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Combien de morts et de décès dans de telles circonstances faudra-t-il pour que les autorités se décident à changer la donne et les pratiques pour de vrai et pour de bon ?
C’est une histoire qui s’est terminée tristement, comme beaucoup d’autres avant elle.
Le 20 novembre dernier, la famille et les proches de Ronny Kay, un homme d’origine chinoise et décédé le 17 septembre dernier à l’âge de 38 ans, se sont rassemblés, avec plusieurs membres de la communauté asiatique montréalaise. C’est que Kay est décédé lors d’une intervention policière du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) alors qu’il était en détresse psychologique.
Dans un entretien avec le média Pivot, la famille de Kay déplore qu’elle n’ait toujours pas de réponses après la mort de Ronny. Toujours selon ses proches, Ronny avait une peur bleue des policiers. La famille s’indigne également de n’avoir reçu aucunes condoléances de la part du SPVM ni même de politiciens. Dans une lettre ouverte adressée à diverses instances, dont la mairesse de Montréal, Valérie Plante, la famille réclame une enquête publique sur le décès de Ronny Kay ainsi qu’un accès immédiat à des services psychosociaux.
La mort de Ronny Kay rappelle celles d’Alain Magloire ou encore de Pierre Coriolan, décédés eux aussi après des interventions de la police en contexte de crise de santé mentale. Cette problématique n’est pas l’apanage du Québec ni même de Montréal, mais c’est une tendance observée un peu partout au pays.
En 2018, une enquête de la CBC avait révélé que la majorité des personnes décédées après des interventions policières depuis le début des années 2000 au Canada souffraient de problèmes de santé mentale et/ou vivaient avec des enjeux de toxicomanie.
Pour expliquer ce triste constat, on peut certainement pointer du doigt les ratés de la désinstitutionnalisation qui s’est opérée au cours des années 1960. À cette époque, il y avait un mouvement massif pour sortir les personnes vivant avec des problématiques de santé mentale des hôpitaux. L’objectif de la désinstitutionnalisation était de rehausser la qualité de vie des personnes malades qui pouvaient vivre dans des conditions fâcheuses en milieu hospitalier. Malheureusement, plusieurs de ces individus se sont retrouvés en situation d’itinérance parce que les soins et les services n’ont pas été déployés de manière conséquente et adaptée à l’ampleur de la problématique.
De plus, une réflexion profonde sur les déterminants sociaux qui sont des facteurs explicatifs importants de l’émergence des problématiques de maladies mentales n’a pas suivi. Par déterminants sociaux, j’entends le réseau social, un salaire décent ou encore l’accès à un logement adéquat et salubre à titre indicatif. Dans la même veine, le prisme médical et individualisant qui est souvent prisé pour analyser la maladie mentale n’a que peu été remis en question.
Il est temps de voir les décès comme ceux de Ronny Kay, Pierre Coriolan ou encore Alain Magloire comme étant le symptôme d’un constat plus large : celui voulant que la police ne doive pas être appelée en premier recours pour répondre à des situations de crises de santé mentale. Particulièrement lorsque les personnes en crise sont des personnes racisées. La recherche a démontré que ces personnes ont davantage de risque de décéder dans de telles circonstances.
Intervenir en situation de crise est une tâche qui devrait surtout incomber à des intervenants communautaires et sociaux, ou du moins, à des policiers qui travaillent en collaboration avec eux dans le but de « désescalader » les situations de crise.
Combien de morts et de décès dans de telles circonstances faudra-t-il pour que les autorités se décident à changer la donne et les pratiques pour de vrai et pour de bon ?