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Les premiers ministres des provinces et territoires se sont rendus à la Maison-Blanche mercredi après-midi.
Le premier ministre François Legault a brandi, pour la première fois mercredi, la menace de contre-tarifs sur l'aluminium d'ici à la renégociation de l'accord de libre-échange avec les États-Unis.
M. Legault était à Washington avec le Conseil de la fédération pour tenter de dissuader l'administration Trump d'imposer des tarifs douaniers sur les produits canadiens.
Voyez le compte-rendu de Jean-François Poudrier dans la vidéo liée à l'article.
Contre toute attente, les premiers ministres des provinces et territoires ont été invités à la Maison-Blanche, où ils ont rencontré deux proches conseillers du président Donald Trump.
Cette rare réunion au sommet aurait duré près d'une heure.
Toutefois, au même moment, dans le Bureau ovale, M. Trump menaçait de mettre en place des droits de douane réciproques aux éventuels contre-tarifs imposés par le Canada.
«Avec tous les gens que j'ai écoutés depuis deux jours (...) c'est sûr qu'eux pensent que les relations commerciales (...) doivent se faire autrement», a relaté M. Legault en fin de journée.
«Il va falloir être capables de faire des propositions (...) à long terme. (...) Ce que je sens, c'est que les États-Unis voudraient s'assurer à long terme d'avoir accès à nos ressources, à nos minéraux critiques.»
Entre-temps, «M. Trump a l'air déterminé à mettre ses tarifs», dit-il. «Préparez vos bagages, a-t-il lancé à l'intention des journalistes. Je pense qu'on va venir souvent à Washington dans les prochains mois.»
Lundi, M. Trump a annoncé qu'il imposera des tarifs de 25 % sur l'acier et l'aluminium à compter du 12 mars. Ces tarifs s'ajouteraient à d'autres, pour un tarif total de 50 % sur ces deux métaux.
Plusieurs experts estiment qu'il s'agit là d'une tactique de négociation.
«On ne peut pas continuer d'avoir (...) des nouvelles menaces à chaque semaine», a pesté M. Legault mercredi matin, lors d'une mêlée de presse avec ses homologues dans un chic hôtel de la capitale américaine.
«Il ne faut rien exclure, même pas de mettre des tarifs à l'exportation (sur l'aluminium). J'ai proposé ça à mes collègues, on va regarder ça comme scénario, une taxe à l'exportation seulement aux États-Unis.
«Ça inciterait nos alumineries à exporter en Europe, en Asie (...) pour mettre en difficulté le gouvernement américain, qui serait obligé de payer plus de frais de transport en important de l'aluminium de l'Asie ou d'ailleurs.
«C'est vraiment les États-Unis qui sont mal pris», a-t-il ajouté.
À son arrivée à Washington mardi, M. Legault avait qualifié à plusieurs reprises la stratégie de Donald Trump de «ridicule». Selon lui, les États-Unis sont dépendants de l'aluminium du Québec.
Près de 75 % de tout l'aluminium primaire produit en Amérique du Nord provient du Québec, selon le ministère québécois de l'Économie.
«M. Legault a son opinion (...) on verra», a répondu le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford, interrogé à savoir s'il appuyait l'idée des contre-tarifs sur l'aluminium.
François Legault le répète: le climat est propice à une réouverture hâtive de l'Accord Canada–États-Unis–Mexique, une idée qui ne fait pas non plus consensus au sein du Conseil de la fédération.
La renégociation de l'entente de libre-échange avec les États-Unis et le Mexique est prévue en 2026.
«Il y en a qui sont pour, il y en a qui sont contre. Évidemment, la question qui se pose, c'est: est-ce qu'on peut négocier avec un premier ministre au Canada qui est là de façon temporaire?» a soulevé M. Legault.
«Ce que je me dis, et je parle en mon nom, c'est le plus vite qu'on commence, le plus vite qu'on va conclure, parce que ça va prendre plusieurs mois pour renégocier l'ensemble de l'entente.
«On est mieux de commencer le plus rapidement possible, parce que l'élection fédérale pourrait avoir lieu dans plusieurs mois, donc on retarderait et on continuerait de créer de l'incertitude», a-t-il ajouté.
M. Legault s'est dit prêt à «beaucoup de compromis dans l’aéronautique, dans la forêt, dans, peut-être, la sécurité à long terme sur l'aluminium».
Pas question cependant de toucher à la gestion de l'offre ni à la culture, deux éléments «non négociables», a-t-il soutenu.
Lors d'une mêlée de presse distincte, à Washington, le ministre des Finances du Canada, Dominic LeBlanc, a déclaré qu'il ne serait pas «réaliste» de rouvrir l'entente avec les États-Unis avant le 1er avril.
C'est à ce moment que la revue des échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis, commandée par le président Trump, sera complétée.
«Dans les prochaines semaines, la priorité, c'est d'éviter les tarifs douaniers», a-t-il déclaré.
M. LeBlanc a d'ailleurs rencontré le futur secrétaire au Commerce des États-Unis, Howard Lutnik, mercredi.
Les premiers ministres provinciaux et territoriaux ont rencontré mercredi matin des élus américains, dont le républicain Adrian Smith, qui préside un sous-comité sur le commerce.
«Le message se rend», a commenté Doug Ford à sa sortie. «C'était très positif», a ajouté le premier ministre du Manitoba, Wab Kinew, faisant valoir que le Canada était un «Costco» des minéraux critiques pour les États-Unis.
«Je suis vraiment fière de cette équipe Canada», disait plus tôt son homologue du Nouveau-Brunswick, Susan Holt.
Les premiers ministres avaient aussi été conviés à un dîner organisé par le Conseil canadien des affaires américano-canadiennes.
M. Legault s'est également entretenu privément avec la première ministre de l'Alberta, Danielle Smith, en plus d'accorder une entrevue au magazine «Politico».
La veille, il avait rencontré des représentants des industries de la construction, de l'aluminium et du transport, notamment.