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«Ça lève le coeur», trouve le ministre des Services sociaux, Lionel Carmant.
Le gouvernement de François Legault a annoncé avoir «pris les mesures nécessaires» après avoir pris connaissance des échanges sexuels entre au moins neuf éducatrices et cinq résidants mineurs au centre de réadaptation Cité-des-Prairies dans les deux dernières années.
«Les révélations de La Presse sont plus que troublantes», a déclaré le ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, dans une publication sur X au sujet de l’enquête sur le scandale sexuel survenu dans ce centre montréalais où des jeunes sont placés sous garde pour des crimes incluant meurtres, trafic de drogue, proxénétisme ou encore possession d’armes à feu. Le centre jeunesse de Cité-des-Prairies est celui recevant les cas de DPJ les plus complexes de la région de Montréal.
M. Carmant affirme qu’une enquête externe et qu’une enquête policière du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) sont en cours.
Le ministre Carmant en a rajouté dans un courriel envoyé à La Presse canadienne. «Ça lève le cœur, il n'y a pas d'autres mots, ça lève le cœur; l'abus sexuel par des personnes en pouvoir, c'est intolérable, intolérable dans tous les milieux.»
Assunta Gallo, directrice de la protection de la jeunesse (DPJ) au CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, a confirmé à Noovo Info avoir déclenché une enquête administrative en septembre. Un premier signalement avait été reçu en août dernier pour des allégations de relations inappropriées entre des éducatrices et des jeunes du centre de réadaptation situé à Rivière-des-Prairies. D’autres constats ont été faits par la suite.
«Ce type de situation est inacceptable et nous prenons ces allégations très au sérieux et de façon responsable», a commenté une porte-parole du CIUSSS du Centre-Sud auprès de Noovo Info. «Notre priorité est de garantir la sécurité et le bien-être des jeunes.»
Pour le moment, ces personnes impliquées dans le scandale ont été suspendues ou congédiées, a affirmé la porte-parole Geneviève Paradis. Les autorités n’ont pas précisé le nombre de suspensions ou de congédiements ni les raisons derrière ces décisions, mais précisent que deux gestionnaires ont été suspendus puisque leurs équipes sont directement touchées.
La conclusion de l'enquête du CIUSSS du Centre-Sud est attendue plus tard cet automne. «Nous nous assurons que tous les employés soient rencontrés dans un contexte sécuritaire, de confidentialité et de neutralité», a dit Mme Paradis.
Selon la directrice Assunat Gallo, les éducatrices concernées ont agi en position d’autorité. Ils n’excluent pas qu’il puisse y en avoir plus. C’est pourquoi Mme Gallo demande à de potentielles victimes présumées supplémentaires ou à du personnel de contacter les autorités s’ils ont de l’information à relayer.
L’enquête du CIUSSS révèle qu’une des éducatrices impliquées dans le dossier est tombée enceinte d’un des mineurs impliqués. Elle a accouché d’un enfant. Une autre éducatrice porterait l’enfant d’un des jeunes.
Le syndicat des employés du CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, lié à l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), a dénoncé ce qui s’est produit au centre de réadaptation Cité-des-Prairies.
«L'APTS du Centre-Sud de l'Île de Montréal ne cautionne aucun comportement reconnu déplacé ou inadéquat envers les jeunes bénéficiaires», a déclaré la représentante nationale Caroline Letarte-Simoneau à Noovo Info.
«La mission de nos membres est d'aider les jeunes, pas de leur nuire», a-t-elle ajouté, s’abstenant de tout commentaire supplémentaire puisque des enquêtes sont en cours.
S’il est encore trop tôt pour parler de sanctions pénales, l’enquête policière devant suivre son cours, il est permis de penser que les conséquences risquent d’être importantes pour les éducatrices impliquées dans ce scandale sexuel.
«Théoriquement parlant, dans l’abstrait, si quelqu’un est reconnu coupable d’agression sexuelle à l’endroit d’un mineur, c’est puni sévèrement par la justice», a souligné Me Walid Hijazi, avocat criminaliste, en entrevue au Noovo Info 12.
Me Hijazi rappelle que si l’âge du consentement sexuel est de 16 ans, un jeune de 16 ou 17 ans ne peut pas consentir à des relations sexuelles avec un adulte en situation de confiance.
«Que ce soit un éducateur, un professeur , un médecin ou un coach de hockey, même si c’est volontaire, si la personne est en situation d’autorité ou de confiance, il n’y a pas de consentement possible pour un mineur de 16 ans», a-t-il précisé sur nos ondes.
«S’il y a accusation, poursuite et reconnaissance de culpabilité, le fait d’avoir été en situation d’autorité ou de confiance est un facteur aggravant selon le Code criminel, ce ne serait pas une situation facile pour les éducatrices», a précisé Me Hijazi.
Dans la classe politique, Québec solidaire (QS) demande la démission de la directrice nationale de la DPJ, Catherine Lemay.
Selon Guillaume Cliche-Rivard, responsable solidaire en matière de Services sociaux, «les révélations et les scandales ne font que s’accumuler et s’amplifier à la DPJ.», a-t-il écrit dans un communiqué diffusé vendredi. «Il est temps que la CAQ arrête d'être en réaction et se mette en mode action. Pour le moment, une chose s'impose: Mme Lemay doit partir.»
La frustration de QS trouve écho auprès de l'opposition officielle. Le Parti libéral du Québec (PLQ) accuse le gouvernement Legault d'avoir «perdu le contrôle».
«Je suis dégoûtée par le drame de Cité-des-Prairies», a lâché la porte-parole du PLQ en matière de protection de la jeunesse, Brigitte B. Garceau. «Le ministre Carmant est au courant de cette affaire scabreuse depuis quand? À quel moment a-t-il su et qu’a-t-il fait?»
«Je demande au ministre Carmant, non seulement de déclencher une enquête policière à Cité-des-Prairies, mais également de déclencher une enquête externe dans tous les centres jeunesse et de réadaptation», a-t-elle ajouté.
De son côté, le porte-parole péquiste en la matière, Joël Arseneau, souligne le nombre de personnes impliquées et s'interroge sur le fait qu'un tel système apparemment structuré ait pu exister dans un centre de réadaptation.
M. Arseneau fait montre d'une certaine stupéfaction d'apprendre que le ministre n'ait été informé que la semaine dernière alors que le premier signalement date du mois d'août. S'il est difficile de blâmer quelqu'un qui n'avait pas l'information, le député des Îles-de-la-Madeleine estime que M. Carmant «doit rencontrer les dirigeants du réseau et des gestionnaires de terrain et mettre son poing sur la table et dire que ça suffit: le ministre doit être au courant de ce qui se passe».
Avec de l'information de Véronique Dubé pour Noovo Info, ainsi que de La Presse canadienne et de CTV News.