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La Commission des pertes massives a conclu que la GRC n'avait pas tenu compte des années de signes avant-coureurs concernant le tueur, qui a tué par balles 22 personnes – dont une policière de la GRC – les 18 et 19 avril 2020.
La commission d'enquête publique sur la tuerie d'avril 2020 en Nouvelle-Écosse a révélé des échecs généralisés dans la façon dont la GRC a réagi à la pire fusillade de masse au Canada et recommande qu'Ottawa repense le rôle central de la police fédérale dans certaines régions du pays.
Dans des remarques écrites préparées pour être livrées plus tard jeudi, la commissaire Leanne Fitch a indiqué que la Gendarmerie royale du Canada (GRC) devait enfin procéder aux changements fondamentaux que de nombreux rapports précédents ont déjà réclamés.
Dans un rapport en sept volumes couvrant plus de 3000 pages, la
Commission des pertes massives affirme également que la police a raté des drapeaux rouges dans les années qui ont précédé l'assassinat de 22 personnes, les 18 et 19 avril 2020, par un denturologiste déguisé en policier de la GRC et conduisant une réplique d'autopatrouille.
Voyez le reportage de Sabrina Rivet dans la vidéo.
Le meurtrier, Gabriel Wortman, a été tué par deux policiers de la GRC dans une station-service à Enfield, 13 heures après le début de son carnage.
Le rapport final plonge profondément dans les causes de cette tuerie. La commission cite notamment la violence du tueur envers sa conjointe et l'incapacité de la police à agir en conséquence. Elle évoque aussi les «préjugés implicites» qui semblaient aveugler les policiers et les citoyens sur le danger que faisait peser - ou non - un professionnel blanc de sexe masculin.
En réponse, les commissaires recommandent une réforme de la GRC, où le modèle actuel de formation de 26 semaines à Regina serait abandonné - car il ne suffit plus pour les exigences complexes des services de police. Cette Académie d'entraînement de la GRC serait remplacée par un modèle d'enseignement de trois ans, basé sur un diplôme, comme cela existe en Finlande.
De façon plus générale, les commissaires souhaitent qu'Ottawa adopte une loi dont le principe directeur serait «une approche axée sur la prévention en matière de sécurité publique», qui considère les corps policiers comme des «partenaires» qui collaborent avec les centres de santé mentale en milieu rural, qui devraient être mieux financés, et des travailleurs de première ligne qui luttent contre les violences conjugales et familiales.
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Le volumineux rapport commence par un récit des erreurs que la police a commises au cours des années précédant les meurtres des 18 et 19 avril.
Le résumé du rapport indique que peu de temps après le début de la fusillade à Portapique, les commandants de la GRC n'ont pas tenu compte des témoignages des citoyens, et les hauts responsables de la GRC ont supposé à tort que les résidents s'étaient trompés lorsqu'ils ont signalé avoir vu le tueur conduire une autopatrouille entièrement aux couleurs de la GRC.
Le rapport conclut que les officiers de la GRC ont été «trop prompts à adopter une explication qui ne tenait pas compte des informations claires et cohérentes que plusieurs témoins oculaires avaient fournies indépendamment les unes des autres».
L'enquête a notamment appris que les commandants et les policiers en première ligne de la GRC n'avaient pas utilisé les `étapes d'enquête de base' et avaient conclu à tort que le véhicule du tireur était une vieille voiture de police désaffectée sans décalques - ou très peu identifiée.
De plus, la GRC n'a pas envoyé rapidement d'alertes au public avec une description du tueur, jusqu'à ce qu'il soit trop tard pour certaines de ses victimes.
Après avoir dressé une litanie de lacunes, la commission appelle à un nouvel examen externe de la GRC. Elle indique que le ministre fédéral de la Sécurité publique devrait ensuite établir des priorités pour la GRC, «en conservant les tâches qui conviennent à un corps policier fédéral et en identifiant les responsabilités qu'il vaut mieux réattribuer à d'autres».
«Cela pourrait entraîner une reconfiguration des services de police au Canada et une nouvelle approche du soutien financier fédéral aux services de police provinciaux et municipaux», indique le rapport.
Entre autres choses, la commission affirme que la police fédérale est très désorganisée. L'examen des 5000 pages de politiques et de procédures de la GRC a révélé aux commissaires que les propres membres de la police fédérale n'étaient pas clairs sur les réponses appropriées aux incidents critiques et sur la communication avec la population.
«Le volume de matériel et le désarroi dans les directives de la GRC à ses employés se sont reflétés dans le fait que de nombreux témoins issus de la GRC nous ont dit qu'ils n'étaient pas certains des politiques qui s'appliquaient à leurs actions ou si les politiques pertinentes avaient été suivies.»
Plus particulièrement, le rapport vise les «services de police contractuels», que la GRC fournit à une grande partie du Canada rural, à l'extérieur du Québec.
«Il y a une longue histoire d'efforts pour réformer le modèle des services de police contractuels de la GRC afin de mieux répondre aux besoins (...) des communautés qu'elle dessert, indique le rapport. Ces efforts ont largement échoué à résoudre les critiques qui ne datent pas d'hier.»
Le rapport établit également des liens entre les fusillades et les mauvais traitements infligés par le tueur aux femmes, en particulier à sa conjointe, Lisa Banfield, qu'il a isolée de sa famille et agressée pendant de nombreuses années.
«En tant que commissaires, nous pensons que cette leçon est la plus importante à tirer de cette perte massive. Ne détournons plus le regard», indique le rapport.
La commission recommande que ces formes de violence soient déclarées «épidémie», tout en soulignant que de nombreux événements de violence de masse commencent par une agression contre une femme.
Le rapport détaille les antécédents de violence conjugale du tueur Wortman dans ses relations avec les femmes, y compris Mme Banfield. En particulier, le rapport note l'expérience de Brenda Forbes, une voisine de Portapique qui avait informé la GRC de la violence de Wortman envers sa conjointe. Or, il n'a jamais subi de conséquences, alors qu'elle a dû faire face à des années de harcèlement, d'intimidation et de menaces de la part de Wortman, ce qui l'a incitée à quitter la province.
Les commissaires notent que les cinq armes à feu que possédait Wortman lorsqu'il est mort - deux armes de poing semi-automatiques, une carabine de style policier, un fusil semi-automatique et un pistolet émis par la GRC volé à une policière qu'il a tuée - avaient été obtenues illégalement.
Le tueur a passé en contrebande au moins trois armes en provenance des États-Unis et en a obtenu une de la succession d'un vieil ami. Les autorités croient qu'il possédait aussi plusieurs autres armes à feu qui auraient été détruites dans des incendies qu'il a allumés.
Les trois commissaires recommandent de modifier le Code criminel et la Loi sur les armes à feu dans le but de réduire les échappatoires et de renforcer les interdictions de posséder certaines armes, en précisant que la possession d'armes constitue un «privilège conditionnel».
La commission recommande une interdiction de toutes les armes de poing semi-automatiques et de tous les fusils et carabines semi-automatiques qui déchargent des munitions à percussion centrale et qui sont conçus pour accepter des chargeurs amovibles, ainsi que des modifications pour resserrer les lois sur les chargeurs de grande capacité.
Les commissaires recommandent également des définitions normalisées d'armes à feu prohibées dans le Code criminel, ce que le gouvernement libéral fédéral avait tenté de faire l'automne dernier, avant de reculer devant le tollé des propriétaires d'armes à feu.
Les commissaires souhaiteraient maintenant que d'ici le 31 mai prochain, les gouvernements du Canada et de la Nouvelle-Écosse créent un organisme de «mise en œuvre et de responsabilité mutuelle» pour s'assurer que leurs recommandations soient mises en œuvre.
Le mandat de la commission indique clairement qu'elle ne peut pas blâmer ou déterminer la responsabilité criminelle ou civile, et le gouvernement n'est pas tenu de mettre en œuvre ses 130 recommandations.
Michael MacDonald, président de la commission, a déclaré dans des remarques écrites fournies avant le dépôt du rapport, jeudi, qu'il espère que les gouvernements éviteront «les réponses simplistes» et transformeront les conclusions du rapport en gestes concrets.
«En tant que pays, nous avons besoin d'un engagement pour continuer (…) réparer les systèmes défectueux et faire de la prévention de la violence notre étoile polaire.»