Du côté de la SQ, six villes présentent plus d’une centaine de cas depuis cinq ans avec en tête les écoles de Drummondville avec 125 cas de violence répertoriés entre 2019 et 2023. Viennent ensuite les écoles primaires et secondaires de Shawinigan (120), Victoriaville (119), Saint-Hyacinthe (117), Vaudreuil-Dorion (105) et Alma (101).
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«Je pense que [M. Drainville] ne comprend pas l'ampleur de la situation», a déclaré la députée avant de porter le dossier au Salon bleu devant le ministre en avant-midi vendredi. Une fois la discussion commencée avec M. Drainville à l'Assemblée nationale, elle a refusé de jeter le blâme sur lui. «Mais est-ce qu’on est capable d’avoir une discussion franche entre tous?» a-t-elle demandé.
«Je ne dirais pas qu’il y a péril en la demeure, mais je dirais qu’il y a urgence», a dit Mme Rizqy. C'est pourquoi la membre de l'opposition officielle réitère sa demande pour solliciter un mandat de rencontre d'experts sur le terrain.
Lorsqu'elle s'est présentée devant M. Drainville au Salon bleu, a souligné au ministre de l'Éducation que sa demande d'initiative n'engagerait «pas de frais», simplement «du temps»; elle permettrait qu'on s'attarde au problème «sans partisanerie, sans montrer du doigt, pour comprendre cette tendance».
Le ministre s'est contenté de dire que, lorsqu'on «développe une stratégie comme celle-là, on la développe au sein du ministère avec des ressources très compétentes pour aller chercher les meilleures solutions. On nous fait des recommandations, puis on dévoile notre stratégie au public». C'est à ce moment, selon M. Drainville, qu'on «ouvrira la discussion, et les députés pourront bonifier cette stratégie au fil des discussions», compte tenu du «sérieux de la situation».
Sur le terrain, on souhaite participer activement à ladite discussion. «Ce n'est pas une discussion à avoir entre la direction et le personnel, c'est une direction à avoir avec toute la société», a souligné Éric Gingras, président de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), dans un entretien avec Noovo Info.
Pour M. Gingras, il faut s'entendre tout le monde sur le fait que la violence à l'école c'est «tolérance zéro» – les mêmes mots employés par Marwah Rizqy. Mais il faut aller encore plus loin: .«Après, c'est quoi le geste qu'on ne tolère pas? Déjà là, on ne s’entend pas là-dessus», déplore-t-il.
En début d'année, la CSQ a fait une sortie publique pour parler de ses préoccupations, dont la violence en milieu scolaire. La CSQ, dont la majorité des membres travaillent dans le milieu de l'éducation, soutenait alors que le phénomène de la violence dans les écoles est bel et bien plus présent et que des gestes de violence se manifestent même au préscolaire et sont malheureusement banalisés.
La violence en milieu scolaire, «il en existe énormément et c'est de plus en plus jeune», avait lancé M. Gingras.
Les données partagées par Mme Rizqy montrent une baisse significative des interventions policières en milieu scolaire et des saisies d'armes en 2019-2020, sans surprise: c'était l'année de la déclaration de pandémie. Mais justement, M. Drainville a montré du doigt la COVID-19 comme probable source – au moins partielle – de la hausse des cas de violence dans les écoles.
«Quand on parle de violence à l’école, on pense aussi à la détresse psychologique», a noté le ministre, citant plusieurs études qui concluent que les jeunes ont des comportements plus violents depuis qu'ils ont été forcés de s'isoler.
«Si on veut lutter contre la violence, on va le faire de toutes sortes de manières: en responsabilisant les directions, les Centres de services scolaire, avec l’aide des policiers quand ce sera nécessaire, avec des agents sociaux qui travaillent au sein des écoles», a énuméré M. Drainville en s'adressant à Mme Rizqy, convenant que, lorsqu'un élève «est bien à l’école, les chances de érussite sont rehaussées».
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Si on se fie aux données révélées par la demande d’accès à l’information de la députée libérale, il peut être difficile de discerner une tendance à la hausse ou à la baisse sur cinq ans quant aux saisies d’armes au Québec. Mme Rizqy, elle, en voit une, tendance. «C’est factuel. On passe du simple au double dans certains cas.» Depuis 2019, la SQ répertorie 516 dossiers impliquant une situation de violence armée dans les écoles primaires et secondaires de son territoire – excluant toujours, entre autres, Montréal et Québec.
Mais plus que les chiffres, selon Mme Rizqy, c'est la nature des saisies qui fait écarquiller les yeux. Les objets dangereux les plus souvent saisis au fil du temps sont les couteaux (196 couteaux entre 2019 et aujourd’hui), les carabines ou fusil (68) et «d’autres armes ou objets pour étrangler, poison et poivre de Cayenne (77).
Parmi les autres armes saisies depuis cinq ans par la SQ, on retrouve: arme de poing - pistolet - revolver, autres armes similaires à une arme à feu (pistolet à plomb, pistolet de départ), autres objets pointus ou tranchants (pic, hache, épée, lame de rasoir, arc), bâton - barre de fer - objet contondant (machette, poinçon), poing américain et projectile.
Encore une fois l’année scolaire 2021-2022 a été plus difficile sur ce plan avec 116 saisies d’armes sur le territoire de la SQ et 14 du côté de Laval. Encore une fois, les chiffres n’incluent pas les données des villes de Montréal et Québec, desservies respectivement par le SPVM et le SPVQ.
Pour l’année scolaire 2022-2023, les chiffres sont incomplets puisque l’année n’est pas encore terminée.
Les données dévoilées par la députée libérale Marwah Rizqy ne sont peut-être que la pointe de l’iceberg puisque les données compilées par la SQ n'incluent que les dossiers ouverts à la suite d’un incident au sein d’un établissement scolaire. C’est donc dire que les évènements qui n’ont pas fait l’objet de plainte officielle ne figurent pas dans les statistiques. Dans la plupart des cas, les évènements qui se sont produits hors de l’enceinte d’un établissement scolaire, mais qui impliquent des élèves et qui auraient un lien avec l’école, ne figurent pas non plus dans les données compilées.
On n'a donc vraisemblablement pas tout le portrait de la violence dans les écoles à partir des données recueillies par Mme Rizqy. Selon ce qu’a appris Marie-Michelle Lauzon pour Noovo Info à l'automne 2022, le nombre de saisies d’armes opérées par la direction d’établissements scolaires de nombreuses régions au Québec augmente et plusieurs d’entre elles passent sous silence, cachées même au personnel enseignant et aux parents,
À voir également : De plus en plus d'armes saisies à l'école
Mme Rizqy, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'éducation, et sa collègue Jennifer Maccarone, responsable libérale des dossiers de sécurité publique, ont déjà demandé plus tôt cette année au gouvernement Legault de faire un pas de plus pour trouver des solutions à la violence dans les écoles du Québec. Le ministre de l'Éducation avait répondu que «les écoles sont sécuritaires.»
Données compilées par les députées du PLQ au 1er février 2023 en lien avec la violence dans le milieu scolaire:
Centre de services scolaire Harricana (Abitibi-Témiscamingue)
19 événements majeurs signalés en 2018-2019
47 événements majeurs signalés en 2021-2022
Centre de services scolaire des Affluents (Lanaudière)
556 cas de violence physique en 2018-2019
1596 cas de violence physique en 2021-2022
Centre de services scolaire des Îles (Îles-de-la-Madeleine)
5 cas de violence physique en 2018-2019
47 cas de violence physique en 2020-2021
Centre de services scolaire du Littoral (Côte-Nord)
3 cas d'agression verbale/physique/sexuelle/intimidation en 2019-2020
41 cas d'agression verbale/physique/sexuelle/intimidation en 2021-2022
Commission scolaire Sir-Wilfrid-Laurier (Laval|Laurentides|Lanaudière)
1062 incidents liés à la violence (physique ou verbale) en 2018-2019
1933 incidents liés à la violence (physique ou verbale) en 2021-2022
Centre de services scolaires de la Beauce-Etchemin (Chaudière-Appalaches)
405 gestes de violence en 2018-2019
979 gestes de violence en 2021-2022
Avec de l'information de Marie-Michelle Lauzon pour Noovo Info et de La Presse canadienne.